La France est un pays viscéralement conservateur et psychanalytiquement épuisant. C’est pour cette raison que j’ai fais mien du titre du livre de Sigmund Freud paru en 1913 pour intituler ce post.
En effet, cette fin de semaine a vu deux événements qui vont peut-être nous sortir de notre enlisement maladif (psychotique ?) a refusé le monde qui change autour de nous, à s’enferrer dans un refus de la globalisation même heureuse, à rejeter sur les autres notre incapacité à sortir de la nasse délétère du non réformisme. Le peuple français s’accroche à des totems poussiéreux comme des naufragés à une barge qui prend l’eau de toute part. Le peuple français se drape dans des tabous hors du temps en espérant que ce voile mité suffira à le protéger de la nudité de ses propres terreurs.
Dimanche, 350.000, 800.000 1 million de personnes (encore un totem débile sur le nombre élastique de participants à des manifs !) ont manifesté contre le mariage gay. Selon eux, institution symbolique (mais ringarde), le mariage devrait être réservé à l’union d’un homme et d’une femme. Mais dans un monde où la famille nucléaire a explosé pour agréger des individus qui recomposent leurs familiarités plus par affinités que par obligation légale, continuer à sacraliser le mariage ne va pas dans le sens de l’histoire. L’évolution sociétale tend vers des institutions qui se désagrègent pour inventer d’autres lois qui restent encore à écrire. En cela, les gays ne sont pas très inventifs, ils devraient imaginer une nouvelle conjugalité plutôt que de singer le « mariage », totem des traditionnalistes qui se cramponnent à leurs valeurs faute de mieux.
Vendredi, les syndicats (enfin, les moins réactionnaires d’entres eux) et le patronat ont signé un accord « presque historique » (sic !) pour réformer un marché du travail paralysé par des lois totémiques et pléthoriques avec pour conséquence un taux de chômage qui, depuis trois décennies, ne descend jamais sous la barre des 8% et qui en ce moment explose. Ce qui est intéressant dans cet accord —qui demeure très technique et doit être validé par le parlement (ce qui n’est pas gagné)—, c’est qu’enfin on parle de « flexibilité », terme tabou où un emploi doit être au contraire rigidifié au seul profit du salarié à un point tel que le licencier, et ce quel que soit le motif, est un parcours du combattant. Dans les Echos de ce matin, l’éditorialiste Dominique Seux écrit : « L’ironie est qu’il appartient à la gauche d’avaliser le mot même de flexibilité qu’elle rangeait dans la case de l’ultralibéralisme il y a un an. Mais, après tout, elle récusait également tout problème de coût du travail et toute idée de hausse de la TVA ».
Si cette gauche au pouvoir fait tomber les totems et les tabous qui paralysent ce pays et l’empêche de s’inventer un avenir, peut-être que l’année 2013 le verra quitter le divan du psychanalyste… Peut-être, rêvons…