Drame - 1h15
Sortie salles France - 14 novembre 2012
avec Stéphane Soo Mongo, Slimane Dazi, Sabrina Hamida...
Sabrina et Stéphane veulent se marier, ils y pensent sérieusement, sans toutefois en avoir encore parlé à leurs familles respectives. Et les choses s'annoncent très mal. Lorsque Slimane, le grand frère de Sabrina, a vent de la nouvelle, il est furieux, car la chose est inconcevable : jamais sa soeur ne se mariera avec un Noir, non-musulman de surcroît. Il entreprend alors d'alerter ses 39 frères pour les mettre au parfum et tout faire pour éviter un tel sacrilège familial.Autant le savoir, ce film a été fait sans financement, a été élaboré dans la longueur, dans la douleur sûrement. L'image n'est pas de grande qualité, une petite caméra semi-professionnelle légère a été utilisée, ça tangue beaucoup et Rachid Djaïdani a privilégié les plans très rapprochés. Le son n'est pas non plus bien équilibré, certaines voix proches dominent trop celles des autres protagonistes. Bref, la forme de ce film nous invite à l'indulgence.
Mais à l'inverse, la spontanéité des dialogues qui semblent improvisés parfois, totalement naturels, réalistes, pleins de vie, d'humour et parfois de belle gravité, compensent largement. Et certaines scènes sont d'une grande beauté, je pense à ces errances de Slimane le grand frère, de cette balade orientale chantée au bord des quais de Jaurès. Il y a de jolies trouvailles, des détails originaux, des paris osés. Et notre Nord Est de Paris qu'on aime voir ainsi filmé.Sabrina c'est l'espoir effronté, c'est le mariage qui s'organisera malgré tout, c'est la liberté d'affronter verbalement ses frères, sans intimidation. Stéphane, c'est l'amoureux qui va être quelque peu contrarié par l'agitation que ce projet matrimonial suscite, et se voir renvoyer en pleine figure sa différence non métissable. C'est aussi un artiste acteur en galère, qui s'accroche à la promesse d'un rôle, qui court de casting en casting, improbables ou pitoyables. Ce cheminement là sera à l'origine d'une scène très décalée et très violente, que je ne suis pas sûre cependant d'avoir trouvée utile.
Et le personnage principal, ce serait alors ce Slimane, ce grand méchant frérot qui erre avec son regard tranchant, qui chemine de frère en frère, distillant sa rengaine raciste auprès de chacun de ses proches, chacun symbole d'une génération bien ou mal intégrée, bien ou mal influencée, bien ou mal éclairée. Une rengaine qui fera place à un nouvel ordre. Rengaine ton flingue après avoir dégainé. Et non bien sûr, Arabes et Noirs n'enfantent pas des dragons, et même parfois des artistes de talent. Un film à l'originalité intelligente et rare, poétique et militante. Peut-être trop encensé, mais simplement intéressant et humain. Avec comme sujet le racisme inter communautaire et le mal être que cet enfermement clanique provoque chez ses porte-drapeaux.
L'article de Cluny - Critiques clunysiennesL'avis de Grégory Audermatte - Laterna Magica