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Par soupçon d’homophobie

Publié le 16 janvier 2013 par Tchekfou @Vivien_hoch
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les banderolles de la manif pour tous developpaient des slogans uniquement autour du droit de l’enfant à avoir un père et une mère.

Pour éviter toute accusation d’homophobie, seule la question du droit de l’enfant a été utilisée contre le projet de loi Taubira. Ce combat politique et médiatique contre le mariage pour tous ne doit pas pour autant faire oublier les raisons plus profondes qui le motivent.

Les opposants au mariage pour tous se sont fédérés autour d’une stratégie de communication qui traite exclusivement des conséquences de la loi Taubira sur la filiation en général et sur le bien-être de l’enfant. L’objectif de cet argumentaire soigneusement préparé est d’éviter tout autre argument qui pourrait être qualifié d’homophobe, l’homophobie étant lui-même un concept particulièrement flou, que l’on pourrait retourner contre nous. Jacques de Guillebon et Falk van Gaver, dans deux tribunes libres sur Nouvelles de France, Voie sans issue et Le bûcher des homophobes, en ont particulièrement fait les frais.

Pourtant, la première conséquence du mariage pour tous est bien la fin du mariage lui-même. Avant d’être un contrat encadré par la loi, le mariage est d’abord un mot prenant racine dans une tradition culturelle multimillénaire et mondiale. En France, ce mot a une signification bien précise liée à son éthymologie, différent de ses traductions en d’autres langues, comme le mot « wedding » en anglais. Pour s’assurer de sa bonne définition, il ne faut pas se tromper de dictionnaire, comme l’a pourtant fait dans Mots croisés lundi 14 janvier Henri Gaino, en utilisant le Robert et Bruno Gollnisch en utilisant le Larousse, quand il s’agissait de définir le terme « social ». En effet, on trouve déjà dans le micro Robert de 1998 une définition qui n’insiste pas sur l’altérité des sexes : « Union légitime de deux personnes, dans les conditions prévues par la loi ». Seul le dictionnaire académique a valeur légale et sa dernière version de 1992 est sans équivoque : « Union légitime d’un homme et d’une femme, formée par l’échange des consentements que recueille publiquement le représentant de l’autorité civile ». « On avait avili et corrompu le langage, pour avilir et corrompre plus sûrement les mœurs » (De l’usage et de l’abus de l’esprit philosophique durant le XVIIIe siècle), écrivait Jean-Etienne-Marie Portalis en évoquant la Révolution française.

Comme dans n’importe quelle entreprise, le meilleur moyen de s’investir un peu plus dans les projets est de créer des problèmes pour proposer des solutions. Dans le cas du mariage, il a suffi de dire qu’il était inégalitaire, pour proposer le mariage entre deux hommes ou entre deux femmes. En soi, c’est absurde, puisque le mariage étant prévu pour les couples hétérosexuels, le schéma d’inégalité ne peut exister qu’en ce qui les concerne, autrement dit, dans le cadre des personnes hétérosexuelles atteintes d’un handicap mental, des mineurs… Mais dès lors qu’il a fallu rappeler aux législateurs le sens du mot, celui-ci devenait soit inégalitaire, soit, pour les plus honnêtes, relatif et sujet à évolution. Ainsi, l’opinion médiatique faisait émerger une nouvelle définition : le mariage ne devenait que d’amour et, en cela, supposer qu’il ne pouvait pas être accessible aux personnes homosexuelles éveillait le soupçon d’homophobie. Le débat était clos. Il fallait trouver un autre argument.

La chance fut qu’en ces temps de vache maigre procréative, l’enfant était devenu roi et chéri. Aujourd’hui, la pédophilie est la plus immonde des perversités alors même qu’une sexualité débridée, échangiste et sadomasochiste relève d’un éveil sain de la curiosité. L’enfant abandonné fait pleurer ; un bébé est une denrée rare. Un ça suffit, pas plus de deux, ce serait abimer la femme et manquer à leur éducation. Réflexe psychologique inconscient, la culpabilité d’un malthusianisme paroxystique, l’enfant est devenu une obsession. L’homosexuel le revendique et c’est pourquoi il veut se marier. Mais une grande majorité s’y oppose et pour les même raisons : les antennes de sécurité se mettent en place, on ne touche pas aux enfants ! Chacun voit son enfant à sa porte, celui que l’on veut et celui que l’on a.

