Le 23 janvier dernier, des milliers de personnes venant de toute l’Union européenne ont manifesté à Bruxelles afin de dénoncer le dumping social qui y fait rage depuis ces dernières années, au niveau du salaire, du travail illégal et du manque de protection sociale des travailleurs. La concurrence déloyale à l’intérieur de même l’UE est en contradiction avec les fondements mêmes de sa création et constitue un véritable menace pour l’avenir.
En 2000, l’Assemblée Nationale avait défini le dumping comme »toute pratique consistant, pour un Etat ou une entreprise, à violer, à contourner ou à dégrader, de façon plus ou moins délibérée, le droit social en vigueur – qu’il soit national, communautaire ou international – afin d’en tirer un avantage économique, notamment en termes de compétitivité. »
Le dumping revêt deux aspects: « le salarié détaché » provenant d’un pays où les salaires et la protection sociale sont moindres et la délocalisation.
Selon Novethic, aujourd’hui, près d’un million de personnes travailleraient sous la bannière de « salarié détaché » dans l’U.E.
« Le détachement concerne en particulier la mise à disposition de salariés au titre du travail temporaire : une entreprise de travail temporaire établie à l’étranger peut par exemple détacher des salariés auprès d’une entreprise utilisatrice en France. « Cette pratique est compétitive en raison des règles en vigueur ; les salariés restent assurés dans l’Etat d’établissement de leur employeur », explique Fabienne Müller, enseignante-chercheur en droit social à l’Université de Strasbourg. Qui pointe des écarts de taux de cotisations patronales surprenants.
Pour un salarié non cadre, elles sont de 38,9% en France, passent à 24,6% en Espagne, 18,3% en Pologne, 12,3% au Luxembourg, 8,5% en Irlande jusqu’à… 6,3% à Chypre ! « La règle est que les travailleurs doivent être affiliés à la sécurité sociale de l’Etat d’origine, or, avec les « entreprises boîtes aux lettres », ils ne savent pas toujours qu’ils n’ont aucune couverture sociale », souligne Fabienne Müller. »
« Chaque jour, partout en Europe, des milliers de travailleurs détachés sont exploités comme main-d’œuvre bon marché. Un fort taux de chômage, des conditions de vie difficiles font des pays de l’est et du sud-est européen des lieux faciles de recrutement de travailleurs destinés à travailler dans d’autres pays où ils deviennent des esclaves modernes », ont expliqué les syndicats.
Désormais, La France, l’Espagne, la Belgique, L’Allemagne,… emploient des travailleurs « low-coast » venus en majorité des anciens pays satellites de l’ex-Urss, où les salaires bien plus bas concurrencent déloyalement les salaires nationaux, créant ainsi du chômage et tirant irrémédiablement les salaires vers le bas.
Les entreprises nationales profitent bien entendu de cette manne de main-d’oeuvre au prix moins cher et, sous prétexte de compétitivité, veulent désormais abaisser les salaires et la protection sociale des employés nationaux.
En France, le BTP perd ainsi 8 000 emplois par mois pour cause en grande partie au recours aux travailleurs low-coast.
Il n’est donc pas étonnant qu’ un cadre de Goldman Sachs – décidément – ait affirmé récemment qu’ « Il faudrait déplacer l’emprise de l’Etat vers le secteur privé. Ensuite, il faudrait s’appuyer sur une baisse des salaires générale, afin de regagner de la compétitivité. On estime que la France devrait réduire sa moyenne salariale d’environ un tiers »
Rien que ça. Cela dit il est clair que si cette concurrence ne disparaît pas, La France ne puisse effectivement tenir bien longtemps. Qu’elle ait ratifié l’entrée de la Croatie dans l’UE est assez curieux, alors qu’on sait pertinemment que des Croates, et on les comprend, vont chercher à travailler en France et que des entreprises françaises se voient offrir un nouveau pays de délocalisation dont elles vont chercher à profiter rapidement.
Son partenariat avec le Maroc ( convention de prêt de 100 millions d’euros destinés au refinancement des activités de délocalisation développées à Casanearshore au Maroc) et le Master Délocalisation de l’Université de Bretagne sont incompréhensibles et scandaleux.
Le Dumping Social sous ses deux versions légales, travailleurs « low-coast » et délocalisations, est désormais donc la norme dans l’Union européenne et il va être très difficile d’inverser la tendance.
La crise que l’Union Européenne traverse est désormais le prétexte objectif et non plus idéologique mis en avant par les ultra-libéraux. Non la crise n’est pas un hasard, c’est certain.
La dimension sociale de l’Europe a été sacrifiée sur l’autel du Marché commun. L’Union économique et monétaire a accentué le parti pris ultra-libéral, entraîné la refonte des structures sociales européennes sur le modèle anglo-saxon (déréglementation, flexibilité) et renforcé les effets les plus nocifs de la concurrence, le tout orchestré par le bon Barroso dont la promesse de 2009, « Je m’engage à combattre le dumping social en Europe » n’était qu’enfumage. L’Allemagne d’Angela Merkel a repris le flambeau britannique avec ses employés polonais payés 6 euros de lh’eure et ses mini-jobs à 400 euros par mois.
Il serait erroné de croire que les habitants des pays à main d’oeuvre bon marché sont gagnants dans cette histoire. La présence de nombreux de ces travailleurs à Bruxelles en témoigne.
Va falloir se battre, à l’est comme à l’ouest, au nord comme au sud de l’Union européenne, car les exploiteurs ne se laisseront pas faire. Le Traité Transatlantique pour 2015 lasse augurer de bien rudes batailles qu’il faudra à tout prix gagner.
Source: Novethic
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