La semaine politique : Hollande: le leadership batave

Publié le 20 janvier 2013 par Letombe

Première semaine de guerre, des soldats français sont au sol au Mali. A Paris, Hollande change de stature pour le microcosme médiatico-politique. Laissons ce dernier à cette vacuité. Hollande fait le job, comme on dit parfois. Mais la guerre en cours imprime quelque chose de nouveau.
Cette escapade militaire, en quelques jours, a changé sa présidence. Car Hollande ne jouait pas au petit soldat à la moindre occasion.
Nous pouvions enfin disséquer, analyser, critiquer l'accord intervenu entre le MEDEF et trois syndicats dont la CFDT. Les commentaires sont allés bon train. A gauche, le compte n'y est pas. S'il n'y avait pas eu d'accord, notent certains, les critiques auraient été aussi virulentes. La France, qu'elle soit sociale ou politique, a fort à faire pour récupérer un peu de sens du dialogue. La négociation n'est pas un exercice solitaire ni de salon. L'accord, donc, n'était pas bon. Il ouvre la porte à la renégociation collective, par entreprise, des conditions de travail pour sauvegarder l'emploi en cas de
«en cas de graves difficultés conjoncturelles rencontrées par une entreprise». Certes, il y a des droits nouveaux qui ne sont pas rien, surtout en pleine Grande Crise: un relèvement des cotisations chômage sur quelques 17 millions de contrats courts et précaires, un élargissement de la couverture santé (avant 2016), la création d'un compte personnel et transférable de formation, etc.
Devant ceux-là même qui ont participé à cette épreuve du dialogue social (MEDEF, CGT, CFDT, FO, et les autres), Hollande répète cette curieuse formule de Laurence Parisot, que nous ne faisons pas nôtre: « Il faut conjurer la peur du licenciement des travailleurs et la peur de l'embauche des employeurs. » Mais devant les partenaires sociaux, jeudi 17 janvier, il confirme: cet accord est «une étape, encore insuffisante, contre la précarité». Il tend la main aux non-signataires. A l'Assemblée, il faudra l'améliorer. En mars, le texte sera transcrit dans la loi. Mais il y aura aussi cette fameuse loi sur la cession des sites rentables. Une promesse de campagne faite par le candidat Hollande à Florange, tout le monde s'en souvient.
Notre chef de guerre a tranché dans le vif. Mercredi, certains sont revenus sonnés.
Aux opposants du mariage gay, le président a récusé tout référendum. L'élection a eu lieu. Le débat se poursuivra au Parlement. C'est une loi qui accorde des droits nouveaux sans en retirer à personne. Quelques centaines de milliers de catholiques ont eu quelques peines à remplir l'esplanade du Champs de Mars dimanche dernier, comme en témoignent toutes les photos aériennes de l'évènement. Cette France-là nous rappelait que la laïcité restait un concept vain pour ceux-là même si préoccupés par la progression de l'Islam dans nos campagnes.
Triste spectacle !
Notre chef de guerre a tranché dans le vif. Quelques parlementaires, y compris à gauche, ont le sourire gris ou jaune lorsqu'ils entendent Hollande leur promettre l'interdiction du cumul des mandats nationaux et locaux. On lui faisait le procès d'intention de céder aux pressions de ses amis. Il n'en est rien. Il y aura une loi avant la fin du quinquennat. Amis cumulards, serrez les fesses !
Jeudi, Hollande promet une réforme des retraites pour le printemps, c'est-à-dire demain: « la question de l'équilibre de nos régimes d'ici à 2020 dont on nous expliquait, il y a à peine trois ans, qu'il était assuré » est posée. Le déficit prévu cette année devrait atteindre 20 milliards d'euros. La réforme Sarkozy de 2010 était injuste et inefficace.
Cette soudaine gravité du leadership batave a permis d'évacuer une fraction du vacarme ambiant. L'auto-dissolution du RUMP nous fait encore rire. Tout comme ces polémiques qui agitent encore le milieu culturel et quelques journalistes sur le cachet des stars, ou cette focalisation rituelle sur des faits divers telles l'expulsion d'une vieille dame de son établissement de retraite ou des factures de cantine impayées. Ce n'est pas du vacarme inutile, la récente livraison des chiffres de la délinquance. Nous avions enfin l'explication d'une anomalie statistique. La gendarmerie ne publiait pas tous les délits dans ses remontées d'informations ! La direction de la gendarmerie s'oblige à confirmer la chose: depuis 2002, des index « ne font partie d'aucun des quatre grands regroupements créés par l'ONDRP et utilisés pour évaluer officiellement la délinquance ». On aimerait le témoignage des Sarkozy, Guéant et Hortefeux, prédécesseurs de M. Valls au même poste...
Au Mali, le conflit se poursuit. L'offensive islamiste vers le Sud a été stoppée. La presse africaine applaudit. En France, les vraies critiques sont venues d'une fraction de la gauche: selon elle, il aurait fallu un vote des parlementaires, le sujet n'aurait pas suffisamment été débattu (faux), il y aurait des intérêts cachés (et alors ?), les alliés locaux n'ont pas les propres (on le sait), ce serait le retour de la Françafrique. Jamais la réponse à la question suivante n'était clairement assurée: assumerions-nous l'installation d'un Etat al-qaidesque à trois heures de vols de Paris ?
Une prise d'otages massive dans un site gazier algérien stupéfait jusqu'au Japon, au Royaume Uni et en Norvège. Ces pays ont des ressortissants sur place. Malgré l'importance de l'affaire, les autorités du pays ne font pas dans la demi-mesure. L'assaut fut lancé dans les 24 heures. Il y avait pourtant quelques centaines d'otages. L'opération dure, les morts s'accumulent. On mentionne une vingtaine de terroristes et autant d'otages tués dans les premières ving-quatre heures. Des médias se régalent. C'est plus fort que la neige en hiver ou le cachet des stars. Un éditorialiste du Figaro évoque un choc des civilisations. « C’est l’éternel et sanglant retour du djihad sur son sol natal » commente Martine Gozlan pour Marianne.  A l'UMP, certains grognent sans conviction. L'ancien parti sarkozyste est défait. Copé est inaudible et Fillon se tait.  Hollande redresse sa cote.
Chaque jour, Hollande tient désormais un conseil de guerre.
Forcément, ça déteint sur l'homme et la gouvernance.
A suivre...


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