Quel est l'intérêt pour des réalisateurs français de quitter la France si c'est pour aller y tourner des remakes, encore des remakes, toujours des remakes ? Si la réponse est "pour montrer ce qu'ils savent faire, se couler dans le moule et pouvoir faire ensuite tout ce qu'ils veulent", alors Xavier Palud et David Moreau vont devoir revoir leur copie. The eye ne risque pas de leur apporter la reconnaissance voulue, contrairement à ce qu'avait réussi Alexandre Aja avec La colline a des yeux. Non seulement le film n'apporte rien de plus que le correct-mais-sans-plus original des frères Pang (spécialistes du navet et de la redite depuis), mais il s'embourbe rapidement dans les ornières les plus conventionnelles du cinéma hollywoodien.
L'intérêt principal de The eye, c'est qu'un tel sujet (une aveugle subit une greffe et commence à avoir d'étranges visions) se prêtait à un maximum d'expérimentations visuelles et esthétiques. Alors que dans le tolérable Ils ils avaient plutôt bien joué avec les ambiances et les lumières, le voyage outre-Atlantique de nos deux frenchies semble leur avoir coupé les pattes. The eye est un travail purement scolaire, champ - contrechamp - insert qui fait peur - passage à la scène suivante. Terriblement prévisible, le film ne fera sursauter que les plus gourdasses d'entre nous, et ne donnera à réfléchir à personne, tant le scénario (copie conforme du scénario original, ne parlons pas d'adaptation) peine à donner une résolution à ce point de départ si intrigant.
Vide scénaristique + no man's land visuel = ratage : une équation qui s'applique parfaitement à cet Oeil désossé de ses enjeux. Reste une Jessica Alba plutôt habitée, et dont il faut saluer l'acharnement à faire entendre au monde entier qu'elle est une actrice avant d'être une jolie-poupée-en-bikini-dans-un-film-sur-deux. Après avoir incarné une femme invisible dans le diptyque concon de Tim Story, elle est ici une aveugle. Comme si elle ne cessait de courir après ses problèmes d'image... Voilà le genre de réflexion que l'on a tout le temps d'approfondir devant The eye, qui laisse au spectateur un temps de cerveau disponible à faire pâlir d'envie ce cher Patrick Le Lay.
3/10