L'actualité d'un des principaux acteurs de la vague d'il y a 18 mois, DCM Capital, nous donne aujourd'hui l'occasion de faire le point sur le sujet.
Commençons par un petit rappel historique. Tout a commencé, en gros, quand une équipe de chercheurs "démontrait", en 2010, que les sentiments exprimés par les internautes sur Twitter permettaient de "prédire" les mouvements des cours de bourse avec un taux de succès significatif (plus de 80% pour l'indice Dow Jones, 3 jours à l'avance). En synthèse, la technique utilisée consiste à extraire les "tweets" en rapport avec des actions cotées, en extraire une "humeur" (acheteur, vendeur ou neutre) et en déduire, statistiquement, une tendance.
Séduite par ces résultats, la jeune société DCM Capital a acquis une licence sur les algorithmes des universitaires et a créé un "hedge fund" dont la stratégie se basait sur le sentiment des "twittos". Depuis, selon Finextra, le fond a été discrètement fermé, bien que sa performance n'ait pas été honteuse : avec une modeste progression de presque 2%, il a dépassé le marché et la moyenne de ses concurrents. La société souhaite maintenant passer à un autre modèle opérationnel, qui se traduit par le lancement d'une nouvelle plate-forme de trading en ligne, DCM Dealer.
Celle-ci est tout à fait classique dans la plupart de ses fonctions : fil d'information, alertes en temps réel, suivi de portefeuilles, graphiques avancés, passage d'ordres... Sa principale originalité est de mettre à disposition des traders son dispositif d'analyse de sentiments. Fourni initialement sous forme d'indicateur en temps réel (le "Sentiball™"), il devrait être prochainement complété d'une vue historique des évolutions d'humeur des internautes.
Autre axe de développement pour la startup, la mise à disposition de tiers de sa technologie, par l'intermédiaire d'APIs ("interfaces de programmation applicative"), est également envisagée. Avec ses 350 millions de tweets analysés chaque jour, produisant un "sentiment" sur plus de 10 000 indices, valeurs, devises et autres, les informations produites peuvent en effet intéresser d'autres spécialistes du trading, des chercheurs ou même des organismes publics.
Le choix initial de DCM de lancer un fond basé sur ses algorithmes avait l'ambition de démontrer concrètement la valeur, supposée immense, de l'analyse de sentiments pour les traders. Il faut reconnaître que les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes, même s'ils ne constituent pas un échec dans l'absolu. Le contexte difficile pour tous les hedge funds est probablement aussi en cause mais ces conditions font partie intégrante de l'expérience. Le retour à un modèle beaucoup plus classique, de source d'information parmi d'autres, marque donc probablement la fin d'une euphorie excessive.
Ce constat ne doit cependant pas laisser penser que l'analyse de sentiments n'a aucun intérêt. D'une part, malgré ses défauts et limitations, elle peut compléter et enrichir d'autres méthodes de détection de tendances (comme dans la nouvelle offre de DCM ou, précédemment, dans celle de Bloomberg) et, d'autre part, elle est applicable à bien d'autres domaines que le trading. Il suffit pour s'en convaincre de voir, dans un secteur totalement différent, les prédictions de mode d'IBM...