J-2 avant la sortie du tout nouvel et sixième album de Benjamin Biolay, qui continue de défrayer les chroniques culturelles. Descendu à ses débuts, il fait aujourd’hui rougir ses détracteurs et voit son talent de « nouveau Gainsbourg » cité par-ci par-là avec « Vengeance ». A travers cet album bien écrit, bien dosé, apaisant, c’est un Biolay moins impertinent, mais toujours aussi enivrant qui prend sa revanche.
Il semble que maintenant qu’on s’intéresse plus à sa musique qu’à sa grande gueule d’amour, BB a la côte. Perso, moi ça fait déjà depuis « Des roses et des promesses » il y a une décennie que je trouvais que son style négligemment raffiné, romantique agressif et camé en quête de sagesse donnait à ses textes et ses compositions toute leur puissance. Mais je ne vais pas me la jouer « je vous l’avais bien dit ! ». Surtout que jusqu’ici je l’ai jamais chroniqué, en fait.
Oublions les futiles excès du passé : aujourd’hui, Benjamin se fait plaisir, et nous aussi par la même occasion. Plaisir déjà dans l’épanouissement total de sa voix si enveloppante : au fil des albums, la sensualité a rencontré la résonance et la puissance. BB ne s’excuse plus d’avoir en lui un « Crooner », qui de toute façon ne sommeille plus.
Plaisir aussi dans la diversité des styles abordés : balades, rap, mix d’élans rock et d’accents techno, essais jazzy… La préférence pour l’hybride se pressentait déjà dans le choix des guests : Vanessa Paradis, Osmo Puccino, Orelsan, Julia Stone, etc. Vengeance est composite, assumant comme seule signature reconnaissable ses thèmes. L’amour perdu qui rend paumé, les écarts, les échecs, les souvenirs lumineux… Les blessures intimes priment encore, surtout dans des déclarations d’amour crève-cœur. Mais surprise ici aussi, même si le mouvement s’était amorcé avec « La superbe », le cru cède ici parfois entièrement la place à quelque chose de plus nu, plus avoué (Profite, Marlène déconne…) C’est vulnérable et désespérément tendre. Message personnel : si BB n’a plus peur d’aimer, je connais plein d’intéressées.
Vengeance est donc un album un peu « boule à facettes ». Un vrai voyage entre les rythmes, les atmosphères et les humeurs. Comme si la revanche de Biolay, c’est finalement de dire qu’il peut tout faire, mais toujours avec la même grâce. Celle d’un vilain petit canard devenu cygne.