François Hollande appelle à réfléchir à la place de l'euro dans le monde pour éviter des fluctuations irrationnelles sur les marchés. Plutôt qu'une politique de change européenne, c'est une remise en cause du monopole sur la monnaie qui permettrait des fluctuations reflétant l'état réel de l'économie.
Par Baptiste Créteur.
Après les déclarations de Pierre Moscovici sur l'euro fort et peut-être trop fort, c'est au tour de François Hollande d'évoquer la parité de l'euro avec les autres devises : "L'euro ne peut fluctuer selon les humeurs du marché". Il réalise démontre une fois de plus son mépris pour le marché et son goût pour le pouvoir centralisé.
Le président français François Hollande a estimé mardi que l’euro «ne peut fluctuer selon les humeurs du marché» au risque de mettre en danger les efforts de compétitivité des pays de la zone euro, et qu’il fallait «réfléchir à la place de notre monnaie dans le monde». L’Europe «laisse sa monnaie, l’euro, vulnérable à des évolutions irrationnelles dans un sens ou dans un autre», a souligné François Hollande dans un discours devant le Parlement européen. «Nous devons réfléchir à la place de notre monnaie, l’euro, dans le monde», a-t-il ajouté. Pour lui, «elle ne peut fluctuer selon les humeurs des marchés. Une zone monétaire doit avoir une politique de change sinon elle se voit imposer une parité qui ne correspond pas à l'état réel de son économie».
Les fluctuations sur le marché, liées aux choix des parties prenantes de ce marché, seraient irrationnelles - à l'inverse des fluctuations reflétant les choix d'hommes politiques dont tout indique que l’irrationalité est leur première caractéristique. Dire qu'une politique monétaire européenne permettrait à l'euro de mieux refléter l'état réel de l'économie revient à affirmer que les États européens, via la BCE, sont mieux placés pour déterminer la parité que les utilisateurs de la monnaie.
«Il ne s’agit pas d’assigner de l’extérieur un objectif à la BCE qui est indépendante, mais d’engager l’indispensable réforme du système monétaire international, car sinon nous demandons à des pays de faire des efforts de compétitivité qui sont annihilés par la valorisation de l’euro», a souligné le chef de l’État français.
Difficile de démontrer l'indépendance d'une institution à qui l’État confère un monopole. L'indispensable réforme du système monétaire international, ce n'est pas de le confier un peu plus aux hommes politiques en leur donnant toute marge de manœuvre pour décider de l'avenir de la monnaie, mais de supprimer le monopole des banques centrales sur la monnaie - ou plutôt, de supprimer les banques centrales. Toutes les grandes catastrophes monétaires trouvent leur origine dans la collusion entre États et banques centrales ; la monnaie est une affaire bien trop sérieuse pour la confier à des hommes politiques incapables de prendre les mesures qui s'imposent pour des considérations idéologiques ou de popularité, si ce n'est pire.
De la même façon, ce n'est pas aux pays qu'on demande des efforts de compétitivité, mais aux entreprises - efforts de compétitivité qu'elles mènent naturellement mais qui doivent être intensifiés pour faire face aux prélèvements imposés par l’État pour son irresponsable niveau de dépenses. Les entreprises produisent ; l’État, non. Les seules fonctions qu'un État pourrait légitimement se voir confiées sont les fonctions régaliennes, et il semble incapable de les mener à bien ; la question n'est pas de savoir comment l’État doit gérer la monnaie, mais pourquoi il le ferait.
«Nous ne pouvons pas constater simplement l’appréciation de l’euro et nous en désoler ou nous en réjouir», a encore dit François Hollande un peu plus tard en revenant sur le sujet au cours de la séance de questions et réponses avec les députés européens. «Nous devons avoir une politique de change», et «elle est prévue par les traités, elle ne dépend pas seulement de la BCE», a-t-il souligné, concluant que «cette politique de change, nous devrons à un moment nous en saisir».
Nous ne pouvons pas constater simplement que l'économie périclite et nous en désoler ou nous en réjouir. Nous ne devons plus avoir de politique économique autre que de ne pas intervenir, pas plus que nous ne devons avoir d'autre politique de change que de ne pas en avoir et laisser les monnaies privées s'échanger librement sur le marché. La politique de change, les citoyens doivent à un moment s'en saisir, de même qu'ils doivent se saisir de la politique économique, de la politique sociale et de tout ce qui ne concerne qu'eux mais sur quoi l’État cherche continuellement à prendre et conserver le pouvoir.
Son ministre de l’Économie, Pierre Moscovici, avait estimé dimanche que l’euro, qui évolue actuellement au-dessus de 1,35 dollar, était «fort, peut-être trop fort». Pour le gouvernement français, la hausse de l’euro observée depuis deux mois est préoccupante, car une monnaie trop forte pèse sur les exportations.
Ce qui pèse sur les exportations, c'est le manque de compétitivité ; ce qui pèse sur la compétitivité, c'est avant tout le poids de l’État. Si François Hollande et Pierre Moscovici sont réellement préoccupés par les difficultés des entreprises françaises à exporter, ils seraient bien avisés de poser la question aux chefs d'entreprise eux-mêmes ; la parité de l'euro avec les autres devises sera sans doute loin d'être leur première préoccupation.
Les autres pays européens se lanceront-ils également dans la conquête d'un pouvoir étendu, ou préféreront-ils protéger autant que possible leurs économies des irresponsables décisions dont ils se savent tous capables ?