Pourquoi le Louvre à Abu-Dhabi et à Lens ?

Publié le 26 octobre 2012 par Sammy Fisher Jr

Je ne passe pas souvent du côté de chez Thé au Jasmin, et c'est une erreur, car c'est toujours un régal pour les yeux. Aujourd'hui, j'ai découvert dans cet article de sublimes petites choses en ivoire,. Elles sont gothiques, précieuses, moyenâgeuses.(1)  
Il s'agit d'une descente de croix du XIIIème siècle dont le musée du Louvre se propose d'acquérir les deux statuettes manquantes pour compléter l'ensemble. Bravo. Les deux exquises babioles sont estimées à 2,6 millions d'euros(2). Tant mieux. Cet argent sera mieux employé là que dans des casques de CRS ou des voyages de ministre. Comme il manque encore 800 000 euros pour compléter la cagnotte, le musée lance un appel aux dons.
Seulement, la madame Michu qui sommeille en moi s'est offusquée, se demandant par la grâce de quel paradoxe il était possible d'ouvrir des "Louvre bis" à Abu-Dhabi et à Lens, et dans le même temps faire appel à la générosité publique pour enrichir les collections du musée. J'ai donc fait quelques recherches rapide sur l'oracle, et j'en ai retiré a à peu près ceci : concernant le Louvre-Lens, l'investissement est en grande partie pris en charge par l'Union Européenne, la région et le département. Pas par le musée lui-même. On peut être pour ou contre le projet (je n'ai toujours pas réussi à me décider entre l'idée géniale et le gaspillage), ce n'est pas lui qui obère la (faible) capacité d'acquisition du musée.
Pour ce qui est du pharaonique "Louvre des sables", la situation est un peu plus compliquée. S'y mêlent des problématiques d'influence dans une région stratégique, de diplomatie, et aussi de gros sous. Surtout de gros sous. Pour le Louvre et les musées associés à l'opération, Abu-Dhabi c'est avant tout une grosse tirelire de 400 millions d'euros tout de suite et un milliard sur 30 ans.
Il y a de quoi laisser aux vestiaires les interrogations sur le respect des droits de l'homme, la situation de la femme dans les émirats, la censure sur certaines oeuvres...
Madame Michu en est toute retournée. 
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(1) Saint Jean (détail). ©Musée du Louvre - Photo Martine Beck-Coppola 
Du copyright sur la photographie d'un objet qui n'appartient pas encore au Louvre et qui vise à intégrer le domaine public... Comment dire... waouh !
(2) Soit 0,05 Kerviel. Je rappelle que le Kerviel est la nouvelle unité de mesure des flux financiers mondiaux, et que 1 Kerviel = 4 900 000 000 euros, ce qui représente quand même pas mal d'argent.