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L'état sans état
L'état qui ne passe pas
Est l'état fixe qui a pour nom Sans-nom
En lequel se dissout, après en être venu,
L'état de manifestation de la dualité.
Joueur, il est l'unique véhicule (ekāyana)
Unique véhicule impérissable
S'infusant en toute chose,
Il fait toute chose partout, toujours, de toutes les manières,
Sans faillir.
Il retourne au non manifesté
Notre vraie nature est absence de manifestation,
Dépourvue de tout voile,
En perpétuelle dilatation.
Elle transcende tout.
La manifestation scintillante
- explosion de lumière des pensées sans fin -
Se dissout en elle.
Ces trois aphorismes et leur paraphrase sont extraits des Instructions secrètes (chummā) reçues par le maître Śivaïte Śivānanda de la yoginī Maṅgalādevī. Ils comprennent aussi les Trente secrets. Ces quelques extraits, édités et publiés par A. Sanderson[1], font penser à quelques équivalents bouddhistes ou même bönpos, comme ce verset extrait d'un groupe de trente instructions reçues de la bouche de différentes yoginīs et recueillies par Drenpa Namkha :
La nature de l'esprit, claire et vide, est naturellement limpide. Quand l'esprit regarde l'esprit, toutes les apparences arrivent à leur terme. Repose en cet état où il n'y a rien à voir - ni sujet ni objet. Tel est l'abîme de la nature de l'esprit en lequel l'objet à méditer est libéré (dissoud ?) en pure présence (vidyā).[2]
Kālīkrama et Dzogchen sont deux systèmes non-dualistes nés dans le contexte de la culture des "parfaits" (siddha) et des "fées" (yoginīs). Fascinant. Cela étant, le Dzogchen est moins hermétique, plus directe que les textes indiens ou traduits du sanskrit ou du prakrit.
[1] Mélanges tantriques, pp. 334-337.
[2] Heart Essence of the Khandro, p. 107.