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Sorcelleries (T3) Les jeux sont fées

Publié le 08 février 2013 par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

Scénario de Teresa Valero, dessin de Juan J. Guarnido Public conseillé : Tout public

Style : Humour & fantastique Paru chez Casterman, le 25 janvier 2013 Share

Présentation par l’éditeur

Le 3e épisode de Sorcelleries s’ouvre sur une sacrée pagaille ! Un bébé fée, Hazel, a décidé de rester dans le monde des sorcières, ce qui n’est pas pour déplaire à ces dernières. Mais Titiana, la reine des fées, ne l’entend pas de cette oreille ! Pour ne rien arranger, Rex, un être humain marié à une (charmante) sorcière, décide d’organiser un jeu télévisé auquel participent des enfants… dont Hazel.

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Sorcelleries (T3) Les jeux sont fées

De retour du Festival d’Angoulême 2013, je vous propose une forme différente de chroniques, plus courtes et enrichies par l’interview des auteurs.

Ce que j’en pense

Et hop ! Le troisième (et dernier tome) de « Sorcelleries » est arrivé !
Quand Guarnido, le « sorcier » de « Blacksad », multi-récompensé pour son travail graphique de très haut niveau s’engage dans un projet lisible par ses enfants, voilà le résultat.
Après une mise en place de l’univers délirant et fantastique (tome 1), un nœud dans la narration (tome 2), ce troisième tome clôture en beauté la série, en affichant des qualités en constantes progression.
Côté récit, Teresa Valero prend le contre-pied de son principe de départ pour varier les situations. Toujours à la recherche de Hazel, le bébé fée, les autres fées organisent une contre attaque, façon « coup de poing » chez les sorcières. Pour Valero et Guarnido, c’est l’occasion d’inventer et de mettre en images les situations les plus extravagantes possibles. Dans ce délire continu, où toutes références (enfantines comme adultes) s’entremêlent dans un humour « potache », Guarnido s’amuse à croquer, avec beaucoup d’expressivité et de talent, une galerie gigantesque de portraits, tous plus délirants les uns que les autres.
Si l’univers orignal et baroque est assez réussi, le scénario hésite entre deux axes : une aventure « simple » (qui doit rester compréhensible des jeunes lecteurs) et une critique cynique de notre société télévisuelle et consumériste. Le résultat manque un peu de force.
Heureusement, le dessin semi-réaliste de Guarnido, lâché et précis en même temps, sauve la mise. Visiblement, le dessinateur comme les lecteurs y prennent un grand plaisir. Parfaitement à l’aise dans ce style humoristique caricatural, Guarnido fait du zèle. Gueules et silhouettes, doubles pages en « multilinéarité », enfants monstres, il s’en donne à cœur joie avec un bonheur partagé.
Dans Sorcelleries, pas de prise de tête. N’attendez pas la maestria graphique d’un « Blacksad », ou la maitrise d’un scénario de Goscinny. Jeune lecteur (8-9 ans minimum) ou adultes, « Sorcelleries » vous réserve quand même un bon moment de lecture, avec des vrais gros morceaux de sourires et de rires dedans.


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L’interview

A l’origine du projet, il y a l’envie de dessiner pour tes enfants. Leurs regards a-t-il fait évoluer Sorcelleries ?
J. J. G. Non, pas vraiment, car c’est un projet plus compliqué qu’il en a l’air.
Les contraintes de textes, de dessins, les idées qu’on voulait placer et le travail de synthèse sur le scénario, tout ce travail a fait évoluer la série, mais aussi quelques réflexions par rapport à l’accueil du public sur le premier tome. On est devenus plus exigeants. Il y a eu une remise en question sur le tome 3. Le scénario a été ré-écris environ quatre fois. On avait l’impression que ce genre d’humour était plus adapté au public espagnol qu’au public français (la scénaristes «  », est espagnole). Au final, la récompense c’est que tous les enfants (français ou espagnol) ont aimés « Sorcellerie ». On en pas encore trouvé un qui n’a pas aimé.

Il y a une deuxième lecture plus adulte ?
J. J. G. Bien sûr ! Ce sont les références à la culture pop, aux séries « B » qui parlent aux adultes.
Il y a même des références BD avec l’empreint de « Long John Silver »… Tu t’adresses aux deux publics ?
Notre prétention, c’était de faire de « l’Asterix » : une BD tout public, qui peut être lue et comprise par les enfants comme les adultes à différents niveaux.
J’ai toujours « la banane » en lisant « Sorcelleries ». Le parti pris de départ, c’est l’humour ?
Oui. Avant la première version du scénario, l’idée était de faire une BD POUR les enfants. Le scénario a peu changé, mais certains sujets (le consumérisme et la télévision) ne sont compris QUE par les adultes.

