Histoire de gabare.

Publié le 24 octobre 2012 par Alexcessif

Introduction (senza dolore): La Gabare existe ! Le reste est une fiction !  Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existés serait pure coïncidence. Toute vraisemblance avec des vies, vaincues ou victorieuses, serait possible. La gabare « Les deux frères » engage son vieux gréement sous les arbres de  l’estey. Sans la relation involontaire qu’impose parfois la vie ou la génétique, Paolo et Sergio, qui ne sont pas biologiquement frères, vivent les mêmes rêves. Ils ont « chacun leur mère », mais ils se sont liés délibérément par leur implication dans l’association « Chacun sa mer » qui permit la construction de la gabarre. 
Fière allure, blanche et bleue, hisse et haut, 1 mètre 45 de tirant d’eau, longue de 13 mètres et large de quatre la gabarre ne transporte plus des barriques et des moutons  comme l’exemplaire original de 1892. Aujourd’hui, son gréement aurique déplace 16,50 mètres de  tirant d’air, le pont garni et chargé  de touristes tout le long de l’estuaire. La gabare revendue au conseil général, les routes  de Paolo et Sergio se sont séparées. Pour les « deux frères » chacun sa mer devient lentement l’itinéraire figé du« chacun sa merde » et le souvenir lointain des navigations au près s’éloigne  comme un homme à la mer voit la poupe du vaisseau fantôme s’évaporer irrémédiablement dans la brume des jours mauvais. 
L’un cabote vers le pertuis d’Antioche, Chassiron ou La Courbe le temps de trop rares convoyages. 
L’autre, artiste un jour artiste toujours, cessera le cabotinage d’ex-intermittent du spectacle parfois sans cachet mais pas sans talent. Paolo connu sa première voie d’eau lorsque Marie le quitta. L’océan pardonne peu et une femme encore moins. Les séjours aux urgences que les excès physiques de cet être à fleur de peau aigri par les échecs lui imposent ont érodé ses sentiments. Les rêves de voyages, d’îles et de  grand large que Paolo avait semés dans les siens resteront des jachères. Ils sont immobiles à la porte des projets dont ils ne franchiront jamais le seuil. Paolo cessât assez vite d’écoper et depuis la cale de sa vie prend l’eau. Il a trouvé l’autre usage de l’écope : désormais elle remplit son verre de la dose d’anesthésiant toujours plus forte pour supporter la douleur des jours sans fins et le désespoir des nuits sans fonds. Lorsqu' on le visite le matin, un cubi de rouge est au chevet de ses insomnies à coté du canapé où il a «dormi» dans ses vêtements. Le cendrier sur la table de salon est plein de vestiges de tabacs entres autres déchets. Ignorant la télé qui débite des images en boucle  calée sur une chaîne info, il s’empare d’un petit sachet blanc de quelques grammes de "farine" d’où il extrait et aligne la poudre en deux traits parallèles avec une carte de fidélité Leader Price en plastique. « Je me fais un TGV et j’arrive! »dit-il en se remplissant les narines à l’aide d’une paille de coca en guise d’ascenseur nasal. TGV ou TER c’est le nom des rails de coke selon la vitesse d’aspiration, la longueur des stries et la fortune du moment. Il sort de cet assommoir rarement avant midi comme un ours sort de son antre après l’hibernation. Sergio a connu lui aussi quelques voies d’eaux et les vides béants laissés par les passantes qu’il n’a su retenir. Mais il aime trop les femmes pour n’en choisir qu’une. L’égo sans trique n’est pas son mode de vie et son appétit sensuel l’a éloigné des déserts de solitude trop arides. Les rencontres par Meetic. fr ce go-between électronique,  rafraîchissent sa vie avec la sagesse d’un oued, parfois fougueux, débordant ou paisible selon les crues. Héliocentrique il a reconstruit selon la loi universelle un monde affectif autour de lui. Solaire, il aime la lumière autant qu’il réfléchi  et sa gravité lui attira le bénéfice de Mars et la joie de Vénus. Mars planète du nerf de la guerre avec l’argent du mérite, du travail et in fine du pouvoir. Et la  féconde Vénus a canalisé sa créativité lui laissant généreusement les pieds bien arrimé dans le terroir du réel. Sergio, c’est la rigueur sans la stérilité. On le voit attablé à l’occasion d’un anniversaire, d’un déménagement ou d’une fête votive ceint de commensaux accaparants sur lui la poursuite  

une  poursuite c'est ça   !

au centre de la scène frappant les trois coups d’un repas qui sera un spectacle. La lumière du succès dans les yeux et les lèvres minces étirées d’un sourire avec à la commissure l’ironie de son intelligence. La table de la cène cache le témoin de ses agapes, d’anciens abdos corrompus par Bacchus, où le haut de son buste trône, pectoraux saillants. La tête, portée par des trapèzes qui se souviennent d’avoir bougé de la fonte, dodeline au rythme de ses saillies. Le geste d’un verre levé surfant la vague des rires des convives avantage l’harmonieux galbe de ses biceps et de ses deltoïdes. La vie passe paisible et pique un peu parfois d’une pointe de nostalgie. Il y a ce successeur, ado déjà, adoré toujours, marqueur du temps qui passe et nous remplace, avec ses fringues qui fermentent en boule réparties sur le sol de sa chambre. L’éphèbe énervant,  par son désordre et ses abdos dessiné par Michel-Ange possède lui, la créativité désordonnée du chaos. Sergio a tempéré sa colère d’un peu d’amour paternel et c’est pour cela que sont devant la maison sur le pré chamarré par l’harmonie aléatoire d’un patchwork, les frusques  de l’ado étalées sous le soleil de Juillet. « Deux Frères » caboteur, cabotin. Deux alchimistes: Paolo transforme l’argent en liquide qu’il boit sans modération. Sergio, l’argent de la revente en or des bâtisseurs dont il posa la première pierre en bords de Garonne. La gabare revendue engage son vieux gréement sous les arbres de  l’estey vers la forme de radoub du chantier qui l’a vu naître.