Comment réussir sa candidature (à la lumière d'un fiasco)

Publié le 17 novembre 2012 par Livmarlene


Parfois, on rentre chez soi après une journée pas comme les autres, une journée à laquelle on a pris soin de se préparer, mais pas trop, pour limiter la pression. On pose son manteau. L'écharpe encore autour du cou, on a envie de s'étrangler avec, tellement on se déteste d'avoir été nul à ce point, insignifiant, fade, ahuri. Vidé, on se contente de le jeter sur le manteau, ce maudit boudin de laine qui pique. "De toute façon, se dit-on, qu'est-ce que j'espérais ? Ce poisson-là est beaucoup trop gros pour moi, ce virtuose, trop loin de ma médiocrité pour que ma candidature ait la moindre chance d'être retenue." Puis on décide de faire comme si de rien n'était, de reprendre tant bien que mal le cours d'une vie qu'on espérait voir changer. C'est à peu près l'état dans lequel je me trouvais hier, après ce qu'on peut appeler une contre-performance magistrale en matière de candidature spontanée. J'ai eu l'opportunité RARE d'approcher LA personne que j'aurais voulu être si une bonne fée m'avait demandé mon avis en se penchant sur mon berceau. Je lui ai parlé (pas à la fée. Celle-là, elle n'a jamais osé se montrer et honnêtement, si lui prenait l'envie de le faire aujourd'hui, je crois qu'elle serait pas sourde !). J'ai eu, disais-je, l'occasion de demander à ce maître la faveur d'apprendre de lui... Et qu'est-ce que j'ai fait de ce cadeau du destin ? Je l'ai bousillé. J'ai hésité entre un ahurissement ridicule et une béatitude niaise, donnant de moi l'image d'une dinde qui bégaie. Sans compter ma lettre et sa présentation désastreuse. Dans un tel état d'abattement, j'en connais plus d'un qui diraient : "OK, je me suis planté aussi profond qu'une aiguille de seringue dans le cul d'un malade. Je veux qu'une chose, c'est que tous les autres vivent la même chose, qu'ils s'humilient et qu'ils passent à côté de la chance de leur vie !!!!!" Moi, je ne peux pas penser comme ça. L'échec des autres me persuade que les mayas ont raison, que la fin des haricots est proche, tandis que chaque réussite me redonne espoir. Quand j'entends dire qu'un Français qui souhaite garder l'anonymat "par respect pour les malchanceux" a empoché la plus grosse cagnotte de l'histoire de l'Euromillions, je me dis que peut-être un jour, moi aussi, j'aurai une chance insolente. Je vais donc dans les lignes qui suivent, vous livrer quelques ficelles pour ne pas comme moi, balancer dans les chiottes vos chances de réussite par une accumulation de fausses bonnes idées.