La parade du collectif contre le mariage pour tous était intelligente en ce sens qu’elle déviait le soupçon d’homophobie. En réalité, la question de l’enfant dans ce projet de loi est un épiphénomène. Plus simplement, il faut dire que la loi Taubira généralise les unions civiles en même temps qu’elle enterre le sens d’un mot vieux du douzième siècle.

Au XIIe siècle, il signifiait « donner en mariage », la femme se donnant à l’homme, dans ce sens seulement. L’étymologie du mot mariage est sujet à débat : il y a déjà un emprunt à matrimonium en même temps qu’à maritare, dérivant respectivement de mater, la mère, et de mas/maris, le mâle. Cette présence du masculin et du féminin est significative : le mariage est la forme juridique par laquelle la femme se prépare à devenir mère par sa rencontre avec un homme. Tout est dit. Seule l’union d’un homme et d’une femme est concernée, dans l’intention d’une procréation. Mais une chose – scandaleuse pour certains – doit être relevée : le mariage est de fait le point d’orgue du système patriarcal en occident. Il n’est donc pas étonnant que les féministes s’acharnent à le détruire. Les homosexuels dans cette affaire semblent être les idiots utiles du féminisme.

L’idée dans ce propos n’est pas de défendre le système patriarcal, mort de toute façon depuis au moins 50 ans, mais de constater la volonté permanente de déconstruire tout ce qui pourrait continuer à faire paraître, même symboliquement, une relation de dominant à dominé. Le mariage serait la perpétuation de la domination de l’homme sur la femme ; l’étendre aux couples du même sexe annihile toute notion de sexe, donc de supériorité de l’un sur l’autre. Le mariage pour tous met sur un pied d’égalité les rapports hommes/femmes, mais, en niant la complémentarité des deux sexes, c’est le mariage lui-même qui disparaît.

La théorie du « Gender » suivie de celle du « Queer » sont les deux théories importées des Etats-Unis, qui sont le fil inconscient de tous les argumentaires pro-mariage gay. La première théorie affirme que la domination de l’homme sur la femme est l’expression d’une construction sociale, religieuse et culturelle. Elle doit être déconstruite pour refonder une « identité flottante » de chaque individu. L’individu se construit culturellement indépendamment de la « nature » de son sexe à la naissance. Il n’y a donc pas d’identité sexuelle définitive. La deuxième théorie l’élargit pour fonder la dynamique d’une subversion radicale de toute institution humaine accusée de construire une domination. Le « Queer », c’est le « sans importance », le rejeté. La personne homosexuelle, « non conforme », va devenir l’auteur de cette subversion, en tant que victime de cette société aux mains des hétérosexuels fondant la norme de la sexualité majoritaire. L’idéologie victimaire fonde les nouveaux rapports sociaux.

Les conséquences de ces deux théories sont innombrables. Bien habillées par le vieil argumentaire jacobin, elles paraissent inoffensives. Mises à nu, dans leur intentionnalité, elles sont redoutables parce qu’aussi nihilistes que les doctrines totalitaires du XXe siècle.

La mise en place de cette loi révèle des intentions destructrices de la notion même d’autorité mis en branle depuis la fin du système patriarcal. Au fur et à mesure des acquis de la législation en faveur de la femme, l’homme a du redéfinir son autorité sans y parvenir au sein du couple, de la famille et de la société. La femme émancipée n’est pas parvenue à se substituer à cette autorité, qui aurait alors permis la naissance d’un système matriarcal, à cause… d’elles-mêmes. En effet – cela parcourt l’œuvre de Michel Houellebecq – la femme réclame l’émancipation tout en exigeant à l’homme nouvellement soumis de jouer aux dominateurs. Déconstruction puis reconstruction artificielle du vieux schéma dominant/dominé. Parfaite confusion de l’autorité accentuée par la confusion des genres. L’idéologie victimaire du « Queer » demande de son côté à l’autorité de se repentir et insidieusement de détruire les socles sur lesquels cette autorité repose.

Pierre Mayrant


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