L’envie de capturer la voix et le son sur un objet n’est pas récente. Déjà dans l’Antiquité, cette idée germait, car garder la trace de la voix de quelqu’un de disparu permettait en quelque sorte de l’immortaliser.
C’est en 1877 que Léon Scott de Martinville, imprimeur de profession, met au point sa machine, qu’il appelle « phonautographe ». Il enregistre sur une feuille de papier avec du noir de fumée. L’appareil enregistre mais il ne peut pas restituer le son. Léon Scott de Martinville dépose tout de même son brevet. La société dite d’encouragements, qui le finance, conserve alors à sa suite toutes ses feuilles. Celles-ci ont été récupérées en 2008 par des américains, qui les ont scannées. En passant cela dans la machine, on entend une femme chanter « Au clair de la lune », mais le pas de vis n’est pas bien calibré et en les passant sur une machine adaptée au musée de Hollande, on distingue bien un homme chanter, qui pourrait peut être même être Léon Scott de Martinville lui-même.
A sa suite, Charles Cros, poète amateur de sciences, prend connaissance de ses travaux. Il constate l’impasse dans laquelle son prédécesseur s’est trouvé, qui est certainement due au fait que l’impression dans la feuille est trop légère, et qu’il faut aller davantage en profondeur pour lire la surface. Il privilégie la voix et sa restitution. Selon lui, l’écrit ne suffit pas à rendre compte d’une idée, c’est avec la voix qui enveloppe et guide, que l’on est plongée dans un univers. Il travaille dans ce cadre aussi sur un appareil destiné aux sourds-muets. Il le présente à Bréguet, le fabricant de montres, qui n’y croit pas tellement et qui ne le soutient pas. Il va donc déposer un pli cacheté destiné simplement à faire connaitre son invention. Il rencontre également l’abbé Lenoir qui contribue à la Revue du Clergé qui, souhaitant se moderniser, aborde des sujets scientifiques. Les gens étaient à cette époque, très friands de ce type de sujets. Il publie un article sur la machine de Charles Cros en avril 1877, en se disant que ça servira peut être à quelqu’un.
A l’Exposition Universelle de 1889, les deux géants de l’électricité, Edison et Graham Bell sont très à l’honneur. Bell est intrigué par la machine, et il fait des essais. Il s’aperçoit alors que la cire est un très bon conducteur pour les vibrations. Il met alors au point le cylindre en cire amovible. La concurrence entre eux est lancée, Bell appelle sa machine le gramophone et Edison le phonographe. Ils mettent au point chacun des dispositifs pour l’Exposition Universelle : Edison fixe plusieurs paires d’écouteurs à sa machine, pour pouvoir isoler les gens qui écouteront du bruit extérieur, tandis que Bell place les gens dans des cabines séparées dans lesquelles les gens peuvent d’enregistrer sur un morceau de cylindre qui sera ensuite placé dans une boite souvenir de l’événement (et pour encourager l’achat de la machine). La gravure s’effectue en parlant dans le pavillon. A l’écoute, le premier est plutôt fort en volume, et la personne qui chante n’est pas forcément professionnelle.
Des forains venus à l’exposition voient ces inventions, et s’emparent de l’idée pour en faire commerce. Ils investissent dans une machine, et ils font payer les gens pour qu’ils s’enregistrent. Charles Pathé est ceux-ci, mais il finit par enregistrer ses propres cylindres avec des chansons que les gens aiment et qu’ils connaissent.
Emile Berliner commence doucement, il met au point une machine et un appareil pour presser des disques. Les premiers sont faits avec un caoutchouc très dur comme du pneu. Le disque était expérimental, il y enregistre des comptines pour les enfants si bien que sa machine est commercialisée uniquement dans les boutiques de jeux. Il enregistre en au moins 5 langues différentes, au dos du disque était collée l’étiquette avec les paroles de la chanson.
La majorité des pavillons dans la pièce datent de 1920. Leur diversité est purement esthétique et commerciale : ici on en voit en bois, en métal, en cristal… En plaçant les deux têtes sur le même bras, on obtient de l’écho. Cet effet amplifiait le côté magique.
C’est emportés par les chansons, le son et la voix de notre hôte que l’on a voyagé un instant dans ce parcours de l’invention des machines parlantes. Nous évoquons un moment la question des droits d’auteurs, de la reproduction, des questions très actuelles qui se posaient à l’époque et l’on repart riches de cette rencontre insolite et de ce beau voyage évocateur.
Tout cela pour vous enjoindre à découvrir ce joli lieu :
La Phonogalerie
10 Rue Lallier
75009 Paris
01 45 26 45 80
Et quelques pièces sont présentées aussi à l’exposition HEY! modern art & pop culture jusqu’au 4 mars 2013