A Montréal,un immigré algérien, est embauché pour remplacer une enseignante disparue subitement. Il apprend à connaître et à s’attacher à ses élèves malgré le fossé culturel qui se manifeste dès la première leçon. Personne à l’école ne soupçonne le passé douloureux de Bachir, qui risque l’expulsion du pays à tout moment.
"Monsieur Lazhar" de Philippe Falardeau
Avec : Fellag, Sophie Nélisse Sortie le 06 février 2013 Distribué par TF1 Vidéo Durée : 98 minutes Nombre de : 1 Film classé : Tous publics Le film : Les bonus : |
De l’enseignement au Québec à son problème de l’immigration, il n’y a qu’un film que Philippe Falardeau a joyeusement concocté . Pour parler de choses graves, comme ils savent le faire là-bas, avec légèreté. Au cinéma, comme au théâtre, les québécois ont vraiment un style bien à eux. L’accent mis à part, ils vous embarquent dans leur univers, toujours avec cette impression de vous prendre la main, de faire partie de la famille, ou bien d’y être invité, sans autre forme de cérémonie, qu’un sourire de bienvenue.
D’autant plus étonnant quand celui-ci appartient à Monsieur Lazhar, un immigré algérien, doublement déraciné. En quittant son pays dans la douleur, le voici propulsé au cœur d’un métier qui n’est pas le sien : l’enseignement. Mais les circonstances sont ainsi faites que le spectateur lui accorde la même confiance que la directrice de l’école où une enseignante est retrouvée pendue. Monsieur Lazhar s’apprête à la remplacer.
C’est un peu le sujet du film, mais pas vraiment, puisque sans en avoir l’air il aborde d’autres thèmes comme l’immigration, l’éducation (les méthodes d’éducation, la fonction de l’enseignant) et l’amitié dont les Québécois sont de fins connaisseurs.
Fellag, dans le rôle-titre est le cœur de cette cible si délicatement atteinte par un réalisateur qui craint semble-t-il d’imposer un quelconque point de vue. Sa caméra, comme sa direction d’acteurs n’en font pourtant jamais trop, avec une flopée d’enfants toujours dangereuse à contenir sur un plateau.
La magie opère, je crois, grâce à un point de vue assez paradoxal qui place le héros au centre d’un système collectif dans lequel on le débusque souvent solitaire. Que ce soit au milieu de ses élèves, dans une classe vide, ou dans la cour de récréation Monsieur Lazhar est souvent seul. Dans sa tête, c’est une évidence (on découvre peu à peu le drame qui l’a conduit à s’exiler), mais aussi physiquement, ou alors en compagnie d’une autre solitude, la petite fille dont il avouera un peu plus tard que c’est son élève préférée.
Elle est superbement bien jouée par Sophélie Nélisse, avec à ses côtés le petit Simon (Emilien Néron), autre pierre angulaire du récit. Il s’accuse en silence, ou secrètement (la belle ambiguïté de la mise en scène) d’être à l’origine du suicide du professeur. C’est un gamin atypique, attachant et qui parmi plusieurs scènes émouvantes en procure une qui vous met des frissons à rallonge.
L’illustration que tous les personnages de Philippe Falardeau sont en train de jouer leur vie, comme le fait si bien Monsieur Lazhar qui dans l’étonnant Fellag trouve l’accomplissement d’une personnalité merveilleuse. Vraiment ce film n’a l’air de rien, et c’est sa grande richesse.
LES SUPPLEMENTS
- Making of (32 mn)
Si ce document n’a rien à voir avec le making of traditionnel, il n’en demeure pas moins très attachant dans son élaboration. Il s’agit le plus souvent d’une confrontation entre le réalisateur Philippe Falardeau et l’auteur de la pièce de théâtre dont est adapté le film, Evelyne de la Chenelière. Des extraits sont d’ailleurs proposés entre plusieurs explications de Falardeau, sur sa manière de mettre en scène. « Ce qui me faisait peur c’était de voir les enfants sur l’écran, alors qu’ils n’apparaissent pas dans la pièce de théâtre. » lui répond la romancière, sur le problème posé par l’adaptation. « Mais le piège du sentimentalisme a été évité. »
« Je pensais faire un film plus dur, avec des enfants durs, mais […] j’ai inventé des personnages qui n’existaient pas dans la pièce » relève le cinéaste, très marqué par la psychose sociale qui entourait le scénario, puisqu’au Québec, pour une simple réprimande, il ne faut absolument pas toucher les enfants…
- Casting des enfants (6 mn)
C’est vraiment le copié collé des scènes réellement tournées, dont la fameuse séquence des larmes (« c’est pas d’ma faute si elle est suicidée »)Le comédien maghrébin Mohamed Fellag prête ses traits au personnage de Bachir. Le Canada ne possède pas de comédiens d’origine maghrébine, contrairement à la France. C’est donc vers l’hexagone qu’il s’est tourné pour trouver l’acteur parfait, et c’est ainsi qu’il a fait la connaissance de Fellag, qui a lui-même connu l’exil.