Techniquement, tu te rapproches d’Astérix, mais il y a aussi un héritage ‘Franquin »‘, avec une veine caricaturale très expressive. Cela se trouve sur certains de tes personnages de « Blacksad » (Weekly, par exemple). Est-ce que tu as appris cela dans les studios « Disney » de Boulogne ?
J. J. G. Non, j’ai toujours dessiné sur le registre d’humour. Avant Disney, j’ai travaillé dans différentes productions américaines. à chaque moment, je travaillais mon dessin dans ce sens. C’est un registre que j’ai depuis toujours et qui me manquait dans « Blacksad ». à partir du tome 1, on s’est dit qu’il ne fallait pas trop « cartooniser », parce qu’il y avait un décalage avec l’aspect noir, mais ça me manquait.

Y’a-t-il des personnages que tu prends plus de plaisir à dessiner que d’autres ? Le personnage « gentil » de « Hazel » me laisse froid par exemple…
J. J. G. Tu trouves que c’est un personnage froid ? Pour moi, c’est le seul « méchant de l’histoire ». Rex, c’est un imbécile. Même son « Némésis », le petit loup garou « Lupus » n’arrive pas à être méchant, tandis qu’elle est impitoyable avec lui.
Franchement, j’aime dessiner tous les personnages. Panacéa avec son côté Sexy / Monstrueux. Le côté « Uderzo » / « gros nez » des sorcières. J’aime Puck, les enfants monstres…
Les personnages que je préfère, c’est les petites fées, étonnamment. En lisant le scénario j’avais du mal à m’imaginer dessiner cela. Ces petites fées qui parlent tout le temps de maquillage, je les visualisais en version « Barbie-rose-bonbon »… Un truc ingrat. Le bon angle, c’est de les intégrer façon « High School Musical », ou « Hannah Montana ». La blondasse américaine aux yeux noirs, riche, gâtée, insupportable. Je me suis dit qu’il y avait un 2eme degré à exploiter. Ce fut alors un pur bonheur. J’ai vu ce genre de personnages apparaitre dans des séries plus adultes. Dans un épisode de « Sex and the City », j’ai vu quatre jeunes filles de ce type et c’était exactement les quatre petites fées.

Trouves-tu des correspondances entre « Blacksad » et « Sorcelleries », en technique, ou en plaisir ?
J. J. G. En plaisir il y en a, même si c’est différent. Sur « Blacksad », le plaisir vient de l’animalier, de la recherche, de la reconstruction des années 50. Sur Sorcelleries, le plaisir, c’est le dessin d’humour, la caricature.
Il y a des liens et un relais intéressant. Mon encrage sur « Blacksad » a fait un pas de géant grâce à Sorcelleries. Entre le tome 3 et le tome 4, « Sorcelleries » m’a permis de développer une certaine aisance. J’ai progressé dans ce registre particulier franco-belge, façon Franquin, Simon Léturgie, Bodart ou Didier Conrad.

Dans les références que tu cites, la couleur est assez peu présente. Sur « Sorcelleries », au contraire, elle est très forte et elle a tendance à affadir ton encrage..
J. J. G. ça a été une difficulté depuis le départ. Sur le premier tome, j’ai réalisé les couleurs, mais sans expérience j’ai perdu beaucoup de temps. Pour la plupart, je n’en suis pas fier. Les 2eme et 3eme tomes ont été réalisés par d’autres artistes. Le 2e par Bruno, qui a fait un boulot super. Dans le 3e tome, c’est bien aussi, mais comme Bruno n’était pas disponible, Sedyas les a fait. Mais il a eu des problèmes personnels. Comme il y avait des dates de livraison strictes, on a eu recours à un ami illustrateur espagnol (Pinturero ) qui a accepté de les réaliser.
Mais les couleurs sont assez présentes. J’ai des demandes par rapport à la lumière, la profondeur.
A l’origine, j’aurais voulu que la couleur soit moins forte, comme dans certains « Asterix » (Asterix et les Normands, pour moi, c’est le mieux, avec des couleurs douces, qui mettait en valeur le dessin sans le parasiter). Mais on se perd un peu dans les envies de rendre une image plus élaborée, plus belle…

D’où est venu l’idée des doubles pages en « Multilinéarité » ?
J. J. G. C’est Sergio Garcia qui développe cela dans une thèse. C’est un dessinateur de BD espagnol qui a publié chez Dargaud et Delcourt (« les trois chemins »). Il était à l’origine de cette technique narrative sans case, où les personnages suivent plusieurs chemins qui s’entrecroisent. On voulait faire un truc très ludique et on a choisi cette technique là. Il y avait aussi l’idée d’un jeu de loie sur quatre pages, mais ça me faisait peur…

Les trois tomes se complètent bien et forment un tout. Vous continuez ?
J. J. G. C’est une vraie fin, mais une fin ouverte. En principe on s’arrête là. Dans l’avenir, on peut imaginer continuer. Les 2ème et 3ème tomes n’ont pas trouvé un public large. C’est dommage, mais on ne va pas se lamenter. Les albums existent. Des enfants pourront découvrir la série plus tard.

Quelle est ton actualité ?
J. J. G. Blacksad, le tome 5. J’y travaille en ce moment pour une parution en fin d’année, voire début d’année prochaine.

Un grand merci à Dargaud pour la rencontre et à Guarnido pour sa gentillesse et sa patience


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