Lui, Dominique Bernard, très délicat sur ses chaussures plates, tricotant des jambes pour accentuer la féminité, collants couleur chair montant sur des cuisses non rasées, petit turban rouge dans les cheveux, rouge à lèvres saignant, vernis aux ongles, lourd collier de rubis, boucles d’oreilles et pudique veste trois quart. Elle, Claude Jean, très académique derrière ses lunettes rondes, les cheveux blonds, presque blancs, bien plaqués, le costume serré, les chaussures plates et bien cirées, le visage de marbre qui ne sourit jamais (ne rien montrer de la féminité enfouie...) Derrière l’allure universitaire et la paire de bésicles du conférencier besogneux, on note le regard farouche, décidément pas franc, d’un petit Panurge occupé à semer le trouble dans les jardins de la Sorbonne.
Trois tortues trottaient sur trois toits étroits... Un chasseur sachant chasser doit savoir chasser sans son chien... Le ton est donné. Ces deux motifs sonores vont scander chacun des chapitres qu’ont décidé de parcourir les deux « émules du CNRCA » dont le sexe, comme les intentions, reste à déterminer. Ils avancent dans leur carré de jeu avec la précision de métronomes. Ils ont fait de la place dans la salle de classe, poussé les tables et poussé les bureaux. Ils sont assis sagement, jambes croisées pour la dame, négligemment écartés pour Panurge. Imperturbables, remontés comme des pendules, ils plongent le regard dans les regards inquiets ou amusés de spectateurs qu’ils mijotent de défriser. Plus on est de complices et plus on rit.