En mauvais élève qui n’aurait pas bien lu sa bible Pitchfork, je commence fort : rater la soirée d’ouverture et la première journée d’un festival qui cherche à s’imposer en rendez-vous européen incontournable, au même titre, mais dans une moindre échelle, que Primavera à Barcelone. Mais rassurez-vous, DODB était présent pour les deux journées les plus alléchantes de l’événement, les vendredi 1er et samedi 2 novembre derniers.
Alors, Pitchfork en version festival, ça donne quoi ? Une Grande Halle de la Villette élégamment aménagée, une bulle où l’euro n’a plus court, monnaie obsolète remplacée par un système de jetons gris fractionnables valant le double de leur valeur unitaire apparente (non, la bière ne coûte pas deux euros…). Ce sont deux scènes qui se font face, mais où jamais les concerts ne se chevauchent, provoquant des phénomènes de marées régulières, à contre-courant desquelles il est difficile de nager (non, la part de tarte aux légumes, ce sera pour plus tard). Ce sont également des tote bags Rough Trade à ne plus pouvoir les compter, vendus en masse au stand de la boutique du même nom, juste à côté de celui des Balades Sonores, et en face des vendeurs de bijoux, entre lesquels on entend aussi bien parler anglais que suédois…
Un instant… nous devions parler musique, n’est-ce pas ? C’est que l’on n’a pas vraiment eu le temps de parler d’autre chose pendant ces deux jours, tant les concerts se sont enchaînés à un rythme effréné. Mais ce planning pied au plancher a ses revers, et l’on se retrouve souvent à devoir tristement grignoter les quelques miettes, comprendre quarante minutes, du concert d’un-e artiste ou groupe que l’on aurait bien vu jouer une heure et demie (bon sang, Chromatics).
Samedi 3 novembre. La ponctualité me fait à nouveau défaut et j’arrive pile pour le début du concert de Cloud Nothings. Cheveux longs et chemises à carreaux : même pas besoin de fermer les yeux pour se croire en 1993. Le groupe décline les huit morceaux de son très bon album sorti l’hiver dernier, en prenant le temps d’étirer les passages instrumentaux dissonants dans lesquels il développe davantage sa personnalité. À propos de personnalité… voici venir Twin Shadow, dont les ambitions musicales semblent n’avoir plus de limite. À l’image de son second album, le concert de l’homme et de son groupe est kitsch et ampoulé. On atteint même le sommet du ridicule lorsque, à l’occasion d’"At my heels", morceau pourtant très élégant sur disque, mais affublé ici d’une risible rythmique disco, il demandera aux spectateurs de faire tourner leur chemise dans les airs, comme d’autres les serviettes…
Crédit photos : Vincent Arbelet