Il ne s'agit pas tant d'insérer de la technologie sur le point de vente pour le rendre attractif, que de réfléchir aux outils permettant de fournir une expérience de qualité, quel que soit le canal. Le point de vue de Morgan.
Entretien avec Frédéric Wilhelm, directeur de la distribution multicanal chez Morgan. Il participait jeudi à la table ronde du Théma de L'Atelier sur L'avenir du magasin : la fin du magasin ?
L'Atelier : On parle de plus en plus de digitalisation du point de vente comme d'un axe stratégique pour redonner du souffle au magasin. L'outil est donc si important?
Frédéric Wilhelm : Non, tablette ou smartphone, ce n'est pas le problème. Aujourd'hui, neuf personnes sur dix ont déjà vu le produit sur Internet avant d'aller en magasin. Et le problème, c'est que quand vous vous déplacez, vous avez une chance sur deux de ne pas le retrouver. La question de la transformation du magasin n'est donc pas celle de disposer de pléthore d'outils high tech, ou d'être livré sur place. Elle est celle de retrouver sur place ce que l'on a vu sur le web. Qu'on le retrouve "physiquement" ou via d'autres biais. Il faut donc trouver des solutions : proposer des options flexibles pour obtenir le produit, discuter de ses caractéristiques avec le client afin de fournir un véritable service ajouté etc.
Le web doit servir le magasin, et inversement, donc. On n'est plus dans une logique concurrentielle.
En effet, les canaux ne sont pas en concurrence. Chacun compte. Il faut surtout, donc, arrêter de penser priorisation d'un canal, au profit d'une stratégie orientée distribution, homogénéité. De toute façon, pour les détaillants, Internet a évolué en deux dimensions : une évolution horizontale, avec de plus en plus d'acteurs sur le marché, avec qui il faut collaborer pour améliorer la diffusion de ses produits, et une évolution verticale, avec une arrivée du web en magasin.
En interne, il faut casser les silos. C'est un véritable axe stratégique. Au départ, il a fallu pousser le digital au sein de la stratégie générale, pour créer des passerelles. Cela est fait, mais il faut continuer à réfléchir et innover, avec les équipes qui ont maintenant le pouvoir, et qui ne sont pas issues du digital.
Comment voyez vous dès lors se dessiner le magasin dans les prochaines années ?
C'est le consommateur qui va donner la réponse. Il y aura une optimisation des points de vente cette année et l'année prochaine. Il y a des chances que certains acteurs en fassent trop dans cette direction. Trop de digitalisation, pas assez d'humains, de produits et de services, un parcours trop balisé, risquent de faire baisser l'attractivité de ces endroits. Il va falloir optimiser et trouver le juste milieu. Comment recréer du plaisir, comment créer d'autres axes d'affaires, introduire de nouveaux services...