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François Hollande, un difficile équilibre à trouver entre l’incarnation d’un « vrai chef » et la position d’un « grand concertateur »

Publié le 30 janvier 2013 par Délis

Le premier mois de l’année 2013 a été marqué, entre autres, par l’accord entre le patronat et une majorité de syndicats de salariés sur la réforme du marché du travail, le tout début de l’intervention française au Mali, les manifestations pro et anti-mariage gay ainsi que les grèves et manifestations de professeurs des écoles concernant la réforme des rythmes scolaires ou encore la libération de Florence Cassez. En dépit de cette riche actualité politique, économique et sociale, nationale et internationale, rien ne semble de nature à faire frémir véritablement la cote de confiance de François Hollande, qui demeure très basse. Selon le baromètre d’Ipsos pour le Point, paru à la mi-janvier, la cote de confiance de François Hollande s’établit à 36%, soit seulement un point de plus qu’en décembre. Dans le baromètre de l’IFOP pour le JDD paru le 20 janvier, même constat : 38% des Français (+1 point) se disent satisfaits de l’action du Président. Dans l’étude de LH2, réalisée les 11 et 12 janvier pour le Nouvel Observateur, il apparaît même en baisse d’un point, avec 39% d’opinions positives. Enfin, dans la dernière enquête en date, celle d’Opinion Way pour Métro et LCI, menée du 21 au 24 janvier, 60% des Français se déclarent toujours mécontents de l’action du Président (+2 points).

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L’absence d’impact immédiat de ces différents événements et dossiers sur l’image du Président de la République interroge : est-il vraiment perçu comme un des acteurs de ces changements de société et réformes fondamentales ? Tout se passe comme si François Hollande, tiraillé entre la demande d’autorité forte émanant des Français et sa volonté de promouvoir une concertation également attendue par les concitoyens, ne parvenait pas à donner l’impression de peser sur le destin du pays.

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La demande d’un « vrai chef » présidant aux destinées de la France

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Nous avions déjà mis en avant il y a quelques mois la recherche d’autorité parcourant différents champs de la société française : famille, école, entreprise, politique…. Nouveau signe de cet appel à l’autorité au sein de la sphère politique dans la première vague du baromètre sur les Nouvelles Fractures de la société française réalisé par Ipsos pour Le Monde, le Cevipof et la Fondation Jean Jaurès : 87% des Français acquiescent à l’idée selon laquelle « on a besoin d’un vrai chef en France pour remettre de l’ordre », dont plus d’un sur deux (53%) qui se déclarent même tout à fait d’accord. Cette très large proportion indique que ce souhait est partagé, aussi bien à Gauche (74% des sympathisants du Front de Gauche, 70% des sympathisants du PS), qu’au Centre (84% des sympathisants du MoDem) et qu’à Droite et à l’Extrême Droite (98% des sympathisants de l’UMP et 97% des sympathisants du Front National). En creux, on retrouve ici une critique souvent portée à l’encontre de François Hollande : sa difficulté supposée à faire preuve d’autorité. Lorsqu’on interroge les Français ne lui accordant pas ou plus leur confiance, ils lui attribuent souvent spontanément ce « défaut » : ainsi, dans le baromètre Opinion Way pour le Cevipof, 17% des personnes interrogées indiquent ne plus faire confiance au Président en raison de son comportement jugé « nonchalant, mou, versatile ». Idem dans les enquêtes menées par Harris Interactive : son absence d’autorité dans l’action et la prise de décision constitue un des principaux motifs avancés par les Français ne lui faisant pas confiance pour mener une bonne politique.

François Hollande, un difficile équilibre à trouver entre l’incarnation d’un « vrai chef » et la position d’un « grand concertateur »

Rappelons qu’en octobre dernier, seuls 31% des Français estimaient que François Hollande était capable de faire preuve d’autorité, contre 68% d’avis contraire. On peut émettre l’hypothèse que la bonne image d’Angela Merkel, y compris en France, réside à l’inverse dans sa capacité perçue à exercer son autorité. Alors que les prévisions de croissance et d’emploi continuent à se dégrader et que la société française apparaît divisée sur un certain nombre de sujets de société, les Français font donc état dans les enquêtes d’opinion non pas seulement d’une forte demande d’intervention étatique mais de la recherche d’un vrai leader, ce que ne semble pas aujourd’hui pouvoir incarner François Hollande.

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L’éloge de la concertation ou le refus de « passage en force » et de la précipitation

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Dans le même temps, les Français expriment également de fortes attentes en termes de concertation. Au soir même de l’élection de François Hollande, deux-tiers des Français indiquaient préférer que le nouveau Président de la République « consulte au préalable tous les partenaires sociaux avant de mettre en place des réformes, même si cela prend plus de temps » plutôt qu’« il mette en place rapidement des réformes, quitte à ne pas consulter au préalable tous les partenaires sociaux ». Aujourd’hui, force est de constater que l’accord sur la réforme du marché du travail, arraché à l’issue d’un long processus de concertation des partenaires sociaux, a été salué plutôt comme une réussite et a suscité relativement peu de commentaires négatifs ou même d’interrogations au sein de la population. Alors que près des deux-tiers des Français pensaient que  les partenaires sociaux ne parviendraient pas à s’accorder sur une réforme du marché du travail, la méthode a finalement été reconnue et cet accord final a été considéré comme le signe d’un dialogue social retrouvé. François Hollande souhaite par conséquent que l’accord soit entériné au plus vite par les parlementaires, sans modifications substantielles. Mais le risque est peut-être de donner l’impression d’un pouvoir exécutif et législatif simples transcripteurs d’une politique décidée par les partenaires sociaux, et d’annihiler ainsi les bénéfices de l’accord en termes de cote de popularité.

