Avec Eric Marboutin, chef de projet à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage
Emission de Canalacademie
Au cours de cette émission coproduite par Canal Académie et l’ONCFS à l’occasion du quarantième anniversaire de l’Etablissement public, Eric Marboutin nous aide à mieux comprendre comment ces deux prédateurs s’intègrent dans nos territoires, avec la difficile cohabitation avec le pastoralisme.
Si le loup et le lynx avaient disparu du territoire français, les premiers ont fait leur réapparition dans les Alpes à la frontière italienne partir de 1992 ; les seconds ont bénéficié de programmes de réintroduction à partir de 1980 dans le Jura suisse puis dans les Vosges.
On ne dénombre aujourd’hui pas moins de 230 loups à la sortie de l’hiver 2011-2012, et quelque 150 lynx. La plupart vivent en dehors des parcs et réserves naturelles. « Les loups vivent en grande majorité dans les Alpes, mais aussi dans les Pyrénées orientales depuis 1998 ; des cas ont été détectés dans le Massif central et deux autres individus viennent de se sédentariser dans le Sud du massif vosgien » précise notre invité Eric Marboutin.
Son unité de recherche à l’ONCFS travaille à comprendre l’évolution de ces deux espèces, leur cohabitation avec l’homme, l’élevage et étudie leur répartition géographique. Un travail de longue haleine puisque « le loup et le lynx sont deux espèces qui s’étendent sur de grandes superficies (jusqu’à 300 km2) et sont très discrètes ! ; des observateurs bénévoles sont formés sur le terrain pour les aider à récolter des indices. Pour les loups, nous réalisons surtout des analyses génétiques sur des échantillons d’origine biologique (poils, fèces). Quant aux lynx, nous les identifions avec un piégeage photographique, où nous pouvons les reconnaître grâce aux taches de leur pelage ».
Répartition de la présence du loup en 2011
Pour le loup qui consomme en moyenne 4 kg de viande par jour, ce ne sont pas les proies sauvages qui posent problème, mais les proies domestiques : les ovins.
Comment faire cohabiter au mieux le loup et les éleveurs ?
« Ce n’est pas un exercice facile, car le loup véhicule tout un cortège d’histoires passées. Le problème repose désormais essentiellement sur la perte occasionnée sur les troupeaux. Pour toute perte, il y a un constat d’attaque à l’issue duquel il y a indemnisation. liée à la perte de l’animal mais aussi indemnisation pour les pertes indirectes (comme la dispersion des animaux, alimentation perturbée et avortements spontanées des brebis). A cela s’ajoute la mise en place de moyens de protection tels que les enclos, le gardiennage, les chiens de protection. Toutes ces dépenses sont prises en charge par l’Union européenne et le Ministère de l’agriculture. Et puis lorsque les attaques deviennent récurrentes, il y a prélèvement directe du loup, à titre exceptionnel et dérogatoire puisque initialement, c’est une espèce protégée... »
Répartition de la présence du lynx en 2011
Aujourd’hui, le suivi de ces populations dépasse nos frontières. « Depuis 10 ans, les chercheurs français et italiens se sont regroupés pour mettre en commun leurs données concernant le loup. Avec les Suisses, nous avons développé un suivi de piégeage photographique transfrontalier pour mieux observer les lynx ».
Eric Marboutin collabore en parallèle à deux autres projets :
le premier, en collaboration avec le CNRS, sur l’analyse génétique du régime alimentaire du loup, « pour connaître la proportion d’animaux sauvages et domestiques dans leur régime alimentaire ». le second, en collaboration avec l’équipe du CNRS de Montpellier « vise à développer des approches mathématiques les plus fines possibles pour calculer le taux de croissance des loups et leur répartition géographique ».
Eric Marboutin
Eric Marboutin est chef de projet de l’unité de recherche sur le loup et le lynx à l’Office National de la chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS) dans le département de l’Isère.
Source : Canalacademie