Interrogé par Les Echos, Harlem Désir est revenu sur le maintien de la taxe à 75% pour les revenus supérieurs à un million d’euros et sur les négociations entre partenaires sociaux.
L’ouverture d’une enquête préliminaire sur Jérôme Cahuzac pose-t-elle un problème politique ?
Non, puisque c’était son souhait et qu’il a démenti totalement et fermement les accusations portées contre lui.
Quelle est la position du PS dans le débat qui s’engage sur le nouveau dispositif fiscal pour remplacer la taxe à 75 % ?
Nous souhaitons maintenir cette taxe sur les revenus les plus élevés – c’est la volonté exprimée par les Français le 6 mai -tout en tenant compte des remarques du Conseil constitutionnel sur les modalités. Je souhaite donc que le nouveau dispositif soit une taxe au taux marginal de 75 % pour les revenus supérieurs à 1 million d’euros dans le cadre du foyer fiscal. Cette mesure est symboliquement importante pour la justice sociale dans ce moment de redressement des finances publiques. En temps de crise, tout le monde doit participer à l’effort national et les plus hauts revenus doivent y contribuer plus fortement.
Ne craignez-vous pas que cette nouvelle taxe soit jugée confiscatoire par les sages ?
Le Conseil constitutionnel n’a pas invoqué le niveau de taxation concernant cette contribution. Je rappelle que ce prélèvement n’est pas calculé sur l’ensemble du revenu mais qu’il s’agit d’une taxation marginale qui ne s’applique que sur la part qui dépasse le million d’euros, c’est pourquoi je ne la crois pas confiscatoire. Il s’agit d’une contribution exceptionnelle et non permanente. Si l’interprétation des décisions du Conseil sur d’autres points est invoquée, elle ne remet pas en cause un taux avoisinant. Des impositions de ce niveau ont déjà existé y compris dans le temple du libéralisme que sont les Etats-Unis jusqu’à l’arrivée au pouvoir de Ronald Reagan. Nous avons prouvé avec le pacte de compétitivité que nous soutenons les créateurs et les entrepreneurs, ceux qui investissent pour créer de l’activité, de la richesse et de l’emploi en France mais pour nous, il y a aussi un impératif de justice sociale.
Appliquer cette taxe aux foyers fiscaux peut augmenter sensiblement le nombre de ménages assujettis…
C’est la prise en compte de la demande du Conseil constitutionnel. Et ce niveau de revenu, très exceptionnel, concerne généralement une seule personne par foyer. Nous pouvons maintenir la durée prévue initialement – deux ans -et l’appliquer sur les revenus de 2013 et 2014.
Est-ce une proposition personnelle ou déjà discutée avec l’exécutif ?
Je m’exprime comme premier secrétaire du Parti socialiste. C’est le rôle du parti de participer au débat, mais je me sens en harmonie avec les propos du président de la République et je travaille avec le gouvernement pour sa réussite.
Avez-vous un souhait à la veille du dernier round de la négociation sociale ?
Je recevrai les partenaires sociaux à partir de jeudi et je leur rappellerai qu’une chance historique se présente à eux. La place donnée par le chef de l’Etat à la négociation sociale est une chance pour notre pays d’avancer et de se moderniser. J’espère qu’ils la saisiront. La république contractuelle doit permettre de faire reculer la précarité et de favoriser l’emploi, elle est au coeur de notre conception sociale-démocrate.
Mais les négociations bloquent sur la taxation des contrats précaires…
Le Medef ne peut pas bloquer sur ce point, il doit y avoir des contreparties au crédit d’impôt accordé aux entreprises. Trois quarts des nouveaux contrats de travail signés aujourd’hui sont des contrats courts, et c’est inacceptable. Le Medef doit accepter le principe du donnant-donnant. Il ne peut pas demander à être écouté et bloquer une négociation quand il a une responsabilité historique entre les mains. Si l’on veut favoriser la dynamique de négociation sociale et de compromis, à tous les plans, interprofessionnel comme au sein des branches et des entreprises, l’exemple doit venir d’en haut.
Si la manifestation de dimanche des opposants au « mariage pour tous » est massive, le gouvernement devra-t-il en tenir compte ?
Le « mariage pour tous » est un engagement du président de la République et il y a une majorité au parlement pour soutenir cette réforme. Cette réforme doit donc être menée sans fléchir.
ELSA FREYSSENET, Les Echos