C'était le premier spectacle de Bartabas auquel j'assistais et il m'a éblouie. Et pourtant j'ai eu d'emblée le sentiment d'une forme de familiarité avec une scénographie qui pourrait surprendre un public non averti.
Venir au Théâtre Equestre Zingaro obéit à un rituel
Le public antonien a beaucoup de chance aussi parce qu'il avait pu profiter en juin 2009 du spectacle de Baro d'Evel, intitulé le Sort du dedans. On était assis sur des gradins, autour de la piste et on entendait le cheval cavaler derrière et autour de nous au son d'une clochette. En décembre de la même année c'était un superbe travail de dressage avec InSTALLation. Les chevaux blancs "faisaient le mort" sans broncher de longues minutes dans une presque obscurité. L'année suivante nous étions rassemblés autour d'un feu de camp pour Obludarium que les Frères Forman avaient conçu entre cabaret, danse, cirque et marionnettes. Quant à voir des dindons sur scène, celui du cirque Rasposo ne passait pas inaperçu. Il donnait son titre au spectacle, le Chant du Dindon.
De ce fait j'étais très préparée à apprécier Calacas. Je ne me suis même pas étonnée de voir les chevaux galoper sur la scène supérieure. Cela me parut naturel alors que le dispositif était nouveau au Théâtre Equestre Zingaro.
Vous aurez compris que j'ai adoré. Parce que si la mort est le thème principal il est traité de manière assez joyeuse. Avec un juste dosage de dérision, de religieux et de sacré, et quelques évocations de l'au-delà.
Une voix râpeuse souhaite la bienvenue au Zingaro. Vous allez voir le spectacle, si çà vous plait c'est pas mal, si çà vous plait c'est bien, si ça vous plait pas c'est le même prix ! On en rit, devinant qu'on ne sera pas dans le troisième cas de figure.
Avec la lumière, on découvrira des dindons qui ressusciteront pour moi un souvenir très vif, celui de Kusturica et du Temps des Gitans. Des clochettes, une procession, un cheval, des chevaux. Mais combien sont-ils s'étonne un enfant devant moi. Ah ... ils sont pleins ... Une incantation s'élève dans une langue qui me semble inconnue.
Deux hommes orchestres prennent le relai, dansant et courant comme des chevaux, tournoyant en une sorte de valse ou exécutant une danse qui prend des allures de claquettes, alors que notre coeur absorbe les battements de leurs tambours. Les Dupont, en défi permanent, se répondent et s'entrainent.
On pensera plus tard à la danse macabre du Moyen-Age, et surtout aux fêtes qui se pratiquent au Mexique où les enfants mangent des sucreries en forme de squelette, alors que les adultes vont boire un bon coup dans les cimetières.
Il faut vivre Calacas.
L'apparition du cheval est parfois théâtralisée par la lumière, le maquillage (parfaitement), le costume (aussi ... avec une robe aux allures de squelette), ses caractéristiques physiques (un dalmatien).
Le nouvel espace scénique sert la volonté de Bartabas de nous offrir un spectacle entre ciel et terre. Comme toutes les autres créations de Zingaro il a été écrit pour des gens et des chevaux qui auront disparu dans quelques années.
Il ne faut donc pas oublier que le spectacle vivant est un art éphémère malgré une éventuelle et faible trace vidéo. Il est donc urgent de se rendre au Fort d'Aubervilliers pour le vivre. Ne me dites pas que c'est un peu loin : vous n'aurez qu'une centaine de mètres à peine à faire depuis la sortie du métro (choisir "avenue Jean Jaurès").
Puis en tournée à Mulhouse du 12 au 30 avril 2013 au Parc des expositions
A Genève du 29 mai au 7 juillet 2013 sous le Chapiteau Zingaro - Plaine de Plainpalais
A Bègles du 23 aout au 15 septembre 2013 également sous Chapiteau Zingaro
La photo de Bartabas est signée Philippe Baumann.