Le CV : Le format mini est à la mode. Il est sensé ne pas encombrer celui à qui on le remet et résumer efficacement la personnalité du candidat. Ceci reste vrai tant que l'on essaie pas de faire rentrer un autobus dans une place de vélo. Oubliez les polices en dessous de 11, s'il doit se péter les yeux dessus, votre mentor potentiel qui est certainement une personne très occupée, n'ira pas au delà de votre nom, qu'il aura vite fait d'oublier au milieu du demi-million de candidatures qui a déjà reçues. Pour ce genre de support, il faut aller à l'essentiel, c'est-à-dire squizer tout ce qui n'est pas important (votre premier job en tant que promeneuse du chien de votre voisine quand vous aviez 15 ans, c'est mignon mais on s'en fout), mais aussi ne pas oublier les expériences significatives dans le domaine qui vous visez (un stage de deux mois chez un pâtissier MOF). Ça vous semble évident ? Et bien je vous assure que lorsque l'enjeu est important, notre jugement n'est plus aussi fiable que quand nos copines nous demandent si une jupe les boudine. La lettre de candidature : Si vous restez sur du format mini, encore une fois, c'est que vous avez opté pour la CONCISION. Pas question donc de quicher votre bio en trois tomes sur une feuille A5. D'ailleurs, votre bio devrait se deviner sur votre CV. La lettre, elle doit s'adresser à votre destinataire suivant le plan bien connu Vous, Moi, Moi pour vous Vous : il s'agit de dire au lecteur pourquoi c'est lui et pas un autre que vous démarchez. Attention, on ne le dira jamais assez, la pommade, ça glisse. Restez au maximum dans le factuel (ce que fait la personne, comment elle le fait, puisqu'au fond, c'est ce qui vous touche) et évitez de trop vous répandre en jugements de valeurs du genre : "Vous êtes génial, ouahhhh, quel talent, je suis bluffé". Ça, c'est un discours de fan, pas la présentation d'un pro en herbe à pro de génie. Moi : ce paragraphe doit reprendre les expériences et compétences majeures pouvant vous valoriser aux yeux de votre lecteur. Quelque soit notre parcours, on est souvent embarrassé par la comparaison avec celui à qui l'on écrit, que l'on place teeeeellement au dessus de nous. Dans ces conditions, il est facile de tomber dans un énorme panneau : tenter de se justifier de tout ce qu'on n'est pas. "J'ai eu des parents très sévères qui ne m'ont pas laissé vivre ma passion des claquettes pendant mon enfance." Cela s'appelle de l'auto-sabotage. Si si, je vous assure. Ce qui peut donner à quelqu'un d'établi dans un art l'envie de laisser sa chance à un "petit jeune", c'est le discours dynamique d'une personne bien dans ses pompes, pas celui d'un jouet cassé par la vie qui cherche désespérément un sauveur. Vous riez ? Ce que je dis vous paraît si idiot que ça ? Pourtant, quand on est en recherche d'emploi dans un pays où le taux de chômage ne cesse d'augmenter et qu'on est un minimum conscient de ce qui nous entoure, on ne peut pas ne pas connaître de moments de découragement. Et quand on écrit à une personne que l'on a la sensation de bien connaître à force de l'admirer, on peut en oublier que lui, en revanche, ne nous connait pas et trouvera nos confidences simplement hors de propos. Vigilance, donc. Moi pour vous : c'est la fin de la lettre, il faut enfoncer le clou de la première impression en restant plus que jamais positif, déterminé et sensé. Dit comme ça, ça ne paie pas de mine, mais il y a tant d'allumés dans les rues que le bon sens peut vraiment faire la différence. On met en avant ses expériences, ses savoir-faire mais aussi ses savoir-être. Une personnalité volontaire et un parcours assumé, voilà ce qu'il faut montrer en peu de mots. On se montre ensuite disponible pour un rendez-vous, on finit par une formule de politesse personnalisée, pour éviter de gâcher un bon repas avec un digestif industriel de mauvaise qualité, puis on signe... A la main, s'il vous plait. Ce n'est qu'un petit grigri, mais cela en dit long sur vous, brouillon ou appliqué, affirmé ou timoré, expansif ou réservé. Le contenant : Par quel moyen allez-vous faire passer votre précieuse missive de vos mains tremblantes à celles de son vénéré destinataire ? Oserai-je suggérer une pochette assortie à la couleur qui domine la mise en page de votre CV ? En revanche, oubliez les cadeaux, cela vous replace une nouvelle fois dans la position du fan ou pire, dans celle d'une personne qui croit qu'on peut acheter tout le monde avec quatre chocolats. Si vous faites tout ça pas trop mal, il ne restera plus qu'à vous comporter avec assurance mais sans prétention, ni trop tendu ni complètement désinvolte. Rappelez-vous que la communication nonverbale compte plus que les mots (ceux que vous direz et ceux que vous avez écrit) dans l'impression que votre interlocuteur gardera de vous. Donc on pense à respirer, on ne bouffe pas la fin des mots et on ose regarder les gens en face ! Après avoir écrit toutes ces recommandations, je m'aperçois que je n'ai pas tout mal fait. Bon, moi qui étais en face de qui je sais hier, je peux vous dire que je n'ai pas tout bien fait non plus. Par chance, je crois la personne que j'ai rencontrée soucieuse du détail et perspicace quant au comportement humain. Aussi vais-je finalement croiser doigts, bras, jambes et orteils en espérant que mes maladresses lui auront rappelé celles qu'il a peut-être commises avant de devenir l'expert qu'il est aujourd'hui. On les aura !


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