Portrait du galeriste Thaddaeus Ropac: l'art en mode majeur

Publié le 13 janvier 2013 par Alexia Guggémos @alexia_guggemos

"Je suis un Européen convaincu, et j'aime Paris!", commente le galeriste autrichien Thaddaeus Ropac qui a reçu en ce début 2013 la Légion d'honneur sur une proposition du Ministère des Affaires étrangères.

Cette distinction vient récompenser son esprit d'entreprise et son audace: le pari fou d'ouvrir une deuxième galerie française à Pantin (Seine-Saint-Denis). En juillet 2013, il fêtera les 30 ans de sa galerie de Salzbourg en Autriche.

Retour sur un parcours exemplaire:

Créer un espace sur-mesure pour les artistes hors des contraintes spatiales habituelles...Après deux ans de recherche, son choix s'est porté sur une ancienne chaudronnerie du début du XXème siècle à Pantin. 4.7000 m² dont 2.000 m² d'espaces d'exposition, non loin du métro "Église de Pantin".

Briques rouges, pavés clairs, de hautes nefs classées, quatre bâtiments dont un espace dédié au" Performing Art". Depuis son inauguration, le 13 octobre dernier, le lieu ne désemplit pas. Plus de 10.000 visiteurs en deux mois et demi. La programmation y est aussi pour quelque chose: Anselm Kiefer et Joseph Beuys, deux artistes phares de la galerie Ropac. "Pantin nous donne un élan formidable!", confie t-il.

Dans le bureau de Ropac, rue Debelleyme dans le 3ème arrondissement de Paris, les œuvres de l'Allemand Joseph Beuys occupent tous les murs et même une vitrine au centre."Beuys, dans mon bureau? C'est un hasard!", explique t-il en souriant. Posé contre le mur, un dessin récemment acheté dans une vente à Chicago...Car depuis sa rencontre avec Joseph Beuys en 1981, Ropac a trouvé sa voie. Rien ne le prédestinait au métier de marchand d'art: un père, expert en cuir, une enfance dans le sud de l'Autriche, loin de l'univers des galeries. Le déclic est né à Vienne. Son professeur d'arts plastiques organise une visite au musée d'art moderne. Or celui-ci déteste l'art contemporain. Ropac, lui, veut comprendre.

Premier choc artistique: une gouttière déployée sur le sol, une corde, une table, de l'eau gouttant du plafond... l'installation s'appelle "Wet Cloth", elle est signée de Joseph Beuys! " Aux Beaux-Arts de Düsseldorf, quand Beuys, qui y enseignait, a proclamé "Tout le monde est artiste!" cela fit scandale. On le menaça de le licencier s'il n'arrêtait pas...Il n'a pas cessé, et il est parti. Cela a constitué sa légende: "une phrase qui résonne en moi comme un manifeste", commente Thaddaeus Ropac. En 1982, Beuys prépare ses "Monuments au cerf" pour l'exposition"Zeitgest" de Norman Rosenthal à Berlin. A 22 ans, Ropac devient l'un de ses assistants. (Photo: Joseph Beuys. Seven Thousand Oaks. Documenta 7, Kassel. Photos by Guenter Beer, 1982)

La chance de ce galeriste hors pair: avoir été introduit par Beuys auprès de Warhol à New-York. La confiance entre les deux hommes est alors immédiate. Warhol lui présente Basquiat, "un artiste de ma génération. Il m'a tout de suite confié des dessins à exposer, sans contrat, sans vraiment me connaître". Par intuition... Première exposition à Lienz, en Autriche. Très vite, Thaddaeus Ropac, qui n'a alors que 23 ans, ouvre un nouvel espace à Salzbourg. Robert Mapplethorp, Keith Haring, Georg Baselitz...viennent bientôt le rejoindre. Ropac se concentre sur l'Europe, artistes et marché. Aux États-Unis, en Chine, il organise des expositions privées. Son équipe, constituée de 60 personnes, est sur tous les fronts tant l'agenda est chargé. Exemple: trois expos pour le seul sculpteur Tony Cragg en 2012 à Dallas, Berlin et Shanghaï.

"En 2013, l'excellence, avant tout!"
Ensemble Intercontemporainconcert public exceptionnel le 13 février à 20hDisaster""David Salle/ Francis Picabia"

> Le site de la galerie Ropac www.ropac.net

Portrait chinois de Thaddeaus Ropac
Si vous étiez...
Un readymade? Un chevalet.
Un fragment? Une partition.
Une note? Une gamme majeure.
Une matière? Le feutre. Beuys, bien sûr...
Un signe? Le vert. Aller de l'avant.
Un duo? Intérieur/ extérieur. Ce que nous avons en nous, et ce que nous exprimons. Un thème cher aux artistes.
Un acte de résistance? Contre le racisme. C'est le combat d'Anselm Kiefer. C'est aussi le mien.
Une gourmandise? (rires) Voici une problématique bien française ! Le pain, pour la culture.