L’expérience de la crise économique actuelle montre que, non content de créer du chômage structurel en période d’expansion, la protection de l'emploi est impuissante à empêcher la hausse du chômage induite par une récession.
Par Acrithène.
- Que la protection de l’emploi conduisait à une augmentation du chômage structurel ;
- Qu’elle dégradait la productivité des emplois existants ;
- Et que son effet sur le chômage conjoncturel était équivoque.
Je ne reviens pas sur les raisons de la perversité de la protection, vous renvoyant aux détails de mon billet sur le sujet. En revanche, je vous propose aujourd’hui quelques graphiques avec des données plus récentes afin de tester ces conclusions.
Un chômage structurel plus élevé
Le premier graphique expose l’effet de la protection de l’emploi sur le chômage structurel, c’est-à-dire la part du chômage qui revêt un caractère permanent et n’est pas réductible à la conjoncture économique. L’année la plus récente pour évaluer le chômage structurel est celle qui précède la faillite de Lehman Brothers et le début de la crise financière.
Le nuage de point répertorie les pays avancés de l’Union Européenne, d’Amérique du Nord et d’Asie (détail dans le fichier excel). Il laisse apparaître une corrélation positive assez nette entre protection et chômage à la veille de la crise financière. Le coefficient de détermination (R²) indique qu’environ 40% des écarts de taux de chômage entre pays peuvent être déterminés par la seule protection de l’emploi. Évidemment, il faut se méfier d’une interprétation aussi simpliste, dans la mesure où la protection de l’emploi s’inscrit souvent dans un lot plus large de mesures créatrices de chômage (SMIC, emplois subventionnés, charges, etc.)
Il s’agit des mêmes résultats que ceux qu’avait établis l’OCDE avec les données de l’année 2002.
Une résistance inexistante à la crise
La question est de savoir si ce renoncement à l’efficacité en période de croissance joue un rôle d’amortisseur face aux crises économiques. La protection joue un rôle pervers sur les créations d’emplois, ce qui explique qu’elle cause du chômage en période d’expansion. Mais en période de récession, ce sont les destructions qui prédominent, ce qui laisserait penser que la protection peut amortir le choc d’une crise économique.
Je vous avais indiqué que ce raisonnement était vicié, car les pays à forte protection ont un plus grand stock d’emplois fragiles maintenus artificiellement en vie, et qui vont être les premiers à succomber au retournement de la conjoncture.
Le prochain graphique représente la hausse du taux de chômage entre 2007 et 2011, en fonction du niveau de la protection de l’emploi. Si cette dernière avait un quelconque effet bénéfique, nous devrions observer une relation décroissante entre les deux variables. Au contraire, le nuage de point ne laisse apparaître aucun lien significatif entre protection et variation du taux de chômage en période de récession.
La qualité des emplois dégradée
Dernier point auquel les commentateurs honnêtes devraient être sensibles, la protection dégrade la qualité des emplois. Généralement, l’argument inverse est opposé à la libéralisation du marché du travail. Pourtant le dernier graphique représente la part de l’emploi temporaire en fonction de la protection des emplois permanents. Comme pour le taux de chômage, la corrélation est assez frappante. Plus les emplois permanents sont protégés, plus les entreprises ont recours aux emplois temporaires.
Et comme en général la protection du passé se fait en compromettant l’avenir, l’effet est trois fois plus important chez les jeunes. Un point de protection sur l’échelle de l’OCDE correspond en moyenne à 13 points de pourcentage dans la part des emplois temporaires chez les moins de 25 ans ! Et ils seront pourtant parmi les premiers à aller manifester pour défendre ce système…
Voir aussi :
- Données et tableur Excel de l’article
- Politique de l’Emploi (3/3) : La protection des emplois, cause de leur rareté
- Emploi : les enfants d’immigrés nettement moins bien lotis que leurs parents