Remontons dans le temps si vous le voulez bien jusqu’aux années 60, époque bénie où les héroïnes gothiques et autres Scare Queens étaient adulées, lorsque les films de la Hammer étaient en plein boom et des actrices comme Barbara Shelley (Dracula: Prince of Darkness, en 1965) ou Jennifer Daniel (The Kiss of the Vampire en 1963) traumatisaient (dans le bon sens du terme) bon nombre de spectateurs adeptes de films d’horreur. Il y avait en effet à cette période un terreau propice à la création du personnage Vampirella puisqu’également dans le domaine de la télévision, ceux de Lily Munster (héroïne de la sitcom The Munsters sur CBS) et Morticia Adams (la cultissime et mortuaire matriarche de la Famille Adams) étaient devenues de véritables références dans le genre.
Mais le cinéma et la télévision avaient leurs limites en matière d’imagerie plus ou moins suggestive, c’est ainsi que Forrest J Ackerman, grand spécialiste de films et de littérature de genre et de science fiction a la bonne idée de proposer un nouveau personnage à Warren Publishing, la maison d’édition de James Warren, déjà propriétaire des séries Creepy et Eerie deux publications grand format qui n’avaient pas besoin de l’aval du fameux Comic Code Authority.
Nous sommes donc en Août 1969, Vampi est annoncée au dos de Creepy #28, lorsqu’Uncle Creepy et Cousin Eerie les deux narrateurs de la série teasent son arrivée dans une mise en scène des plus dramatiques : « Elle arrive ! » Eerie menaçant de crier si son oncle la laisse passer la porte. Le numéro suivant inclura également un encart publicitaire avec cette fois-ci une illustration de Frank Frazetta (qui sera également responsable de bon nombres de couvertures du futur magazine), c’est ce même mois de Septembre que sort Vampirella #1 dont la couverture également dessinée par le maître va faire sensation.
Et l’intérieur de ce premier numéro de Vampirella n’est pas en reste, renfermant sept histoires indépendantes illustrées par Neal Adams, Ernie Colon, Reed Crandall, Billy Graham, Mike Royer, Tom Sutton, et Tonu Tallarico.
On apprend également que la Bat Woman vit sur Drakulon une planète futuriste où ses habitants (capables de voler grâce à leurs ailes de chauve souris) se nourrissent de ses ressources naturelles : des rivières de sang, jusqu’à ce que celles-ci finissent par se tarir. Au même moment un vaisseau spatial terrien s’écrase, Vampirella part en reconnaissance et tombe sur deux pilotes qui, effrayés par son apparence de chauve souris géante vont lui tirer dessus. Une bien mauvaise idée, et une opportunité pour Vampi de s’apercevoir que les êtres humains sont absolument délicieux. Le choix de venir sur Terre, ce nouvel El Dorado sanguin est très vite pris, la belle ayant de quoi se nourrir le long du trajet avec le reste de l’équipage encore en état d’hibernation.
Les autres histoires qui constituent le magazine vont toutes être présentées par la vampire qui jouera le rôle d’hôtesse, conformément à ce genre de publication.
Dans Vampirella #2, l’héroïne enfin arrivée sur Terre va participer à un concours de beauté pour monstres, on pourra noter plusieurs clin d’oeil comme la présence du magazine Monsterella, véritable publication édité par Warren à l’époque, ainsi qu’un caméo de Warren et Ackerman en tant que membre du jury.
Malgré le fait que Vampi n’apparaisse pas dans le troisième numéro (sauf en tant qu’hôtesse, ce numéro sera d’ailleurs publié en un nombre inférieur d’exemplaires que les autres, faisant de lui un numéro rare et très recherché par les collectionneurs), le magazine continue d’avoir un franc succès autant apprécié par les adultes que les adolescents aux parents peu regardant sur leurs lectures.
Il faudra attendre Vampirella #8 pour que l’héroïne puisse continuer ses aventures, et c’est à ce moment là que l’éditeur Archie Goodwin prend en main de destin de la vampire. C’est lui en effet qui met en place la véritable trame scénaristique de l’héroïne, l’entoure de personnages de soutien, et lui construit sa mythologie dans l’arc Vampirella vs. the Cult of Chaos, écrit par Goodwin et dessiné par Tom Sutton et Jose Gonzalez.
Cherchant à protéger les humains des manipulations d’une confrérie occulte, Vampirella qui arrive à contenir sa soif grâce à un serum est poursuivie par un duo de chasseurs de vampires, l’aveugle Conrad VanHelsing et son fils Adam dont elle va petit à petit tomber amoureuse.
Goodwin va réussir à combiner humour, horreur, et influences issues des films de série B et de science-fiction où lycanthropes, zombies, démons aquatiques et même le Comte Dracula en personne vont croiser le fer avec la belle.
D’autres artistes hispaniques comme Gonzalo Mayo, José Ortiz, Rudy Nebres, Pablo Marcos et Leopold Sanchez seront également embauchés et alterneront avec Gonzalez jusqu’à ce qu’il quitte le titre au #112, lorsque l’aventure chez Warren Publishing s’arrête en Mars 1983.
Après que l’éditeur ai fait faillite, Harris Publications acquiert les droits de l’héroïne très rapidement mais ne publiera la suite de ses aventures qu’à partir de 1991 (vraisemblablement à cause d’une action en justice menée par Warren) jusqu’en 2007, si l’on ne tient pas compte du Vampirella # 113, prolongeant la série originale, et contenant des histoires réimprimées en 1988.
Le 17 Mars 2010, l’éditeur Dynamite annonce avoir acquis les droits d’Harris et décide de redémarrer la série au mois de novembre de la même année, tout en rééditant les numéros historiques en Hardcover, pour le plus grand bonheur des fans.
Après quasiment 45 ans de carrière, Vampirella reste l’une des icônes de l’horreur les plus populaires, dont les fans sont légion et qui surtout continue à nous faire fantasmer. L’éditeur actuel perpétue la tradition en rendant hommage régulièrement à cette héroïne, et cela n’est pas près de s’arrêter.