PITCHI POÏ est une œuvre de télévision, résultant de la coopération de 15 réalisateurs européens, coordonnés par Jacques Krier, sur un scénario de François Billetdoux, diffusé en France par l’ORTF le 31 octobre 1967 et dans les autres pays européens à la même époque.
Le thème du film, qui était voulu comme la matière d’une interrogation sur l’Europe en construction, se trouvait ironiquement être une évocation de ce qui avait été la destruction du judaïsme européen. A une époque qui connaissait mal ce qui s’est appelé bien plus tard l’Holocauste ou encore plus tard la Shoah.
Ce film est donc une évocation de la perception qu’avaient des cinéastes européens du « fait juif », selon le terme utilisé dans l’émission sur le film. C’est aussi une évocation de la façon dont avait été vue la persécution dans chaque pays.
Ainsi en France, le film débute sur un transport de juifs portant l’étoile jaune en zone Sud dans un camion escorté par l’armée allemande, ce qui constitue une véritable erreur historique. Cette vision « paroissiale » par pays est accentuée par la liberté que le scénariste François Billetdoux avait choisi de laisser à chaque réalisateur.
Georges Rouquier est ici acteur principal et sa présence constante à l’image a été aussi la cause l’intérêt du film; son charisme, sa voix, son visage buriné, son jeu à la fois tendre et bourru. Également la situation peu commune dans laquelle il se trouvait de passer de la réalisation au jeu d’acteur.
Ce film de télévision diffusé en 1967 a été voulu par ses promoteurs et a été vécu par les participants comme un quasi exploit technique de réalisation véritablement européenne d’une œuvre, une expérience fondatrice, sous l’égide de l’Union Européenne de Télévision.
Le film est constitué d’épisodes réalisés dans chaque pays par une équipe autochtone, et rassemblés comme autant de pièce d’un puzzle. Si le scénario de François Billetdoux en était l’élément fédérateur, celui-ci avait laissé une large place aux réalisateurs locaux pour aller au delà d’une simple mise en image du texte.
Le style reportage « Cinq colonnes à la une » accentué par Pierre Desgraupes en présentateur, l’utilisation de voix off, y compris quand l’acteur est à l’image, participent à l’originalité du scénario.
Pitchi Poï ou la parole donnée vient d’être édité en DVD par la société Les Documents Cinématographiques et sera disponible à partir du 20 février.
Pitchipoï est un terme qui est apparu lors de la seconde guerre mondiale dans le camp de Drancy. Il désignait cette destination mystérieuse et redoutée à l’est vers laquelle les juifs de France furent déportés.