Magazine Culture

Avec les yakuzas

Publié le 06 avril 2008 par Mgallot

c4b25aa7577f28591e2843f05be5b151.jpgTard dans la nuit de samedi à dimanche, Arte a diffusé, en catimini, le nouveau film de Jean-Pierre Limosin, "Young Yakusa", dont la sortie en salles est prévue mercredi prochain (9 avril).

Je n'avais pas entendu parler de ce film avant, bien qu'il ait été projeté dans la sélection officielle hors compétition au festival de Cannes 2007, mais sur le seul nom de son réalisateur, je l'ai enregistré (pour mémoire, Jean-Pierre Limosin a notamment réalisé plusieurs - bons! - films de la série "cinéma de notre temps", et plus récemment des films autour du Japon).

Cette fois, le réalisateur nous plonge dans un milieu secret, celui des yakuzas (la mafia japonaise). Non pas pour faire un film noir à la manière de Takeshi Kitano (auquel JP Limosin a consacré un autre film), mais pour nous montrer ce que d'habitude on ne voit jamais au cinéma: l'ordinaire de la vie d'un yakuza, nettement moins spectaculaire que dans les thrillers, mais finalement bien plus surprenante puisqu'elle consiste principalement, pour les jeunes recrues, à faire le ménage, la cuisine et à servir le thé au chef en respectant scrupuleusement un modus operandi appris au geste près.

Qui l'eut cru? C'est le chef d'une bande de yakuzas lui-même qui a demandé à JP Limosin de réaliser ce film, lequel a accepté avec un contrat clair: ne filmer aucune activité illégale.

"Young Yakuza", c'est un peu la partie immergée de l'iceberg. 

Le film suit un jeune délinquant dont la mère ne sait plus quoi faire et qui est confié "en apprentissage" au chef du clan. L'expérience du jeune Noaki, commence par l'acquisition des règles nombreuses et stricte

33171e7aaa9059aad89badeff1488201.jpg
s qui régissent le clan: le respect de la hiérarchie est sévère, jusque dans les plus petits détails (par exemple: tel verre pour le chef, tel verre pour les yakuzas, tel verre pour les invités). Dans ce clan, celui qui part et trahit la cause n'est plus condamné à se voir couper le petit doigt, comme autrefois, mais il est tenu au silence le plus complet sur son passé.

La société japonaise a changé, et ce sont ses états d'âme que cherche à faire passer le chef de clan. Le temps est loin, où les yakuzas jouissaient d'une certaine tolérance des autorités et du respect de la population. Le temps est loin où les jeunes se soumettaient corps et âme aux contraintes. Aujourd'hui, comment attirer les jeunes dans un milieu où ils ne recevront pas de gratification immédiate en échange de leur soumission? se demande-t-il. Ils ont besoin, selon lui, "de rêves et d'espoir", toutes choses que l'organisation traditionnelle d'un clan yakuza peine à leur apporter, malgré la volonté d'adaptation du chef.

"Young Yakuza" ou le blues du gangter...

f781d9fc9d44f15f2c7b22f375609442.jpg
Le film mérite d'être vu sur grand écran. Les images sont soignées, elles ont été tournées sur pellicule, ce qui est devenu assez rare pour une documentaire. Cette manière de tourner n'est pas sans influence sur le contenu des images, car une caméra traditionnelle ne se manie pas comme une caméra numérique et oblige à limiter la longueur de chaque prise de vue. Travailler sur pellicule colle parfaitement bien au milieu yakuza, puisque cela oblige à beaucoup de rigueur dans le tournage, jusqu'à employer le clap. Le résultat est réussi: chaque plan est réfléchi, le cadre est posé presque comme en fiction.

La musique d'une jeune groupe de rap japonais accompagne l'initiation de Noaki, et crie le malaise d'une jeunesse en perte de repères, qui ne semble pas étranger à la décomposition lente des clans mafieux. C'est à n'en pas douter de la société japonaise dans son ensemble que parle "Young Yakuza", celle d'un ordre séculaire en voie d'effondrement sous la force croissante des aspirations individuelles.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Mgallot 60 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine