Des études sont programmées pour mesurer l'ampleur du mal
Le pont compte 16 piles. Au fil du temps, celles-ci s'enfoncent. Cinq piles ont été consolidées en 1996, il en reste 11 à revoir. Et vite. (photo archives Laurent Theillet )
Dans un an, deux ans au plus tard, le pont de pierre de Bordeaux devra être fermé à la circulation. L'ouvrage est souffrant et doit subir d'importants travaux. Si rien n'est fait, il pourrait s'effondrer.Le mal n'est pas nouveau mais s'aggrave. Construit en 1822, le pont est malmené par les courants et le trafic qu'il supporte. Ses piles se déchaussent et s'enfoncent. 1,5 millimètre par an. Ce n'est pas beaucoup. À force toutefois, cela pourrait déséquilibrer l'ensemble.
Fin 1995, déjà, les clignotants se sont mis au rouge. La pile 7, l'un de pieds centraux, menaçait de s'écrouler. Le pont a été immédiatement fermé (ce qui ne s'était jamais produit) et la pile a été renforcée en catastrophe. Avec des tonnes et des tonnes de rochers et de cailloux.
Cette première alerte a conduit, quelques plus mois tard, à une première tranche de travaux importants. Les cinq premières piles du pont, jugées comme les plus fragiles, ont été revues.
Le mal découle des particularités de la construction. Chaque pile du pont (en pierre et en briques) repose sur 220 pieux de bois, des pins landais enfoncés jusqu'à 10 mètres de profondeur dans le lit du fleuve. Ces pieux résistent à l'eau sans difficulté mais pour qu'ils ne bougent pas, l'enveloppe de rochers qui les entoure doit résister aux courants, et surtout, ne pas se fissurer. Or, les courants sont très forts au pied de l'ouvrage, il y a même des tourbillons dévastateurs. L'eau finit par faire d'énormes cuvettes et grignoter la base des piles.
Depuis l'alerte de 1995, l'ouvrage est donc sous haute surveillance. Des capteurs répartis sur l'ensemble de l'ouvrage analysent et transmettent vingt-quatre heures sur vingt-quatre les mouvements du pont. Avec un seuil à ne pas dépasser.
« Pas question de faire courir un risque aux usagers. À la moindre alerte, on ferme le pont », précise tout net la Communauté urbaine de Bordeaux, responsable de l'ouvrage. La CUB ne compte pas non plus attendre que la situation s'aggrave pour réagir. Elle envisage de réaliser les travaux de consolidation au plus vite, de la pile 6 à la pile 16, soit celles non traitées à ce jour.
Des études vont être engagées pour établir un diagnostic : juger l'état des talus au pied des constructions concernées, évaluer précisément les dégâts et prévoir le chantier en conséquence. Des études particulièrement difficiles à réaliser. Une fois dans l'eau, les plongeurs sont dans le noir complet et doivent travailler au toucher.
Sauf urgence extrême, ce chantier ne sera pas mené avant 2014, voire 2015. Pas seulement pour des raisons financières. Pour des raisons d'organisation aussi. Pour réaliser un tel chantier, le pont devra être fermé à la circulation. Autrement dit, un trafic dévié sur le pont Saint-Jean et le nouveau pont levant.
Et le tram ? Une question rouge sans réponse à ce jour. Des études spécifiques vont devoir être réalisées pour savoir si les rames qui passent très vite sur l'ouvrage pourraient continuer à le faire sans perturber le déroulement du chantier.
Source SUD OUEST