#23 : Nous nous aimions le temps d’une chanson

Publié le 17 décembre 2012 par Storiagiovanna @StoriaGiovanna

Bon, là, on y est, c’est bien fini, c’est bien foutu : la fin du monde selon les mayas, c’est vendredi. En ce qui me concerne, je suis rassurée : j’aurai vu une dernière fois les personnes que j’aime le plus au monde. J’aurai l’occasion cette semaine de faire des pagodes dantesques. J’aurai l’occasion de faire un dernier sushi avec ma Siamoise. Et surtout, j’aurai l’occasion d’écrire ce papier que j’écris comme un testament.

En ce qui concerne la musique et l’éducation musicale, si le monde venait à en finir vendredi, mon seul regret aura été de ne pas avoir transmis d’éducation musicale à mon filleul tel que son père ou même mon parrain me l’a transmise – à base de rock 70’s et de son 80’s, mais que du qualitatif, merci les tontons. J’aurais aussi aimé que tout mon entourage reconnaisse le génie des créateurs pour lesquels j’ai le plus de respect – au hasard Bach, Beethoven, John Lennon, Freddie Mercury, Pierre Billon, non je déconne. Je suis comme ça : présomptueuse à l’extrême. Mais j’aurai écrit pour Ladies Room pendant près de 5 ans, vous commencez à connaître mon caractère quand je parle de musique.

J’avais pensé, pour mon dernier papier, faire une update participative de ma playlist de la fin du monde. Finalement, je vais opter pour la mise en œuvre de mon testament en musique. Puisque j’ai du mal à avouer mes sentiments autrement que par des chansons, voici ce que je voudrais transmettre à tous ceux qui m’ont côtoyé.

Pour ma famille : Bill Withers, Lean on me

Certaines personnes trouvent que je suis beaucoup trop proche de ma famille, mais je connais très peu de personnes capables sur cette terre de me supporter pendant 30 ans, mis à part un fou, tellement je suis brise-noix. Et puis aurais-je développé la personnalité que vous me connaissez sans ces personnes qui m’ont fait grandir humainement ? Le triptyque mère/sœur/grand-mère maternelle dans un premier temps, puis mon père, mes oncles et tantes, mes cousins, la famille « éloignée » qui peut parfois être très proche quand on a été élevé comme moi en Bretagne… Comme dans toute famille, certaines relations sont amenées à être plus compliquées, mais si j’ai bien appris quelque chose durant ces trente ans de vie sur terre, c’est que les liens du sang ne suffisent pas à mettre telle personne plus qu’une autre sur un piédestal. Sauf maman. Parce que maman.

Pour la Siamoise : Jimmy Ruffin, What becomes of the brokenhearted

Comme certains couples ont LEUR chanson, cette chanson est définitivement celle de notre histoire. Nous n’aurions jamais pensé, lorsque tu as été embauchée il y a trois ans, que nos vies allaient prendre la tournure qu’elle a prise. C’est lorsque tu m’as avoué ce midi-là au McDo de Villiers-le-Bel la décision que tu prenais et qui allait radicalement bouleverser ta vie que j’ai compris ce qu’il adviendrait par la suite. Que le Seigneur te bénisse, Jeanne-Marie, ainsi qu’il aura béni jusqu’à nos fréquentes disputes.

Pour mes meilleurs amis : Depeche Mode, Never let me down again

Je suis bien consciente que les amitiés exclusives que j’ai pu avoir au fil des années ont pu s’étioler, parce que la vie a simplement séparé mes idéaux de ceux que j’admirais à l’époque. Mais il est vrai que cela fait plus de 15 ans que je connais ma meilleure amie, et bientôt 10 que je connais mon meilleur ami. Ces personnes, je les aime plus que d’autres, parce que je les ai vues grandir, évoluer, et rester fidèles à leurs convictions qui sont également les miennes. Je suis heureuse qu’elles puissent aujourd’hui s’épanouir dans ce qu’elles font au quotidien.

Pour mes patronnes : John Lennon, Woman

Parce que, dans ma carrière, j’ai eu deux patronnes du tonnerre : une en tant que stagiaire, lorsque je suis arrivée en région parisienne, et l’autre à l’heure actuelle. Parce qu’elles ont fait mieux que de m’apprendre davantage de mon métier que 8 ans d’études post-bac : elles ont représenté de véritables modèles de vie, même si, être éditrice, ce n’est pas de tout repos. Malgré tout, au quotidien, elles doivent se battre avec des convictions, des choix, mais aussi une vie personnelle. Et je ne les critiquerai jamais dans leur ensemble. Parce que maman (oups ! transfert psychologique).

Pour mes anciens compagnons et ceux que j’aurais voulu aimer : Joao Gilberto, Chega de saudade

Je trouve cela dommage qu’au final, je ne retienne de l’amour que de la tristesse et que j’en sois à exhorter mon cœur à ne plus éprouver de l’amertume lorsque je pense à mes amours passées. Quoi qu’il en soit, j’aurais eu la joie dans mes trente ans de vie d’avoir eu à vivre le sourire niais après le premier rendez-vous, l’inquiétude quant à la volonté de l’autre de me revoir, le premier baiser, les premiers frissons, les premières caresses, les discussions surréalistes, les discussions sur l’avenir… Et j’aurais aimé que tout cela surpasse ma déception quant à la relation amoureuse. Mais que voulez-vous, les histoires d’amour finissent mal en général.

Pour les Ladies : Queen, The Miracle

Parce que pour moi, pouvoir écrire de manière libre sur ce que j’avais dans les tripes et voir des personnes réagir à mes écrits, it’s a miracle. Pouvoir rire, m’émouvoir d’autres filles qui écrivent ce qu’elles ont de plus profond en elles, it’s a miracle. Pouvoir rencontrer ces filles et, pour certaines, développer une véritable amitié, it’s a miracle. Merci Ladies Room d’avoir permis ces petits miracles de la vie durant ces cinq ans. Je vous aime. Vous ne pouvez même pas savoir à quel point. Mais il fallait que je vous le dise avant la fin du monde.

Je n’ai pas eu assez de trente ans pour dire à ceux que j’aime que je les aime. Et cela m’aura été d’autant plus difficile que la fin est supposée être proche. Mais si la vie avait duré juste trois minutes, Serge Gainsbourg aurait eu les mots les plus justes…