Surprise de taille, Happiness Therapy, feel good movie dont on n’attendait pas grand-chose, s’est glissé en outsider cette année aux Oscars. Production Weinstein mise à part, il faut bien reconnaître que David O. Russell (Fighter, Les Rois du désert) a plutôt bien réussi son coup avec cette petite pépite aux accents indé, qui brille par une direction d’acteurs impeccable et un sens aigu de la nuance, solide colonne vertébrale d’un récit qui prend à contre-pied toutes les attentes. Soit, en point de départ, le retour de Pat (Bradley Cooper) dans sa ville natale après un séjour en HP pour trouble bipolaire. Alors qu’il n’a qu’une seule idée en tête- reconquérir le cœur de sa femme- il en rencontre une autre, Tiffany (Jennifer Lawrence), abîmée, endeuillée, traînant partout sa colère, son mal-être, et une sulfureuse réputation dont elle ne parvient pas à se défaire. Leur rencontre sera le fil conducteur d’une œuvre tout en finesse autour de laquelle gravitent seconds rôles de choix (De Niro, en père superstitieux, n’a pas été aussi bon depuis longtemps) , instantanés tragico-magiques, petites leçons de vie et grands moments de cinéma. Tout du long, O. Russell prend un malin plaisir à contourner la romcom tant redoutée par une simplicité (de ton et de forme) réjouissante et un dosage judicieux de tous les atouts dont il dispose. Le film a quelque chose à dire, mais n’est jamais verbeux. Le film renferme son lot de drames et larmes, mais ne sort jamais les violons. Que de bons points.
Sublimée par les accords de Danny Elfman, la partition d’O’Russell ne souffre alors d’aucune fausse note : l’étude de caractère des protagonistes, cinglés et touchants, se veut aussi crédible que profonde, l’ensemble du casting livre des performances incroyables (Cooper dépasse ses allures lisses, Lawrence confirme son talent), la mise en scène demeure discrète, mais distille ce qu’il faut d’éclairs épurés pour toucher aux essentiels de l’intrigue, soit tous ces sentiments qu’inflige, et qu’offre simultanément, l’existence : peur et fureur, amour et désespoir, joie et dépression. La grande réussite d’Happiness Therapy, au final, est de n’avoir ni théorisé les émotions, ni utilisé ces dernières comme artifices. Le scénario est riche (ce qui est plutôt rare dans le genre), plus subtil qu’il n’y paraît, passionnant jusqu’au bout, et réussit même- et c’est un exploit !- à nous faire gober la pilule d’un happy end sans broncher.