Le livre sera disponible en librairie le 28 février prochain mais j’ai eu la chance de le lire ce matin en avant-première chez son éditeur. En d’autres circonstances j’aurais exprimé mon plaisir de faire cette découverte mais le départ précipité de l’auteur en décembre laisse tous ses lecteurs à l’abandon et jette une ombre à ma joie.
Cette citation sera le dernier message qu’il nous aura laissé.
Né à Bruxelles en 1958, de mère belge et de père portugais, l’enfant a grandi en intégrant les deux cultures. Il s'est nourri des bandes dessinées de Tintin (il n’est pas le seul à avoir été très influencé par Hergé) et des films de Chaplin, deux influences qui représenteront pour lui avec une troisième, celle de Saul Steinberg, « une merveilleuse école de narration » comme il le confiait lors d’un entretien avec Lucie Cauwe qui a donné lieu à une biographie disponible sur demande à l’Ecole des loisirs.
Il découvre l’univers de Tomi Ungerer en 1981 et ce n’est sans doute pas par hasard s’il a dessiné une Tiffany Le petit Guili, sur une page où domine la couleur bleue, nous rappelant la tonalité et la jeune héroïne des Trois brigands.
Mario avait commencé par des dessins de presse, des affiches, des brochures avant de se lancer dans l’illustration de textes pour enfants écrits par d’autres que lui. En 1995 il publie son premier album, le Monde à l’envers. Il y exprime le mal être de Rémi le souriceau dans le monde qui l’entoure, un état que l'illustrateur ne renie pas : lorsqu’on se sent bien après avoir été mal, c’est un peu comme une renaissance, disait-il en ajoutant qu’écrire l’aidait à vivre.
Le livre se termine positivement, comme tous les livres de cet auteur qui se disait être un optimiste désespéré. Le petit Guili ne déroge pas à la règle. On y retrouve le lion de Nuno le petit roi qui, déjà se rendait compte qu’être un bon roi n’était pas chose facile. Vivre avec une couronne sur la tête n’est pas plus une promesse de sagesse que de bonheur. Quand au Petit Guili, avoir une couronne sur la tête donne de mauvaises pensées.
Nous n’avons pas eu l’occasion de discuter avec lui de l’égalité entre les hommes et les femmes. je suis sûre qu’il avait un point de vue très net sur la question. Quand il entend la chanson « Le roi, sa femme et le petit prince », vous savez ceux qui viennent chaque jour de la semaine pour vous serrer la pince, l’auteur est interpelé par l’emploi de « sa femme » au lieu de « la reine » et il dessine le roi plus petit que son épouse, pour dit-il, rétablir l’équilibre.
A propos de l’école, une institution qui fait couler beaucoup d'encre en ce moment, Mario Ramos estimait qu’on pouvait la critiquer mais sans jamais oublier que c’est là qu’on a appris à lire et à écrire.
Des cochons, des loups, des dragons, des éléphants et des gorilles arpentent les pages de ses albums. Sur le mur, derrière sa table de travail, on pouvait voir de grandes reproductions de tableaux de Van Gogh et de Monet, des cartes postales d’œuvres de Klee, Degas et Matisse, un couple de mariés faisant référence à sa propre histoire, un sécateur placé sous-verre, avec juste en dessous une citation empruntée à Michel Audiard. La vie : aucune chance de s’en sortir vivant.
Le petit Guili, de Mario Ramos, collection Pastel, Ecole des loisirs, mars 2013