Quelques thérapies pour tous
Le terme thérapie vient d’un mot grec qui signifie « soigner ». Or, si l’on a besoin d’être soigné, c’est d’abord qu’on est malade.
Normand Charest – chronique Valeurs de société – dossier Développement personnel
Le terme thérapie est surtout utilisé de nos jours dans le sens psychologique, c’est-à-dire pour soigner les maux de l’âme, qui sont nombreux dans un monde dont les carences ne sont pas que matérielles, mais avant tout intérieures.
Au cours du dernier siècle ou à peu près, on a beaucoup travaillé sur l’évolution matérielle. Par exemple, sur l’élimination des microbes, sur l’eau courante, les toilettes intérieures et l’hygiène, sur le chauffage, sur le confort en général. Mais on n’a pas beaucoup avancé en ce qui concerne le bien-être de l’âme et, dans certains cas, on a même régressé à cause d’un mode de vie déshumanisé, trop rapide et trop stressant.
Albrecht Dürer, «Melancholia I», 1514
On parle de thérapie par les animaux et c’est bien, mais les humains ont toujours retiré du bonheur et du réconfort de leur contact avec des animaux. Que ce soit avec leur bétail, leurs chevaux, leurs chiens, leurs chats ou leurs singes ; ou avec les animaux qu’ils chassaient et qu’ils aimaient en même temps. C’était là une chose naturelle. Et c’est surement parce que la chose n’est plus naturelle qu’on lui donne maintenant le nom plus recherché de « thérapie par les animaux ».
On pourrait dire la même chose de l’art-thérapie, probablement, puisque l’art était jadis un peu partout et à la portée de tous, sans qu’on en parle et sous forme d’artisanat. Puisque tout était artisanal : la fabrication d’une assiette, d’un vêtement, d’un jardin, d’une maison, l’écriture d’une lettre…
Alors que maintenant presque tous nos objets sont devenus impersonnels, parce qu’ils sont de fabrication industrielle. Tandis qu’à l’opposé, l’art est devenu quelque chose de précieux, souvent coupé du quotidien et réservé aux musées. L’art-thérapie, c’est un peu la réalisation que l’art peut être, à nouveau, à la portée de tous. Et qu’il nous fait du bien, tout simplement, sans aucune prétention.
Plus récemment, on a aussi parlé de bibliothérapie, ce qui signifie « thérapie par les livres ». Bien avant que les livres existent, les humains aimaient les histoires, dans lesquelles reposait beaucoup de sagesse orale. On aimait en raconter, et on aimait les écouter. On y revient, d’ailleurs, avec des conteurs comme Fred Pellerin. D’autre part, le rituel de la lecture faite aux enfants avant qu’ils ne s’endorment est encore bien actuel.
Et le livre est lui-même une histoire qui nous attend, un conteur discret qui peut nous parler à toute heure du jour ou de la nuit, dans la foule des transports publics, des cafés, dans la solitude de notre chambre ou même au fond des bois. Pour autant qu’on sache lire, bien sûr, car ce n’est pas là chose évidente, encore aujourd’hui.
À notre époque de haute technologie, le livre demeure la plus simple des machines, la plus performante, la plus durable et la plus recyclable.
NC
Au cinéma, on nous impose des images et des visages, des voix de comédiens, tandis que dans les livres, c’est nous qui inventons les personnages, qui leur donnons un visage. Ainsi, chacun est responsable de son propre casting.
Par le biais des personnages, l’auteur peut nous faire vivre des expériences qui nous enrichissent. On peut y être braves avec les braves, aventureux avec les aventuriers, patient avec les patients et émerveillés par tout ce qui nous est raconté. Cela peut nous aider dans notre traversée des usines, des bureaux et des métros un peu trop gris. Au moins au temps.
Dans la plupart des cas, nous sommes nous-mêmes nos propres thérapeutes. Nous trouvons nous-mêmes les livres, les musiques, les artistes qui nous font du bien.
Mais lire à haute voix pour les autres prend une autre dimension : cela se transforme en don, en un don de soi. Le lecteur à haute voix devient alors un peu thérapeute. La mère l’est spontanément pour ses enfants. On le fait aussi pour les malades, pour ceux qui ne voient plus, qui ne peuvent pas ou qui ne peuvent plus lire par eux-mêmes. Nous devenons pour eux la voix du livre. C’est là une belle façon d’aider.
Un bon livre est un jardin que l’on transporte avec soi.
- Proverbe arabe
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