Conte dramatique - 1h30
Sortie salles France - 12 décembre 2012
avec Quvenzhané Wallis, Dwight Henry, Levy Easterly,...
Caméra d'Or - Festival Cannes 2012
Louisiane, Bayou, un petit village bidonville dans les bras du Mississipi. C'est là que vit la jeune Hushpuppy avec son père et quelques autres familles que les menaces du fleuve et des ouragans ne parviennent à déraciner. Ils vivent d'alcool, de volailles, de fêtes et de rires. Parce qu'ils doivent survivre, ils vivent comme des épicuriens. Parce que la vie est dure, le père d'Husphpuppy ne lui apprend pas à comprendre mais à lutter avec force, conscient que son rôle de parent unique doit permettre à la fillette de pouvoir survivre après lui, malade, condamné tout comme la terre où ils vivent. Car il paraît que les glaciers fondent, que les aurochs pris dans la glace pourraient être libérés, et on ne sait ce qu'il restera après la violente tempête qui s'annonce...Malgré l'affiche détestable, qui laisse penser d'ailleurs que le film s'adresse à un jeune public, les images des Bêtes du Sud Sauvage sont très belles, en nuances de gris, bruns, beiges. Après les premières images, sereines, d'une fillette en bottes de caoutchouc jouant avec des poussins vivants, on comprend rapidement qu'il ne s'agira pas d'une histoire merveilleuse d'enfant faisant ami-ami pour la vie avec des aurochs au coeur tendre.
Très rapidement, en suivant Hushpuppy pas à pas, son caractère affirmé, ses loisirs de bric et de broc, son regard perçant sur les adultes, on progresse dans un film qui place le thème de la relation père-fille (ou plutôt père-fils tant le père tient à ce qu'Hushpuppy soit élevée pour pouvoir se débrouiller contre les ennemis humains ou naturels avec autant de force, de pugnacité qu'un garçon) comme axe central, bouée de sauvetage au milieu d'un fleuve-océan dévastateur, une branche à quoi se raccrocher. Mais une branche très cruelle. Son père, veuf pense-t-on, est violent, souvent éméché, assénant haut et fort tout refus de mièvrerie et d'excès de tendresse, tout refus de larmes. C'est bien dur pour Hushpuppy qui vaillamment se rallie à cette position pour lire la fierté dans les yeux de son père quand elle refuse de croire en sa mort prochaine malgré la maladie qui s'étend sur la peau de son épaule.
Et puis ce film aussi, c'est la Nature, les éléments, un contexte qui détonne dans notre monde occidental, un environnement qui impose d'autres règles de vie, règles de survie. L'Education aussi, avec une classe dans laquelle la maîtresse enseigne aux petites filles d'autres choses que l'orthographe et l'histoire des Etats Unis. Un enseignement pratique tourné là encore vers la Nature, la survie, la protection de l'autre. Un film aussi sur des vies à la marge du système social gouvernemental qui ordonne l'évacuation à l'annonce de la tempête, conscient que les habitations précaires et embouées sont vouées à disparaître. Mais les irréductibles ne peuvent pas l'entendre, sont là pour y rester jusqu'à leur dernier souffle, celui que leur ôtera la catastrophe naturelle ou la maladie. Et peut-on parler de réussite de protection sociale lorsque ces déracinés se retrouvent parqués dans des gymnases contre leur gré, Hushpuppy rhabillée en robe et coiffée en fille, comme un viol à sa personnalité.C'est tout ça et beaucoup encore que l'on verra avec "Les bêtes du sud sauvage", un conte cruel qui évoque Katrina et les autres tempêtes, celles qui se répètent dans les marécages inhospitaliers où survivent toujours quelques reclus qui ne font pas parler d'eux.Un film envoûtant, entraînant grâce à une force qui nous surprend et englouti toute notre attention à chaque scène.
L'avis de Cluny - Critiques clunysiennes
L'avis de Sandra Mézières - InTheMoodForCinema