Dauvillier – Chapron © Glénat – 2012
Amine Jaafari est palestinien. Il a obtenu la nationalité israélienne et exerce en tant de chirurgien dans un hôpital de Tel-Aviv. Amine est bien intégré ; il est marié et vit dans un quartier bourgeois de la ville. Enfin, il a de bons rapports avec ses collègues et de nombreux amis, y compris dans la police.
Amine a une bonne situation, une bonne réputation. Jusqu’à ce jour où sa vie bascule. Ce jour maudit où un kamikaze se fait exploser dans un restaurant de la ville. Ce kamikaze, c’est sa femme. Après le choc de la nouvelle, le médecin passe par différents stades, de la consternation à la colère.
« Ce n’est pas épouse. Ce n’est pas elle. Je la connais, ce n’est pas elle… »
Il a besoin de comprendre les raisons qui ont poussé sa femme à devenir une martyre de la cause palestinienne. Comprendre. Cet objectif va devenir pour lui une obsession au point qu’il décide de mener sa propre enquête. Il souhaite poser ses questions aux leaders des mouvements extrémistes…
« Je n’ai pas l’intention de me venger ou de démanteler le réseau. Je veux juste comprendre comment la femme de ma vie m’a exclu de la sienne ».
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Ce récit est adapté du roman éponyme de Yasmina Khadra. A mon grand regret, je ne l’ai toujours pas lu. C’est donc pour moi l’occasion de me sensibiliser à cette œuvre plusieurs fois récompensée.
Un album de 152 pages qui nous plonge au cœur de la psyché du personnage. Très rapidement, Loïc Dauvillier empoigne son lecteur et le tient en haleine. A l’instar du héros, j’ai ressenti un fort sentiment d’incompréhension quant au bien-fondé des attentats-suicides.
Quelle fierté peut-on tirer quand on envoie des gens mourir pour que d’autres vivent libres et heureux ?
Le questionnement du personnage principal fait écho en nous. Comment ne pas réagir de la sorte lorsqu’on réalise aussi violemment que la personne avec qui on vivait nous est totalement inconnue ? Comment ne pas être abasourdi quand on découvre que notre conjoint défendait des opinions étaient radicalement opposées aux nôtres ?
Au-delà du parcours de cet homme, c’est une réflexion plus globale qui s’installe. Les notions de respect, de droits, de territoire et de légitimité s’entrechoquent en permanence. Que dire de ces deux peuples meurtris par l’histoire ? Que penser du bien-fondé du Mur de la honte ? Comment appréhender le fait qu’un peuple ressente le besoin de s’enfermer (au sens propre du terme) au sein même de ses frontières ? Que penser des palestiniens qui, pour manifester leur opposition et leurs souffrances, envoient leurs enfants se suicider ?…
N’y aura-t-il donc jamais d’alternative ? Aucune solution pacifique qui soit viable ? Les albums que j’ai lus sur ce thème posent tous les mêmes constats et nourrissent chez moi un questionnement récurrent auquel je n’ai pas de réponses. D’ailleurs, vu la complexité de la situation, qui pourrait se targuer d’avoir des certitudes sur ce sujet ?
Quoiqu’il en soit, je peux affirmer que lorsqu’un album parvient à susciter de tel questionnement auprès de ses lecteurs, c’est que le scénario prend aux tripes. Loin de laisser indifférent, les propos interpellent et percutent. La tension monte crescendo et seul le dénouement est capable d’arrêter ce processus…
Après avoir refermé l’album, la réflexion se prolonge. Le contraste est fort entre les conditions de vie de part et d’autre du mur de la honte. D’un côté, le confort d’Israël, les paysages urbains presque intacts et le racisme à l’égard des arabes. De l’autre, les villages palestiniens laissés à l’abandon, les armes et la méfiance à l’égard de l’étranger.
« – Tout Juif de Palestine est un peu arabe et aucun arabe d’Israël ne peut prétendre ne pas être un peu Juif.
- Tout à fait d’accord avec toi. Alors pourquoi tant de haine dans une même consanguinité ? »
Une lecture que je partage avec Mango
Superbe. Un album de qualité dont je vous recommande chaudement la lecture.
Une lecture faite en compagnie d’OliV : je vous invite à lire sa chronique !
Les chroniques : Philippe Belhache, Antigone.
Extraits :
« Il faut savoir regarder la mer. C’est un miroir qui ne sait pas nous mentir. C’est aussi comme ça que j’ai appris à ne plus regarder derrière moi. Avant, dès que je jetais un coup d’œil par-dessus mon épaule, je retrouvais intacts mes chagrins et mes revenants » (L’attentat).
« La difficulté commence quand ceux qui se la coulent douce viennent tirer l’oreille à ceux qui sont dans la merde jusqu’au cou. Ta femme avait choisi son camp. Le bonheur que tu lui proposais avait une odeur de décomposition. Est-ce qu’il te faut un tableau pour comprendre ou est-ce que c’est toi qui refuses de regarder la réalité en face ? » (L’attentat).
Du côté des challenges :
Challenge Histoire : le conflit israélo-palestinien
Challenge Histoire
L’attentat
One shot
Adaptation du roman de Yasmina Khadra
Editeur : Glénat
Dessinateur : Glen CHAPRON
Scénariste : Loïc DAUVILLIER
Dépôt légal : septembre 2012
ISBN : 978-2-7234-8254-7
Bulles bulles bulles…
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