Magazine Cinéma
C’est l’histoire d’un géant, génial, fou, caractériel et idéaliste, ou plutôt l’histoire d’un Ogre géant qui a fait rêver un public. Un géant tel que Gulliver dans « Le voyage de Gulliver » de Jack Sher, véritable objet de curiosité qui attire tous les habitants de l’île de Lilliput, ou géant humanoïde bleu dans « La planète sauvage » de René Laloux et Roland Topor. Celui qui s’amuse avec les minuscules êtres humains de la planète Ygam. Notre Ogre géant, lui, est le symbole d’une époque révolue, (et oui le monde vieillit) celle « Du cri du Cormoran le soir au-dessus des jonques » ou celle des «Valseuses ». Années d’audaces, de révolution sexuelle, cinématographique et politique, notre Ogre géant a été l’effigie de ces nombreux changements de mentalité. Son élan de vitalité, son charisme, sa manière d’avaler le monde en une bouchée, sa boulimie des tournages ( plus de 170 films a son actif), tout cela a suffit pour construire son personnage et se mettre en scène. Tout comme Dali, surréaliste et cabotin, qui s’autoproclamait « divin » et « génial », Gérard Depardieu disait qu’il serait le plus grand comédien Français. Chose réussie. Le voilà au cœur des polémiques, un Ogre géant ne peut pas passer inaperçu, non ? autour d'une désolante histoire de sous. Mais la réalité est autre. Gégé nous fait assister depuis des semaines à une série B, dont l’histoire serait sans doute, celle d’un mythe qui voudrait se retirer, las de porter le cinéma Français sur ses épaules, fatigué d’être le plus grand comédien Français… Un suicide en somme. Mais comment transformer, dépasser ce que l’on a été ? Lui qui a atteint les sommets de la gloire et du succès, comment terminer l’histoire en beauté ? Le décor Français est sans doute devenu trop étroit. À force de prendre de place, l'Ogre Gérard s’est mis, peu à peu à abîmer et dénigrer son environnement. Mais un Ogre géant vit dans l’excès, et dévore sans cesse sans jamais en trouver l’issue…. Tout comme les vieilles légendes nous sommes peut-être un peu coupable en cultivant, nourrissant, aimant l’image de l’Ogre Gérard. Car le géant dans les contes, n’est-il pas la figure de la peur de l’adulte et de sa fascination pour la puissance ? Nous avons besoin d’Ogres géants, pour crier de peur, de colère ou d’angoisse lorsqu’ils se déplacent…. C’est si bon d’avoir peur. Notre Ogre Gérard joue et jouera encore car il a préféré effacer la frontière entre l’écran et celui de sa vie, sans doute pour oublier toutes les souffrances qu’il a traversées… Aujourd’hui, plus que jamais, l'Ogre Gérard a besoin d’émotions fortes, il aimerait entendre : « On t’aime Gégé, revient, tu nous manques ! ». On l’a aimé, oui. Il a quitté la France mais au fond c’est lui qu’il a quitté depuis longtemps. Parfois il est revenu. Nous donnant encore des frissons en interprétant Alain, chanteur de bal délicat et si parfait en homme amoureux dans « Quand j’étais chanteur » de Xavier Giannoli ou encore lorsqu’il a incarné Serge, retraité touchant dans « Mammuth » de Benoit Delépine et Gustave Kervern. Aujourd’hui, le personnage à rattrapé l’homme. Laissons le inventer la fin de sa carrière. Et n’en faisons pas une histoire de patriotisme.
Exposition Dali au Centre Pompidou ici