Griffintown de Marie-Hélène Poitras

Par Venise19 @VeniseLandry

Photo : Cécile Gladel/RueMasson.com

Ça me fait plaisir de parler de l’idée audacieuse qu’est cette histoire western se déroulant dans le Vieux Montréal. Déjà, en partant, d’inclure dans la même phrase western et Vieux-Montréal, la fille aux clichés que je peux être parfois s’interroge. Avec le mot « western », me vient à l’esprit des chevaux au galop soulevant des nuages de poussière, d’énormes ceintures où pendent deux révolvers chargés, des bottes bruyantes, des chapeaux enfoncés cachant des mines patibulaires, des hommes rageurs aux jambes arquées.... Vous voyez le genre ? Ce n’est pas l’idée que je me fais du Vieux Montréa avec sa présence de chevaux se promenant et tirant avec cérémonie des calèches.
Griffontown vous fait entrer dans tout un monde. Marie-Hélène Poitras a su y faire en incluant la disparition d’un chef, la compétition entre les hommes, des personnages étranges, marginaux, des conditions rudimentaires, des gangs, des clans, ce dont on peut s’exclure ou être exclu. Ce qui entraine un rituel initiatique.  L’installation, incluant l’écurie abritant les valeureux chevaux est précaire, vétuste, peu éloigné du lieu d’action, c'est à dire ces rues que l’on désire grouillantes de touristes pour amasser le pognon, pour ensuite survivre à la saison morte.
J’ai braqué mon attention sur Marie qui désire, par-dessus tout, devenir cocher. En général, est intéressant dans le roman ce personnage qui veut et prend les moyens pour arriver à son but, alors d’autant plus comme ici, quand le milieu à pénétrer est peu commun, restreint, fermé. Par Marie, on rencontre les cochers et celui qui remplace le chef, Paul, lequel personnage, j’ai également aimé aimer ! Et puis, il y a John, un cow-boy, un vrai de vrai, qui n’est pas aussi rude qu’il en a l’air. L’interaction entre Marie et John sera captivante, comme les relations où l’on sait rendre vivants les silences. 
L’histoire est assez simple, l’intrigue n’est pas à couper au couteau, mais l’ambiance est la sauce qui rehausse chaque odeur et chaque saveur. D’emblée, je ne suis pas attirée par le monde des chevaux, l’honneur et les règles du Far-West me laissent froide, ce qui ne m’a pas empêchée de monter à chaque selle pour trotter dans cette proposition. D’y croire, tout en gardant de l’étonnement devant ce cadeau inusité.
Mais quant à moi, l’art de cette auteure au style habile et peaufiné est de nous faire croire à ce qu’elle veut bien. Griffontown est un tableau qui se peint sous nos yeux. C’est d’autant plus appréciable que des peintres de l’écriture, il y en a de moins en moins il me semble, et de plus en plus de scénaristes pour la télévision ou le cinéma.
Oups.... vient à l'instant d'apprendre que ce titre est parmi les finalistes du Prix France - Québec.  Bravo à Marie-Hélène Poitras !