Des "Instants Critiques" enchanteurs à la Pépinière...

Publié le 12 janvier 2013 par Fousdetheatre.com @FousdeTheatre

La carte blanche de six mois que la Pépinière Théâtre eut la bonne idée de proposer à François Morel démarre merveilleusement avec la reprise de ces "Instants Critiques" créés en province il y a un an et demi. L'artiste met ici en scène ses anciens comparses des Deschiens, Olivier Saladin et Olivier Broche, qui donnent à entendre les échanges, les joutes oratoires passionnées et souvent impayables des journalistes cinéma Georges Charensol et Jean-Louis Bory survenues au cours des enregistrements du mythique "Masque et la Plume". Un bonheur absolu à plus d'un titre.

D'abord parce que le spectacle nous offre un voyage fabuleux et éclectique au coeur du septième art des années 60-70, nous baladant de Godard à Oury, de Pasolini à Demy, de Lautner à Truffaut, de Rohmer à Bergman, de Coppola à Oshima, permettant une gourmande révision de longs métrages inscrits dans la mémoire collective. 

Ensuite parce que ces conversations animées, d'une grande théâtralité, aux arguments tour à tour convaincants, grandiloquents ou d'une mauvaise foi totale, se révèlent un malicieux et truculent "hommage" au métier de critique, et par ricochet une belle incitation au débat. Personne n'éprouvant la même émotion devant une oeuvre d'art, la multiplicité et la confrontation de nos subjectivités nous enrichissent.

Parce que les deux acteurs sont exceptionnels, dévoilant deux faux adversaires, véritablement complices. Le bougonnant Saladin (Charensol) nous réjouit de ses coups de gueule, de ses envolées outrancières assez conservatrices (artistiquement parlant), tandis que Broche (Bory), en amoureux d'un cinéma moins spectaculaire, porteur de messages, adepte de la Nouvelle Vague, compose un intello frêle et un brin maniéré aux démonstrations quelquefois capilotractées tout aussi savoureux. Nous ne saurons dire si les copies sont fidèles aux originaux (nous n'étions à l'époque pas en âge de les entendre), mais ce duo clownesque fonctionne formidablement.

Parce que la mise en scène, enfin, est une réussite. Truffée de surprises, tendre, poétique. François Morel a choisi d'éloigner ces personnages des ondes radiophoniques pour les asseoir dans un vieux cinéma de quartier comme nous n'en trouvons plus, où l'on vend des esquimaux, et dans lequel une charmante ouvreuse, pianiste et chanteuse, assure quelques intermèdes musicaux inspirés des bandes originales des films évoqués. Entre deux empoignades de Guignol et Gnafron, Elle chante "La ligne de chance" de "Pierrot le Fou". A trois ils se lancent dans la chorégraphie de "Bande à Part". Un peu plus tard Broche et Saladin tenteront une version très personnelle des "Parapluies de Cherbourg"... Irrésistible. 

Ne passez pas à côté de ce fort beau moment.

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