Raice est jeune. Raice est beau. Raice est ambitieux. Il considère la vie comme une gigantesque compétition où, assurément, il sera le meilleur. Travaillant – et excellant – dans les finances, Raice aime l’argent, les filles, les voitures. Raice est un cliché à lui tout seul – cela le rend content de lui. Être un cliché ou un mythe.
Devant l’institut Sunny Body, Raice hésite, se mord la bouche qu’il a charnue, fait un tour dans sa conscience, réécoute les conseils du docteur et regarde ses mains. Impossible. Trop pâles. Le médecin est bien gentil, la maladie bien effrayante mais cette peau est trop pâle. Trop pâle. Raice refuse d’être pâle. Pâle c’est faible, c’est malade, c’est con. Raice se veut un homme solaire, qui rayonne sur le monde – sur les filles. Raice emmerde le docteur. Puissance et bronzage sont les deux mamelles de sa vanité. Raice est blond et, d’après lui, un blond blanc est moche. L’or de ses cheveux ne peut être exalté que par une peau caramel. Raice est un dieu – sa dernière conquête le lui a encore chuchoté ce matin au saut du lit, subjuguée par son charisme.
La jeune fille souriante – dents littéralement lumineuses, semblables à des néons légèrement bleutés – lui propose une séance immédiate. Il veut la plus longue, la plus forte. La jeune fille – dents blanche, peau orange/caramel/pain d’épices, comme on veut du moment que c’est mangeable – est seule aujourd’hui, sans patron, sans clients, entièrement dévouée. Elle l’invite à faire comme chez lui.
Dans la cabine Raice se dévêt, enfile les ridicules lunettes qui le font ressembler à un dieu têtard, se glisse voluptueusement dans le caisson et se vautre sous les artificielles ardeurs qui le rendront plus beau. Il se rêve maître du monde et s’endort.
« Drame au Sunny Body » : La jeune employée du fameux institut, victime d’un malaise, a oublié dans le caisson à UV un jeune homme qui s’y était endormi. L’établissement a pris feu. Le monde de la finance pleure l’un de ses plus jeunes prodiges.