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Le réveil des Français dans la nuit de la liberté

Publié le 12 janvier 2013 par Copeau @Contrepoints

Les Français, de plus en plus conscients de l'insoutenable lourdeur de la dette, ne veulent pas d'austérité, encore moins pour eux. En tirant à eux une couverture qui rétrécit de jour en jour, ils risquent un réveil brutal après une mauvaise nuit. Ils peuvent choisir de se réveiller, ou de laisser la nuit de la liberté les envelopper totalement.

Par Baptiste Créteur.
Les problèmes de la France, à force d'être exposés sur Contrepoints et ailleurs, n'ont plus à être présentés. Dette, manque de compétitivité, chômage, déficit de la balance commerciale, départs massifs des plus fortunés, des plus entreprenants et des plus ambitieux ne sont que quelques exemples des conséquences d'un pouvoir qui ne sait plus trop quels sont ses absolus, ses valeurs et ses objectifs, et d'un État qui ne se lasse pas d'intervenir pour corriger ses erreurs passées par des erreurs plus lourdes.

Alors que les ressources que l’État pensait illimitées lui sont de plus en plus inaccessibles, il se voit obligé de rogner un peu certains budgets, provoquant la grogne de ceux qui bénéficiaient de ses largesses. À peine arrivés au pouvoir, certains ministres se montrent particulièrement déçus de ne pas pouvoir s'amuser autant qu'ils le voulaient avec leurs nouveaux jouets. Alors qu'ils bénéficiaient auparavant de cette manne tombée du ciel sans nuages de la Sécurité Sociale, les chauffeurs de taxis manifestent pour être certains de continuer à bénéficier d'une clientèle nombreuse et peu regardante puisque ses trajets étaient, pour tout ou partie, financés par la collectivité. Ces économies de façade, bien en-deçà de celles qu'il faudrait mener pour espérer résoudre la situation sans crise majeure, ne sont pas acceptées par ceux qu'elles affectent.

Du même côté de la balance, celui qui se fait financer par l'autre, se trouvent toujours des dépenses faramineuses et plus ou moins justifiées. Les élus continuent à présenter leurs vœux et à communiquer à grands frais, à financer des déplacements difficilement justifiables vers des stations balnéaires – en jet privé plutôt qu'en train qui plus est – et moult avantages douteux, à subventionner leurs amis et à ne pas remettre en cause des choix toujours plus couteux, le tout aux frais du contribuable.

De l'autre côté de la balance, les contribuables commencent à n'en plus pouvoir. De moins en moins nombreux, suite au départ d'une partie d'entre eux et à l'appauvrissement d'une autre partie, et de moins en moins riches grâce aux mesures gouvernementales rendant de moins en moins accessibles l'enrichissement et la création de richesse, ils sentent de plus en plus lourdement le poids de l’État sur leurs épaules, mais trouvent peu de voix pour pour leur expliquer la situation et pour se faire entendre. En France, payer des impôts serait une chance en plus d'un devoir, et ils devraient s'estimer heureux de ne pas faire partie du groupe malheureux de ceux qu'ils financent.

Ils entendent en revanche de plus en plus de discours leur expliquant que l'emploi, l'environnement, le service public, la solidarité, l'avenir du pays et du monde sont menacés par un libéralisme toujours plus vorace. Leur demandant de supporter quelques sacrifices de plus, le temps que la situation s'améliore sans qu'on sache, même vaguement, quand ce phénomène toujours plus inespéré surviendra – ou en ne le sachant que trop bien. Leur demandant de faire confiance au gouvernement et de lui accorder un peu plus de pouvoir, de le laisser enfreindre un peu plus quelques principes qu'on pensait fondateurs de notre nation et de tout État de droit mais qui seraient aujourd'hui devenus trop contraignants et nous empêcheraient de sortie de l'ornière. Leur demandant de participer activement même à la violation de ces principes. Leur demandant de rester de leur plein gré, faute de quoi il faudra les y contraindre. Leur demandant d'attendre que la situation s'améliore pour renouer avec assez de liberté pour exprimer leur créativité et leur talent, pour réaliser leur potentiel, pour s'épanouir, pour s'accomplir. Leur demandant de vivre dans des conditions dans lesquelles on ne peut pas être pleinement vivant, mais de continuer à vivre assez pour que d'autres puissent continuer à faire semblant de vivre – à leurs dépens. On leur demande tout cela, sans rien leur offrir d'autre que la promesse qu'on leur en demandera moins par la suite ; en attendant que la situation s'améliore pour tous, ce serait à eux de faire tous les efforts nécessaires pour que la situation ne se dégrade pas trop pour les autres.

On leur demande en réalité de faire ces sacrifices dans l'attente d'un hypothétique changement, tout à travaillant à ce que ce changement n'arrive pas. Ce changement – promis hier, attendu aujourd'hui, craint demain – c'est l'application plus stricte des principes qui mènent notre pays à la ruine, ou plutôt de leur absence. La crise que nous traversons n'est pas en premier lieu une crise de la dette, une crise de l’État, une crise économique, financière ou sociale, c'est une crise des valeurs.

Qui, aujourd'hui, est capable de dire avec conviction qu'une décision gouvernementale est bonne ou mauvaise, sur la base non de son succès attendu, non de son bénéficiaire annoncé, mais sur celle de la décision en soi ? Pour pouvoir le dire, il faut une éthique, des principes selon lesquels juger une chose pour ce qu'elle est, ce que la morale dite altruiste n'est pas.

