Les Russes tentés par les placements off shore, voire l’exil fiscal ? Où les homologues russes de Depardieu iraient placer leurs roubles ? Quid de « l’évacuation de la fortune privée » ?
Suite aux billets “ Et si vous alliez en Russie “, et ” Bons baisers de Moscou “, continuons de publier le commentaire de Talliana, une internaute avertie. Merci à elle. Et bonne (re)lecture à vous!
“ Tout un débat autour du thème de la fuite de capitaux hors de la Russie dure depuis l’automne dernier. …Ce qui nous intéresse ici, ce sont bel et bien les “investissements” privés des personnes physiques. À savoir, où irait placer son argent l’homologue russe de Depardieu”.
Le Russe cherche à sécuriser ses gains
“ Certains analystes russes appellent ce phénomène “évacuation de la fortune privée”. Il a toujours existé et n’est pas prêt de disparaître à cause d’un grand degré d’imprévisibilité de l’environnement économique et juridique de la Russie. Ce degré de risque accru est en quelque sorte le revers de la médaille et contrebalance les nombreuses possibilités de gain rapide offerts par l’économie russe. Ayant réussi, il s’agit pour le Russe en premier lieu de sécuriser ses gains, à savoir, de les sortir de la machine économique “.
Fort appétit pour l’immobilier de luxe
” De façon générale les Depardieu russes ont toujours de l’appétit pour l’immobilier de luxe, en Europe de préférence, au bord de la mer ou à la montagne. À la carte depuis 2011 nous avions quelques nouveautés: hormis la Côte d’Azur (qui a toujours la côte), les Russes devenaient propriétaires en Croatie, en Bulgarie et au Monténegro ” .
Un visa Shengen en prime
” Le Russe choisit l’Europe, car pour avoir investi dans une maison et un terrain sur sol européen il obtient le droit de séjour dans le pays en question et un visa Shengen en prime.
Le côté luxe et la localisation prioritaire au bord de la mer ou en montagne s’expliquent à la fois par le désir de se faire plaisir et la facilité d’obtention du permis de construire dans les zones touristiques en développement de certains pays (c’est le cas des régions de Komovi et de Belasica au Monténegro, par exemple) “.
Merci Talliana pour votre analyse.
Pas de souci de rentabilité
Notre internaute poursuit : “Je doute que les Russes investissant dans l’immobilier de luxe, dans les resorts européens pensent sincèrement à rentabiliser leur achat en le louant, par exemple. La majeure partie du temps, lorsque le propriétaire est absent, villas et chalets sont vides, hantés seulement par des hordes de garde du corps et quelques domestiques “.
Investissement : le top 10 des Russes
” Et en ce qui concerne les investissements russes à l’étranger de façon plus large, j’ai également établi une liste par ordre décroissant des pays recueillant les flux financiers en provenance de la Russie. Je me suis basée sur les statistiques fournies par Rosstat, l’agence fédérale (*) dont les méthodes de calcul restent discutables. Cependant, je pense qu’elles sont fiables pour avoir un ordre d’idées:
1) Pays-Bas
2) Chypre
3) Suisse
4) États-Unis
5) Luxembourg
6) Biélorussie
7) Iles Vierges (GB)
8) Saint-Kitts et Nevis
9) Grande Bretagne
10) Autriche “
* Russian Federal State Statistics Service (Russian: Федеральная служба государственной статистики)
Le siège de l’INSEE, version russe à Moscou
Priorité aux paradis fiscaux
” Ces dix pays totalisent 86,7% des investissements russes à l’étranger.
On notera qu’il y a dans cette liste bon nombre de “paradis fiscaux” et d’off-shore.
Ceci s’explique par un mécanisme mis en place par les investisseurs locaux afin de profiter des mesures du gouvernement russe pour rendre l’économie du pays plus attractive au regard des investisseurs étrangers.
- Il s’agit d’abord d‘expatrier les capitaux vers une filiale dans une économie off-shore ;
- Puis de les réinvestir en Russie, mais cette fois sous forme de capitaux étrangers.
Ceci dit, c’est une “technique” à la limite de la légalité. Et ceux qui l’appliquent restent de fait des Russes, des insiders avec une connaissance poussée des réalités du pays, un réseau social développé dans toutes les administrations concernées. En outre, ils sont au courant des dernières tendances politiques. Ce qui n’est pas toujours le cas lorsque l’on arrive de l’étranger ” conclut notre internaute.
Moralité : il n’y a pas que les Français qui cherchent des cieux plus cléments pour placer leur argent, voire leur fortune. D’ailleurs la concurrence des destinations fiscales est bel et bien internationale. Nos dirigeants politiques, à Bercy notamment, l’auraient-ils oublié? M D