Joe Gillis (William Holden) est un jeune scénariste hollywoodien dans la dèche. Le hasard le conduit dans une vaste demeure qui semble abandonnée mais qui abrite Norma Desmond (Gloria Swanson), une ancienne vedette du cinéma muet devenue âgée et tombée dans l’oubli ainsi que son majordome Max (Erich Von Stroheim) qui veille sur elle.
Apprenant qu’il est scénariste, elle lui propose de l’employer pour mettre en forme un scénario qu’elle a elle-même écrit et qu’elle a l’intention d’incarner pour son retour. Gillis saisit cette chance pour gagner un peu d’argent et se sortir de la mouise. Petit à petit et insidieusement, il se retrouve à vivre dans la demeure et à profiter des cadeaux de Norma, qui l’habille de pied en cape et lui enseigne le goût du luxe. Gêné par cette situation, il ne fait cependant rien pour la changer mais le dégoût le gagne quand Norma lui révèle, au soir du réveillon du nouvel an, qu’elle l’aime. Il s’enfuit, mais devant la tentative de suicide de Norma, il revient au bercail.
Pour s’aérer, Joe Gillis accepte une proposition d’écriture de scénario en collaboration avec une jeune femme, ce qui accroît la jalousie de Norma ; à l’issue d’une scène de trop, Joe veut abandonner Norma définitivement, laquelle l’abat de plusieurs coups de révolver.
Le film s’achève sur la fameuse scène sublime où Norma Desmond, toute à sa folie intérieure, le regard halluciné dans un fondu au blanc, au milieu des policiers venus l’arrêter et des caméras des actualités venus faire des images à sensation, répond à l’injonction de Max et descend son grand escalier en grande star, s’imaginant jouer une scène du nouveau film qui va lui redonner une place tout en haut de l’affiche, sa place, comme au bon vieux temps.
Billy Wilder réussit un film magnifique, une mise en abime époustouflante et pathétique en filmant une gloire déchue du cinéma rêvant de son retour, en mêlant aux rôles de fiction de son film, des personnages réels comme Cecil B. DeMille jouant le réalisateur sur lequel Norma compte pour tourner à nouveau (et avec qui Gloria Swanson avait tourné L’Admirable Crichton en 1919) ou bien Buster Keaton dans un petit rôle parlant (lui qui fut une vedette du muet) ainsi que la journaliste à scandales Hedda Hopper dans son propre rôle. Il faut aussi citer le très grand Erich Von Stroheim dans le rôle de Max, majordome de Norma, dont on apprendra qu’il fut réalisateur et son premier mari, reprenant brièvement son titre de metteur en scène pour une dernière prise qui la livrera en douceur à la justice (dans la vraie vie, l’acteur réalisateur avait fait tourner Gloria Swanson dans La reine Kelly en 1928, film dont Norma regarde un extrait dans une courte séquence !). Mise en abime, résonnances, échos, toutes les scènes renvoient les personnages fictifs à la réalité des acteurs réels en un anneau de Moebius qui laisse le spectateur pantois.
Si la séquence finale est sublime, comme je l’ai déjà dit, un autre temps tout aussi fort c’est la visite de Norma à Cecil B. DeMille aux studios Paramount. Assise dans le fauteuil de toile du réalisateur, soudain éclairée par un projecteur, elle est reconnue par les figurants et les techniciens du plateau. Durant un instant, Norma Desmond se retrouve sous l’éclairage des sunlights après vingt ans d'oubli. Inoubliable séquence.
Film noir basé sur la folie engendrée par l'usine à « rêves » Hollywoodienne, Boulevard du crépuscule est certainement l’un des plus beaux films sur le monde du cinéma. Un des plus beaux films jamais tournés, tout simplement.
Boulevard du crépuscule film de Billy Wilder – date de sortie : 1950 - durée : 1h50 – avec Gloria Swanson – William Holden – Erich Von Stroheim