Mondrian - Isn't it fun
Mondrian, parlons peu parlons bien. Je ne suis pas corruptible. Chaque jour, je reçois deux cent ou trois cent propositions musicales me suppliant de m’intéresser à leurs cas. Les inrocks, Magic ou Tsugi attendent mon feu vert avant de valider la moindre mélodie. Je fais et défais l’avenir de la musique hexagonale, que dis-je, internationale. Je suis consultant sur le dernier Bowie parce que David a insisté, Daft Punk me doit tout, Phoenix ne serait rien sans moi, j’ai découvert Mgmt en 1983, Grizzly Bear deux ans après et oserais-je avouer ici que Bashung m’a supplié de lui écrire La nuit je mens ?
C’est donc avec la plus grande mansuétude que je daigne m’intéresser à vous. Inutile d’espérer le moindre traitement de faveur : estimez-vous déjà heureux que mes oreilles rencontrent les 14 morceaux de votre album, Isn’t it fun Pour le reste, je me veux impartial, intraitable, raide comme la justice. Et j’ose espérer que vous ne me ferez pas perdre mon temps.
Hum. J’ai écouté votre album. Une fois, plusieurs fois. Et je l’écoute encore alors que je vous écris. Bon les gars fallait prévenir que ce n’était pas un premier essai vague. Que votre album tenait plus que largement la route. Qu’il était aussi riche et inspiré. Permettez moi les comparaisons, le grand public adore ça : il y a chez vous du Herman Dune, du Sufjan Stevens, du Beatles, du Paul Simon, du Cocoon. Et puis des échos électros, des effets en effet. De la pure et belle Pop pour la faire courte. Vous me direz c’est déjà pas dégueulasse. Mais s’il n’y avait que ça, je vous aurais rangé entre Belle & Sebastian, Wilco et Weezer et on n’en parlerait plus. Pourquoi cependant ai-je envie de relancer l’album à la fin de Best kept secret ? Peut-être parce que vous avez un truc en plus : la métrique adaptée, le sens cinématographique de nos vies. Si j’écoute bien votre album, j’imagine des scénarios. Mieux, si je vis des moments forts, des moments sans, il se pourrait bien que je convoque Things that money can’t buy, ou They don’t dance much in Idaho pour synchroniser un peu ma vie à votre musique.
Après pour la bio, l’analyse des textes, le service après vente, je laisse ça à d’autres. Je suis bien trop occupé à écouter Rise and fall of a golden boy ou A kiss a day. Il serait donc dommage il me semble de faire l’impasse sur votre album. Sur cette voix nonchalante, ces rythmiques caressantes, chaloupées, ces mélodies immédiates. Parce que c’est tout sauf une énième proposition pop : il y a dans Isn’t it fun de quoi remplir son hiver, son année, et bien des moments importants de sa vie. Aussi vrai que Mondrian est perpendiculaire. Aussi vrai que nos vies sont symétriques. Je m’incline.
L'album est en écoute intégrale sur Bandcamp. Et on peut aussi l'acheter en vinyle ou en digital pour une somme modique qui ferait hurler un capitaliste. Profitez-en. Ce n'est pas tous les jours qu'on vous offre l'occasion de payer moins pour écouter plus. Et mieux.
Enfin, Mondrian est une révélation made in I left without my hat. Blog d'un lyonnais qui s'évertue
depuis des années à mettre en avant le meilleur de la musique pop/rock/folk et j'en passe... Rien que pour ça, l'album de Mondrian s'achète les oreilles ouvertes, les yeux fermés.