Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys (...)
Ainsi commence le beau poème qu’Arthur Rimbaud consacre à la malheureuse Ophélia, amante du mélancolique Hamlet.
« O pâle Ophélia, belle comme la neige!
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emportée!
Et dans sa tragédie, l’auteur de « Roméo et Juliette » auquel Rimbaud fait ici allusion, rapporte également les tourments amoureux de deux autres cœurs purs épris d’absolu : Hamlet et Ophélie.
« Un chant mystérieux tombe des astres d'or (...)
-- Et le poète dit qu'aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis,
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys ».
« Sur l’oreiller blanc des abysses », Ophélia inspire aujourd’hui Nolwenn Leroy... Une Ophélia légèrement différente de son modèle, une Ophélia plus marine et plus « sirène » que son modèle. Les vagues de l’océan ont fait ployer les saules, et l’eau cristalline se tord désormais sous le lichen amer... Dans un autre de ses poèmes, Rimbaud dit qu’il a descendu lui aussi ses « fleuves impassibles » avant de se « baigner dans le poème de la mer ».
« Je descends lentement,
Mon corps enfin se repose,
Les cheveux longs dans le courant
Ondulent en caressant (...)
Je n’entends ni ne respire,
Les vagues se retirent,
Sur l’oreiller blanc des abysses,
Je peux me laisser partir...
Ne me retiens pas,
Même si les bras froids du tendre océan te saisissent, englacent ton cœur,
Tu me rejoindras,
Ne me sauve pas,
Coule avec moi,
Ne me retiens pas »
Au moment où le « bateau ivre » de Nolwenn disparaît sous le flot, une voix monte, une voix transparente et fraîche où « nage Ophélia »... Le visage lumineux de la sirène est à la proue, et c’est peut-être le visage de Nolwenn l’interprète de « ce chant mystérieux qui tombe des astres ».
D’un coquillage blanc,
On renaîtra émerveillé dans la lumière,
On ouvrira nos paupières closes,
Devant la beauté d’une autre mer.