Une éthique permet de juger qu'une chose est bien ou mal selon sa nature propre, non selon son bénéficiaire. La "morale altruiste" ne condamne pas le vol en soi ; elle condamne le vol pour soi, mais tolère le vol pour autrui, et le glorifie si on vole les riches et puissants pour nourrir les pauvres. Les hommes politiques français se voient en Robin des Bois des temps modernes, faisant preuve d'assez de courage pour spolier des citoyens désarmés de la richesse qu'ils créent et de discernement pour s'arroger le droit de le faire autant qu'ils le souhaitent et d'administrer comme bon leur semble l'impressionnant butin ainsi collecté – mais toutefois pas suffisant pour assouvir leur soif de redistribution.

Il ne s'agit pas de dire que l'altruisme est fondamentalement mauvais ; il s'agit de dire que tout acte ne doit pas être condamné pour ne pas être un acte altruiste, et qu'il ne faut pas imposer à tous d'agir uniquement par altruisme. La raison première de toute création et de tout effort n'est pas de payer des impôts sur les fruits de ce travail. La raison d'être d'un individu n'est pas nécessairement de se consacrer principalement aux autres. La défense d'un intérêt personnel n'est pas nécessairement condamnable. L'individu est un individu, avant d'être éventuellement une partie d'un ensemble plus large ; la société n'est rien d'autre que la somme des interactions des individus qui la composent.

Le courage dont font preuve les hommes de pouvoir a ses limites. S'ils osent contraindre une partie de la population à se sacrifier pour une autre, ils n'ont toutefois pas le courage d'énoncer les principes qu'ils embrassent, et encore moins l'audace d'énoncer ceux qu'ils rejettent et bafouent. À chaque fois qu'ils s'arrogent plus de pouvoir, ils réduisent d'autant la liberté de ceux sur lequel ce pouvoir s'exerce. À chaque fois qu'ils font une entrave aux droits individuels, ils les détruisent, sans oser énoncer les principes de leur action.

À partir du moment où on commence à poser des conditions, à émettre des réserves ou créer des exceptions à des droits inaliénables, on admet qu'il existe quelque chose ou quelqu'un au-dessus des droits de l'individu, qui peut les violer quand bon lui semble. Si vous pensez que la société, c'est-à-dire le collectif, peut les violer pour le bien de la société (ou bien collectif) si la société (ou le collectif) l'a décidé, allez du côté où est votre place et admettez que vous êtes un collectiviste.

Quand Ayn Rand a écrit ces lignes, le plus grand ennemi de la liberté avait un nom et un visage, des frontières délimitées. Aujourd'hui, le plus grand ennemi de la liberté a des contours flous et pas de nom.

Le plus grand ennemi de la liberté, c'est l'absence de principes guidant l'action, l'absence d'éthique permettant de juger de ce qui est bien ou mal selon des critères choisis par les individus. Le collectivisme veut imposer aux hommes une éthique qui n'en est pas une et qu'il ne définit pas, où tout acte est bien, pourvu qu'on le fasse pour autrui ou pour un bien commun dont l'individu est exclu ; ou mal, pourvu qu'on le fasse pour soi. Il veut imposer aux hommes de vivre selon des principes qu'ils n'ont pas choisis, leur demandant de faire preuve d'intégrité vis-à-vis des valeurs qu'on impose à eux – il veut vous imposer de vivre selon des principes que vous n'avez pas choisis, vous demandant de faire preuve d'intégrité vis-à-vis des valeurs qu'on vous impose. Vous avez le choix. La liberté, c'est ce que vous en faites ; le pouvoir, c'est ce qu'on fait de vous.

La liberté n'a rien à vous demander, rien à vous prendre qui vous soit dû, rien à vous ôter si ce n'est ce fardeau que tous font peser sur les épaules de tous les autres dans la morale collectiviste que vous avez adoptée malgré vous. Ce que la liberté exige de vous pour ne pas devenir chaos, c'est que chaque homme respecte pour les autres les mêmes droits fondamentaux et imprescriptibles que sa propre liberté requiert : liberté individuelle, propriété privée, sûreté. Ce qu'elle implique, c'est que chacun soit responsable de ses actes et considéré comme tel. La responsabilité qui vous incombera si vous choisissez de vivre en hommes libres est bien moindre que celle qui vous incombe si vous choisissez de le devenir.

Français, si vous ne voulez pas attendre ce changement qu'on vous a promis – hier comme des lendemains qui chantent, aujourd'hui comme des lendemains qui sanglotent moins – cette décision vous revient. Personne ne la prendra pour vous ; personne ne fera venir à vous la liberté. Vous êtes les acteurs de votre destin et de votre avenir, quel qu'il soit et où qu'il soit. N'attendez pas qu'un homme providentiel vous promette la liberté demain en l'échange du pouvoir que vous lui confieriez aujourd'hui ou vous délivre des griffes d'un ennemi intangible, invisible et multiple.

Prenez votre destin en main. Prenez les rênes du pouvoir, mais ne les confiez à personne ; exigez votre souveraineté sur vous-mêmes et sur personne d'autre. Si vous voyez que l’État outrepasse les prérogatives originelles qui sont les siennes ; si vous voyez que l'argent public et le pouvoir sont utilisés à autre chose qu'à les remplir, c'est-à-dire qu'à défendre vos libertés fondamentales ; si vous voyez que les décisions qu'on vous impose illégitimement sont en désaccord avec vos valeurs, et demandent de vous que vous abandonniez votre intégrité – si vous voyez cela, et que vous n'y changez rien, vous en serez responsables.

Vous avez le choix des valeurs que vous embrassez, de l'éthique qui est la vôtre ; si vous voulez vivre comme un homme, vous avez le devoir de choisir. Pour ma part, "je jure, par ma vie et l'amour que j'ai pour elle, que je ne vivrai jamais pour le compte d'un autre homme, ni ne demanderai à un autre homme de vivre pour le mien."


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