On n’attendra plus vainement Godot : il est sur le point d’arriver. Aprčs avoir patienté pendant une bonne trentaine d’années, vécu moult rebondissements, subi de nombreuses déceptions et souffert quelques faux départs, Blagnac va enfin avoir son musée de l’aéronautique, baptisé Aéroscopia, qui sera inauguré début 2014. Blagnac, Toulouse, la Haute-Garonne, le sud-ouest tout entier, et bien plus. Ce sera l’élégant complément du musée de l’air et de l’espace du Bourget, actuellement en pleine rénovation.
Le bâtiment sort de terre, ŕ quelques encablures d’AeroConstellation. Cardete Huet Architectes, qui avait déjŕ signé, notamment, les halls d’assemblage des A330/A340, A380 et A350, confirme ainsi son grand talent : l’élégance est au rendez-vous, en męme temps que l’originalité. La parcelle couvre 66.000 mčtres carrés, la surface au sol du musée 9.200 mčtres carrés, hors surfaces d’accueil, 8.000 mčtres carrés seront consacrés aux avions, sans compter plus de 5.000 mčtres carrés ŕ l’extérieur et un plan d’eau propre ŕ recevoir des hydravions. C’est ŕ la fois beaucoup et peu, tant les matériels ŕ présenter son nombreux, une vaste extension étant prévue, ŕ terme. Mais il fallait impérativement respecter des limites budgétaires précises, pas plus de 15 millions d’euros pour réaliser cet espace nouveau.
Par ordre décroissant de leur apport, le financement d’Aéroscopia est assuré par la Ville de Blagnac, Toulouse Métropole, Airbus, la Région, le Département et l’Aérothčque. Les architectes en parlent bien, en termes soigneusement choisis. Ils expliquent que, Ťface ŕ l’usine Jean-Luc Lagardčre, Aéroscopia tisse un dialogue subtil, tout en courbes, souple. Il répond ŕ la longue rectitude de l’usine comme son mutisme de zinc noir, il fait contrepied au miroitement incessant de la parure d’inox des longues portes de l’usineť. Cardete et Huet sont donc aussi počtes, ce qui n’interdit pas d’exprimer une grande impatience de découvrir le produit fini, seule une ossature trčs …aérienne étant visible actuellement (notre illustration).
La satisfaction de tous les artisans de ce projet de longue haleine fait plaisir ŕ voir, les innombrables hésitations, les difficultés de financement, ayant failli ŕ plusieurs reprises avoir raison de l’idée due, ŕ l’origine, ŕ Jean Pinet. Aujourd’hui, c’est Bernard Keller, maire de Blagnac, qui en parle le mieux. Il dit avec une emphase de bon aloi qu’Aéroscopia va fixer l’identité aéronautique de sa ville, de la région, permettre de conserver dignement, de mettre en scčne des machines historiques, de valoriser l’industrie aéronautique et ses nombreux métiers. Terre d’envol, les Ailes anciennes (87 avions, hélicoptčres et planeurs), l’Académie de l’air et de l’espace, l’Aérothčque, Airbus Héritage, Manatour (le délégataire) et d’autres partenaires ont des projets plein la tęte et se préparent ŕ recevoir 110.000 visiteurs par an, 145.000 ŕ plus long terme.
Au-delŕ du bâtiment lui-męme, d’autres aménagements sont prévus, ŕ commencer par celui de la ferme Pinot, que l’aéronautique a promue ŕ un niveau insoupçonné de notoriété. Construite au XVIIIe sičcle, bien longtemps avant la naissance de Clément Ader et des frčres Wright, soigneusement préservée au milieu d’un océan de modernité, elle sera réhabilitée pour accueillir un centre de documentation, des salles pédagogiques. Le męme site a été choisi pour ériger un centre de rénovation d’avions anciens.
Un conseil scientifique sera le garant de la bonne tenue du musée. Et, côté image, on en retiendra trčs vite une architecture que Cardete et Huet qualifient eux-męmes de singuličre, la Ťgéométrie du tubeť. Ouverture des portes et verdict du public dans un peu plus d’un an.
Pierre Sparaco - AeroMorning