De nombreux jeunes créateurs, inventeurs et entrepreneurs québécois récoltent des milliers de dollars de financement en quelques heures. Bien qu’américain, le populaire site KickStarter contribue de plus en plus à l’économie québécoise. C’est le cas de Sauropod Studio. En juillet dernier, ils ont déposé une demande de financement de 80 000$ pour un projet de jeu vidéo. En moins de 5 heures, l’objectif était atteint. Au bout de 4 semaines, le cadran indiquait 702 516$. Soit 878% de la cible. L’instigateur du projet «Castle Story» François Alain n’en revient pas encore: «À la fin août, on recevait l’argent. C’est pas plus compliqué».
FM: -Mais dites-moi François, ces 700 000$ vous les devez à quelqu’un? Vous promettez un taux d’intérêt?
FA: -Non. Les bailleurs de fonds ne sont que des passionnés. Ils tombent en amour avec notre initiative et nous donnent l’argent. Ils ne s’attendent à aucun retour ou remboursement. Leur récompense, c’est de voir que l’idée se concrétise. Et nous, on les tient au courant du développement, on leur donne accès à des versions Beta et on donne des chandails ou items promotionnels. C’est une relation d’honneur.
GÉNÉROSITÉ 2.0
Vous saisissez? Sur une intention de lancer une entreprise, un jeu, un film ou un site WEB, le public DONNE des millions de dollars. C’est ça, le CrowdFunding. Wow!
Le phénomène KickStarter ne peut plus être ignoré. Seulement en 2012, ce site de financement en ligne a contribué à lancer 18 000 projets en levant 320 millions de dollars américains. KickStarter récolte 600$ la minute provenant de 177 pays. 17 projets ont même réussi à récolter plus d’un million. Le record appartient toutes fois à la montre intelligente Pebble. Ses jeunes inventeurs ont reçu 10 millions. Soit 10 266% de plus que ce qu’ils espéraient.
Montres, pizzas, vêtements, opéra, reportage, bandes dessinées, jeux vidéo, disques, livres, films, sites web… TOUS les types de projets trouvent des partisans et des dollars sonnants.
Comment est-ce possible?Je constate que la nature a horreur du vide. Depuis 2009, les entrepreneurs sont dans un cul-de-sac!
-Les anges financiers et gestionnaires de capital de risque sont archifrileux
-Les caisses sont prêtes à prêter… si vous n’avez pas besoin d’argent
-Les conditions de prêts des fonds de syndicats sont déraisonnables
-…Et j’en passe
SOIT. Alors les jeunes créatifs et gens d’affaires pleins de coeur au ventre sont allés chercher les capitaux OÙ ils se trouvent. Directement dans les poches de leurs futurs clients.
Vite sur ses patins, le législateur américain a pondu en toute hâte une loi sur mesure pour autoriser et encadrer le financement populaire (CrowdFunding Act). Depuis 3 ans, on estime à plus de 2 milliards les sommes récoltées par les sites de genre. IndieGogo, Crowdfunder et KickStarter étant les plus fréquentés.
ILLEGAL au CANADA, et puis?
Techniquement, KickStarter ne peut récolter des investissements des Canadiens ou financer des entreprises du Canada. C’est illégal. Pourtant en ce 10 janvier 2013, j’ai dénombré plus de 200 projets canadiens, dont une trentaine de Montréal.
François Alain, de Sauropod Studio explique comment il a réussi à contourner cet obstacle. Ne cherchant pas à avoir des problèmes avec les autorités des valeurs mobilières, ils ont simplement créé une société au Delaware. Pour moins de 2000$, le tour est joué! L’argent a été demandé de là, a été reçu là-bas et s’y trouve encore. La société américaine est officiellement propriétaire du Studio montréalais. En préparant la demande, ils estimaient que pour un apport de 80 000$, le jeu en valait la chandelle. Comme ils ont obtenus plus de 700 000$… Ça en vallait vraiment la peine.
Je suis impressionné par la débrouillardise et la « drive » de ces jeunes entrepreneurs, mais franchement désolé par notre retard en matière de législation en valeurs mobilières et de soutien à l’entreprenariat. Si les autorités réglementaires ne légifèrent pas en vitesse sur le sujet… et bien, de beaux projets comme le «Castle Story» de Sauropod Studio vont engraisser en taxes et impôts le trésor américain.