La fête des moutons

Publié le 23 janvier 2013 par Radiocampusparis @campusparis

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J’aimerais commencer cette émission sur une citation de l’ère du vide, de Gilles Lipovetsky : « Sous les spots des night-clubs, gravitent des sujets autonomes, des êtres actifs, plus personne n’invite personne. Ne restent que des monades silencieuses dont les trajectoires aléatoires se croisent dans une dynamique de groupe muselée par l’envoutement de la sono. »

Si ce cher Lipovestky pointe du doigt l’extrême individualisme des fêtards de notre temps, il soulève aussi l’interaction qui se noue malgré tout et parfois malgré eux entre les individus qui décident de sortir de chez eux et d’aller à la rencontre de l’autre pour danser et se laisser envoûter par le son de la sono qui lient leurs mouvements. Mais pourquoi les hommes éprouvent-ils ce besoin de se réunir pour « fêter » ? Que fêtent-ils quand ils fêtent ? Faut-il avoir quelque chose à fêter pour fêter ? Et ce quelque chose doit-il nécessairement être commun à tous les membres du groupe ?

Faire la fête, résulte souvent d’un besoin de lâcher-prise, d’un moment de liberté à l’image des free-party qui, bien qu’elles ne soient pas la seule manière de faire la fête aujourd’hui, sont du moins celle qui fait le plus de bruit, dans tous les sens du terme. Décriée, stigmatisée, diabolisée, la free-party, rave party, appelez-la comme vous voulez, rassemble pourtant amoureux de la fête, de la danse et de la musique techno, semblant offrir un vent de liberté dans les sociétés occidentales tellement policées que même la fête subit un contrôle social important.

Mais finalement, faire la fête, n’est-ce pas toujours répondre à certains codes, à certaines règles ? La fête est toujours un moment de partage collectif, où un certain nombre d’individus (se connaissant ou non) sont en interaction. Ce qui implique un certain nombre de règles implicites, permettant de contrôler ces interactions.

Faire la fête implique donc une connaissance et un respect de ces règles implicites, inhérentes au groupe avec lequel on fait la fête. A chaque type de fête, que l’on parle d’un mariage, d’un réveillon, d’un festival ou d’une free-party correspond une façon de faire la fête qui passe par conséquent par une normalisation des comportements. Cette normalisation est relative aux différents types de fêtes, mais est-elle aussi fonction d’une époque ? L’ère de l’individu roi a-t-elle induit de nouvelles manières de faire la fête ? Que recherche-t-on aujourd’hui quand on fait la fête ? C’est à toutes ces questions que nous essaierons de répondre aujourd’hui avec nos invités :

LIONEL POURTAU, Sociologue rattaché au laboratoire d’Ethique de Paris II.

CHRISTIAN BERNARD-CEDERVALL : DJ, journaliste, producteur et ancien conseiller en communication politique.