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Autre preuve de l’attrait pour la concertation : le refus de « passage en force » ou de précipitation sur un certain nombre de sujets, le plus emblématique actuellement étant sans doute « le mariage pour tous ». Une majorité de Français indique souhaiter – comme souvent lorsqu’on leur pose la question – un référendum sur cette réforme alors même que la constitutionnalité d’une telle démarche sur un sujet de société a été interrogée. En effet, dans un sondage Ifop pour Valeurs Actuelles, 69% des Français se disent favorables à une consultation populaire sur le sujet (85% des sympathisants de Droite mais également 55% des sympathisants de Gauche). On pourrait citer également le cas de l’aéroport Grand Ouest, qui divise l’opinion, et pour lequel Jean-Marc Ayrault a dû annoncer de nouvelles discussions, alors même que les règles de concertation obligatoires avaient été respectées dans la région : « Malgré les concertations légales et les décisions des collectivités concernées, qui ont déjà eu lieu, et qui ont conduit à l’adoption du projet, des interrogations subsistent. Dans un souci d’apaisement, le gouvernement confiera dès la semaine prochaine à une commission du dialogue le soin d’exposer ce projet et d’entendre toutes les parties prenantes. » Nouvel exemple : la réforme des rythmes scolaires. Majoritairement acceptée dans son principe, aussi bien par les Français que par les enseignants selon deux enquêtes Harris Interactive menées pour le compte du SNUIPP, elle suscite l’interrogation des parents et des professeurs des écoles, descendus récemment dans la rue pour demander le report de la réforme à la rentrée 2014 et une concertation plus poussée des différentes parties-prenantes. On pourrait citer également le grand débat sur la transition énergétique, la conférence de consensus sur la récidive, la grande concertation relancée sur la dépendance, etc. Autant d’exemples de démarches globalement bien perçues dans l’Opinion.

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Plus globalement, la deuxième vague du baromètre de la concertation et de la décision publique Harris Interactive – Res Publica, rendu public récemment, illustre le penchant pour un mode de décision participatif : dans cette enquête, 87% des Français déclarent voir positivement la démocratie participative et plus des trois-quarts d’entre eux (76%) indiquent souhaiter le développement des démarches de concertation. Au niveau national, les Français estiment majoritairement que les concertations initiées ou  envisagées par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault sont  « une bonne chose et vont permettre au gouvernement de prendre de meilleures décisions dans les domaines considérés » (69%, dont 15% tout à fait d’accord). De ce fait, ils considèrent qu’elles « devraient être généralisées à toutes les questions dont s’occupe le gouvernement et qui ont un impact sur la vie quotidienne des Français » (70%, dont 22%)  et qu’elles « devraient impliquer plus les citoyens et pas seulement leurs représentants associatifs ou syndicaux» (78%, dont 28%). On le voit, de telles initiatives sont globalement bien perçues et leur généralisation apparaît souhaitable.

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Une conciliation impossible ?

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Attente d’un « vrai chef » et souhait de plus de concertation : faut-il y voir des demandes contradictoires émanant de Français déboussolés ? C’est, quoi qu’il en soit, la difficile équation que devra résoudre François Hollande s’il veut espérer que les actions entreprises rejaillissent durablement sur le jugement porté à son égard. Mais loin d’être une contradiction, il faut sans doute y voir – moins d’un an après l’élection présidentielle – une forme de déception des Français inquiets de ne pas percevoir de cadre cohérent à l’action et à la volonté nationale.  Pour concilier ces deux demandes sociétales puissantes, François Hollande devra sans doute davantage apparaître comme le garant du bon cadrage et de la bonne organisation des prochaines réflexions et concertations, de manière à ce qu’elles ne « traînent pas en longueur » et ne divisent pas davantage une société française qui s’interroge de plus en plus sur son unité. En effet, favorables à plus de concertation, les Français dénoncent pourtant deux travers potentiels : le fait de différer par ce biais des décisions difficiles ou le fait de masquer derrière la concertation des objectifs de communication. Ainsi, pour plus de la moitié d’entre eux, la concertation peut être  « un moyen de différer les décisions alors que le gouvernement a déjà fait ses choix et qu’il ne tiendra pas compte de l’avis des participants aux concertations ». Plus de 40% considèrent également que la concertation peut avoir pour effet de trop ralentir les processus de décisions politiques. En cela, la concertation ne doit pas pouvoir être perçue comme une solution de facilité non encadrée ou une opération de communication à peine déguisée, mais doit prendre tout son sens dans un cadre pensé et contraint. Equilibre sans doute difficile mais pas impossible entre ouverture et leadership. L’appel au « vrai chef » serait en conséquence sans doute davantage à comprendre comme la quête d’un individu capable de présider aux destinées du pays en permettant à la souveraineté populaire de s’exercer dans un souci d’efficacité.

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Dans ce contexte, il est probable que la cote de confiance de François Hollande remonte au cours des prochaines semaines ou mois en cas de succès au Mali. En effet, une enquête Harris Interactive a mis en lumière que les raisons de l’intervention étaient bien comprises et appropriées par les Français, ce qui devrait se répercuter sur l’image du chef des armées. Mais seul un véritable changement d’attitude laissant à voir qu’il décide en organisant la concertation serait de nature à regonfler plus durablement sa cote de confiance.


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