"Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 24 mars 2000, présentée pour M. Roger X... demeurant au lieudit "Les Terres Dontot" 50510 Hudimesnil, par Me DURUDDER-LE Z..., avocat au barreau de Caen ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 98-1686 en date du 15 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 150 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi du fait du refus opposé par le maire d'Hudimesnil, par arrêté du 26 mai 1998, à la demande de permis de construire présentée par M. Y... pour l'aménagement à usage d'habitation d'un bâtiment situé au lieudit "Les Terres Dontot" ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 150 000 F ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 6 000 F au titre des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2001 :
- le rapport de Mme WEBER-SEBAN, premier conseiller, - et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ; Considérant que M. X..., propriétaire d'un terrain supportant un ancien bâtiment en mauvais état sis au ... (Manche), a signé avec M. Y... un compromis de vente du 11 août 1997 prévoyant la cession de ce bien immobilier pour le prix de 150 000 F ; qu'en réponse à la demande de M. X... portant sur la possibilité de restaurer le bâtiment en vue de le rendre habitable, le préfet de la Manche lui a délivré un certificat d'urbanisme négatif le 28 novembre 1997 ; que par arrêté du 26 mai 1998 pris par le maire d'Hudimesnil au nom de l'Etat, une décision de refus de permis de construire a été opposée à M. Y... sur le fondement des dispositions des articles L. 111-1-2 et R. 111-21 du code de l'urbanisme ; que, le 19 octobre 1998, M. Y... a renoncé à l'acquisition de la propriété de M. X... qui a alors saisi le Tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 150 000 F en réparation du préjudice résultant de l'échec de la vente de sa propriété à la suite du refus de permis de construire opposé à M. Y... ;
Considérant que pour rejeter la demande de M. X..., le Tribunal administratif de Caen a estimé que le préjudice invoqué trouvait son origine directe, non dans le refus de permis de construire dont se prévalait l'intéressé, mais dans la délivrance du certificat d'urbanisme négatif du 28 novembre 1997, dès lors que le compromis de vente signé avec M. Y... comportait comme condition suspensive la délivrance d'un certificat d'urbanisme "autorisant la remise en état d'habitabilité" du bâtiment qui faisait l'objet de la vente prévue ; que, toutefois, il ressort des faits de l'espèce que, si ledit compromis stipulait bien que cette vente était subordonnée à l'obtention d'un certificat d'urbanisme positif, la renonciation par M. Y... à l'acquisition de l'ensemble immobilier n'est intervenue qu'à la suite de l'arrêté précité du 26 mai 1998 refusant le permis de construire ; que M. X... est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, pour rejeter sa demande d'indemnité, le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de lien direct entre le préjudice allégué et ledit refus de permis de construire ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme : "En l'absence de plan d'occupation des sols opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : 1 L'adaptation, la réfection ou l'extension des constructions existantes ( ...)" ; qu'aux termes de l'article R. 111-21 du même code : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales" ;
Considérant, d'une part, que les travaux d'aménagement du bâtiment dont M. X... est propriétaire dans une zone non urbanisée de la commune d'Hudimesnil et qui faisaient l'objet de la demande de permis de construire présentée par M. Y... entraient dans le champ des dispositions susmentionnées du 1 de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, alors même qu'ils auraient emporté changement de la destination qui était celle du bâtiment concerné ; que le maire ne pouvait donc, sur le fondement de cet article, faire reposer son refus sur le motif que le projet consistait en la transformation d'une construction à usage agricole en maison d'habitation ; que, d'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que les lieux avoisinants aient présenté un caractère particulier auquel ce projet, comportait-il la création de plusieurs ouvertures en façades et en toiture, aurait été susceptible de porter une atteinte pouvant justifier un refus de permis de construire en application des dispositions précitées de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ; qu'il suit de là que M. X... est fondé à soutenir que le refus de permis de construire litigieux est entaché d'une illégalité constitutive d'une faute de nature à engager, à son égard, la responsabilité de l'Etat ; que, toutefois, cette illégalité ne saurait ouvrir droit à réparation qu'à la condition qu'elle ait entraîné, pour l'intéressé, la réalisation d'un préjudice ;
Considérant qu'il n'est pas établi par l'instruction que la faute de service ainsi commise, si elle a entraîné l'échec de la vente projetée du bien à M. Y..., ait eu, par elle-même, pour effet de priver définitivement M. X... de toute possibilité de réaliser une opération immobilière sur sa propriété, ni même qu'une telle opération ne pourrait se faire désormais, et en conséquence de cette faute, que dans des conditions moins avantageuses que celles proposées par M. Y... ; que, par suite, le préjudice dont le requérant demande réparation ne présente pas un caractère certain ; qu'en outre, la circonstance, à la supposer établie, qu'à la suite de l'annulation de la vente du terrain à M. Y..., M. X... ait été confronté à d'importants besoins de trésorerie et contraint de vendre, dans l'urgence, une maison de famille pour un prix inférieur à sa valeur vénale, ne peut être regardée comme la conséquence directe du refus illégal de permis de construire ; que le requérant ne saurait donc s'en prévaloir à l'appui de sa demande d'indemnisation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à obtenir la condamnation de l'Etat à lui réparer le préjudice allégué ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X... la somme de 6 000 F qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; Article 1er : La requête de M. Roger X... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement."