La supergéante rouge difforme Bételgeuse photographiée dans l’infrarouge lointain par Herschel – Les expulsions de matière forment des séries de coquilles que l’étoile variable devrait heurter dans 5 000 ans
L’étoile rouge-orangée Bételgeuse, l’une des plus brillantes de la constellation d’Orion que l’on peut voir en ce moment (hiver), devrait entrer en collision avec un arc de poussières dans environ 5 000 ans.
Par une belle soirée d’hiver, il est impossible de manquer la constellation du Chasseur Orion qui, en compagnie de ses Chiens et face au Taureau céleste, règne sur l’horizon sud. Facile à reconnaître par son célèbre baudrier — ou ceinture — formé de trois étoiles alignées et quasi-équidistantes, le Chasseur se distingue également par deux étoiles très brillantes : l’une, Rigel, représente son pied (ou genou) droit et l’autre, Bételgeuse, marque son épaule gauche (voir figure ci-dessous).
Désignée aussi sur les cartes célestes Alpha Orionis, elle est en réalité la deuxième étoile la plus brillante de la constellation (contrairement à ce que la mention alpha faisait croire). Née il y a seulement quelques millions d’années, probablement au sein de la grande nébuleuse d’Orion (nous n’en distinguons que les parcelles les plus lumineuses dans nos instruments), Bételgeuse est aujourd’hui une supergéante rouge, un monstre ou ogre stellaire dispendieux et à bout de souffle qui a éclusée très vite toutes ses réserves d’hydrogène. D’ici quelques milliers ou dizaines de milliers d’années, cette étoile asymétrique de couleur rouge-orangée devrait exploser.
Instable depuis longtemps, Bételgeuse expulse de grandes bouffées de gaz et de poussières qui forment une série de coquilles en expansion. Son diamètre n’a de cesse de varier dans le temps et sa luminosité aussi (sur des périodes moyennes de 5,7 ans). Distante, c’est selon, de 425 à 640 années-lumière, elle est une des rares étoiles du ciel terrestre — excepté notre Soleil — qu’il est possible de photographier et de résoudre non comme un point mais comme un disque. Au fil du temps, sa taille apparente peut varier de 0.0568” à 0.0592”. D’une masse estimée de 14 à 20 fois celle du Soleil, sa taille réelle oscille entre 550 et 1 000 fois celle de notre étoile. Placée au centre de notre système solaire, elle n’aurait aucune difficulté pour engloutir les orbites de Mercure, Vénus, la Terre, Mars, la ceinture d’astéroïdes, s’étendant ainsi jusqu’à plus de 500 millions de km (soit 3,4 Unités Astronomiques), selon sa forme (dans les deux sens du terme …). Du reste, pour ce type d’étoile au tempérament très variable (classe spectrale M1-2 lb), il est difficile de définir ses limites car trop mouvantes. Son atmosphère se dilate.
Superbe photo de Roger Bernal Andreo montrant la constellation d’Orion toute entière – La partie la plus lumineuse de la grande nébuleuse d’orion est visible sous le baudrier et le poignard du Chasseur – On reconnait Bételgeuse à son éclat orangé, en haut à gauche sur l’épaule d’Orion – Le grand arc rouge est la « boucle de Barnard », le reste supposé d’une supernova
Les observations récentes réalisées avec le télescope spatial Herschel sensible au rayonnement infrarouge lointain, ont mises en évidence les anneaux concentriques de poussières éjectées par les pulsations de l’étoile furibonde. En mouvement dans la galaxie, Bételgeuse se déplace à une vitesse relative de 30 km/s. (env. 108 000 km/h.) et devrait heurter la paroi extérieure de la coquille qui l’entoure dans précisément 5 000 ans. En outre, l’équipe de chercheurs a “mis en relief” la longue barre de matière interstellaire se dressant au-delà de l’enveloppe stellaire. C’est un “mur” sans relation directe avec la matière expulsée par l’étoile. Son origine pourrait être liée au champ magnétique de la Voie Lactée ou, autres hypothèses retenues par les savants, être la frange d’un nuage moléculaire. Bételgeuse devrait entrer en collision avec dans environ 12 500 ans.
La supergéante rouge actuellement 100 000 fois plus lumineuse que le Soleil achèvera violemment son existence en explosant. La supernova brillera alors dans notre firmament autant que la Pleine Lune durant plusieurs semaines. Fort heureusement, nous ne devrions pas être touché par le sursaut de rayonnement gamma émis. La date de l’explosion est inconnue et si cela se trouve, cela s’est déjà produit mais nous ne pouvons le savoir, de toute façon, qu’avec 430 ans de retard.
Pour en savoir plus sur Orion (histoire, mythologie, étoiles et nébuleuses qui le compose), voir la vidéo “Anatomie de la constellation d’Orion”.
Crédit photo : ESA/Herschel/PACS/L. Decin et al.