François LAUR (France).

Par Ananda

TES DOIGTS M’ON DIT, QUI M’ACCOMPAGNENT

Une mare sombre où surnagent des lambeaux de rêves, maint décombre d’enfance, des tisons, des hontes, des vagissements oubliés, des lombes, un bruissement flou et traînant d’effigies déchiquetées, un long râle de chaque part de monde, et c’est la nuit secrète quand rien ne s’y oppose. Des vantaux se closent, une baie. Sur la lèvre de l’aven (mémento !), qui peut être sûr d’éviter un faux pas ? Mais tu souhaites bonne nuit, toi ma riveraine, toi sur qui, déférant à ton souffle, ma main se pose, alors que, déjà lointaine, tu t’éloignes encore comme écho de talons dans la ruelle obscure, s’atténuant mais assidu ; comme si, depuis toujours lointaine, inlassablement tu confiais : « je suis là », étoile qui brûle dans sa bogue, accordée comme par de la neige.

Comme un amandier en février à lui tout seul fait la lumière. Comme si, même dormant, tu murmurais : « viens chez moi, on voit la mer », libérée de l’air libre que l’on sait carcéral. Te pliant à tes propres règles, comme s’il suffisait d’écouter les roseaux, tu as fait ce que tu avais à faire : rendre la vie à ses limites et plus ample. Je n’ai jamais bien su à quel moment précis tu as levé les brumes.

François Laur